Enseignement/Formation


Certains jours, on croit rêver.
J’ai l’honneur de faire partie du fameux « Groupe Wallonie-Bruxelles » créé au sein de la Communauté française de Belgique afin de réfléchir sur les institutions de la Belgique francophone, entre personnalités politiques de la CFB et « membres de la société civile » (de vous à moi, j’ai parfois un peu de mal à comprendre pourquoi les hommes et femmes politiques pourraient ne pas faire partie de la société civile, mais ne chicanons pas sur le vocabulaire… après tout, je ne comprends pas mieux en quoi cette Communauté est française).

Exercice périlleux et compliqué s’il en est, mais fort intéressant au demeurant. Car il faut bien avouer que si la Belgique détient le record de la complexité des institutions, c’est en bonne part aux francophones qu’elle le doit (je passe rapidement car je ne voudrais pas désarçonner mes quelques lecteurs étrangers avec des notions telles que Région wallonne, Région bruxelloise, Communauté française et… cerise sur le gâteau: la CoCoF! Tout cela avec des compétences différenciées et parfois redondantes ou partiellement superposées). Sans parler des curiosités comme les Fourons ou la Communauté germanophone.

Une simplification s’impose, mais toutes ces structures n’ont pas été mises en place par hasard et on ne les remplace pas par autre chose (de mieux, de préférence!) d’un simple claquement de doigt.

S’il est clair qu’on se dirige vers un consensus qu’on appelle aujourd’hui « Fédération Wallonie-Bruxelles », association assez logique des régions wallonne et bruxelloise recouvrant les compétences régionales spécifiques et gérant en commun les compétences communautaires (simple, non?), de nombreux problèmes restent à résoudre. Il est donc un peu tôt pour tirer des conclusions.

Là où ça se corse, c’est lorsqu’on sait que la sous-commission dont je fais partie (Enseignement-Formation-Recherche) n’a pas terminé ses travaux. L’enseignement représente en effet 80% des missions de la Communauté, le sujet n’est donc pas anodin. Et, qui plus est, l’enseignement est bien le sujet sur lequel tout le monde a un avis. C’est ainsi que d’autres sous-commissions ont franchi les limites de leur propre sujet et ont étendu leur réflexion à l’enseignement. C’est le cas du sous-groupe Economie, qui a tiré des conclusions s’étendant assez naturellement au champ de la formation — rien de mal à cela — et qui suggère que soit examinée la possibilité de régionaliser des pans de formation professionnalisante.

Et là où ça dérape et où on croit rêver, c’est qu’aujourd’hui, pour la deuxième fois, la Presse (Le Soir en juin, La Libre ce matin) annonce une régionalisation de l’Enseignement comme étant la proposition du Groupe Wallonie-Bruxelles plénier avant même que la sous-commission ad hoc ait rendu son rapport. Avec mes collègues de la sous-commission Enseignement, nous sommes évidemment perturbés par l’avalanche de demandes d’interviews du reste de la Presse pour confirmer cette proposition, sans compter toutes les personnes qui nous demandent quelle mouche nous a piqués.

Et si on attendait un tout petit peu? Le 27 septembre 2007, on avait dit un an. On ne se donnerait pas rendez-vous le 27 septembre 2008…?

J’apprends avec effroi que certains de nos enseignants se flattent de la mise à disposition, pour leurs étudiants et gratuitement, de leurs notes de cours « en ligne ». Fort bien, me direz-vous. Moderne et efficace.
Seulement voilà: il s’agit de leur cours en format Word ou PDF.
On n’a pas dû bien se comprendre…

Quand nous encourageons les cours consultables à distance, c’est évidemment de cours réellement adaptés à l’Internet qu’il s’agit. Interactifs, animés, illustrés, bref, disposant des avancées techniques du jour.

Mettre un cours en format texte gratuitement à la disposition des étudiants, c’est juste se simplifier infiniment la vie et la leur compliquer. Je suis sûr que l’intention est excellente: on a l’impression que c’est « donné » gratuitement puisqu’on n’en retire aucun profit et que l’accès est gratuit. Mais en réalité, la formule coûte plus cher aux étudiants que n’importe quelle autre solution. En effet, le tirage d’un cours sur imprimante transfère simplement le coût du tirage (papier, cartouches d’encre) sur l’étudiant, en supposant qu’il soit équipé pour cela. De surcroît, par rapport au coût d’achat du syllabus imprimé et relié par les Editions de l’ULg ou par un simple copy-service ou encore par un collectif étudiant.

Mais ne renonçons pas pour autant à des appuis didactiques divers rendus accessibles sur l’Internet ou via myULg. On va dire que je radote, mais c’est précisément pour aider les encadrants et notamment à ces techniques, que les divers programmes de l’IFRES ont été mis sur pied. Et parmi ces formations ou informations, on trouve les techniques de transmission du savoir à distance les plus appropriées aux buts qu’on recherche. Voilà pourquoi il est préférable de se renseigner plutôt que d’improviser, pas toujours à bon escient.

Le rapport de synthèse de l’enquête CIUF/EduDOC sur les compétences informationnelles et documentaires des étudiants qui accèdent à l’enseignement supérieur en Communauté française de Belgique, enquête dont je vous parlais le 25 mai est maintenant accessible (en pdf) sur le site edudoc.be et sur le site du CIUF.

Mardi dernier s’est tenue à Gembloux une journée d’étude organisée conjointement par commission « Bibliothèques » du CIUF et le groupe « EduDOC ». Journée très intéressante à bien des égards et en particulier parce qu’y étaient présentés les résultats d’une vaste enquête sur les capacités informationnelles des étudiants qui accèdent à l’enseignement supérieur en Communauté française de Belgique.
Ce sujet a toute son importance en matière de soutien à la réussite puisqu’il est prouvé depuis longtemps que ces compétences — encore jamais évaluées chez nous! — sont en lien direct avec le niveau de succès lors des études supérieures.

L’enquête mesure le niveau de performance (NP) en matière d’accès à la documentation et de l’utilisation qui en est faite. Elle est inspirée de celle qui a été réalisée au Québec il y a 5 ans, adaptée au contexte belge francophone. Elle compile 1.865 questionnaires remplis par des étudiants tirés au sort dans les listes d’inscription de 35 établissements d’enseignement supérieur (Enseignement artistique, Hautes écoles et Universités). Elle sera bientôt disponible dans tous ses détails sur le site Internet du CIUF. En attendant, en voici les points saillants.

• Le NP moyen est faible (7,67/20) et légèrement inférieur à celui du Québec il y a 5 ans (8,97/20), plus faible chez ceux qui s’orientent vers le supérieur non-universitaire (7,26) que vers l’université (8,12) et surtout plus faible chez ceux qui se destinent à devenir enseignants dans le primaire ou le secondaire inférieur (6,90). Cette faiblesse se manifeste en particulier dans la capacité d’utilisation. Curieusement, elle n’a rien à voir avec le niveau socio-culturel familial, ni avec l’accès à l’Internet à domicile.
• Le NP est d’autant meilleur qu’on arrive jeune à l’enseignement supérieur, mais également si on a choisi des options fortes dans le secondaire (une et mieux encore, deux).
• Le NP est d’autant meilleur qu’on a acquis une bonne pratique des bibliothèques dans les études antérieures (mieux s’il y a une bibliothèque dans l’établissement et mieux encore si on l’a utilisée souvent).

On voit clairement que seul le dernier point permet une action précise de la société et non de l’élève: veiller à ce que les établissements d’enseignement primaire et secondaire disposent d’une bibliothèque, ou d’un accès pratique à de l’information référencée.

Or il se trouve que, dans notre Communauté, ce n’est pas la tradition. Certains y sont même très opposés. Certes, il existe des prêts de livres, parfois une petite (voire une grande) bibliothèque de prêt d’ouvrages littéraires, mais très rarement une bibliothèque de référence dans de nombreux domaines, au sein de laquelle il est donné à l’élève une certaine autonomie de recherche de documentation, d’organisation personnelle, d’apprentissage de respect des délais, etc.

Aujourd’hui, la pensée unique en matière d’aide à la réussite dans l’enseignement supérieur préconise une action au sein même de cet enseignement, quand il est déjà très tard, avec la mise en œuvre coûteuse de mesures d’encadrement rapproché, voire de coaching personnalisé. C’est indiscutablement une voie à suivre mais elle nécessite des moyens considérables, il faut le savoir, moyens qui sont difficilement à la portée des universités et hautes écoles , vu le niveau de financement que la sagesse publique leur accorde. De plus, elle instaure une véritable période transitoire au début du supérieur alors que la transition pourrait, comme dans la plupart des pays, s’effectuer en fin de secondaire. Tous les encadrants universitaires savent et répètent que ce qui manque le plus, c’est un apprentissage préalable d’une certaine autonomie de gestion du temps et de l’apprentissage à apprendre.

Qu’attend-on pour revoir dans nos enseignements primaire et secondaire cette politique archaïque qui continue à négliger, et même souvent, semble-t-il, à réprouver l’accès autonome à la documentation? Et celui-ci ne doit pas nécessairement impliquer l’investissement de la mise sur pied d’une bibliothèque importante, il existe des bases de données électroniques, et même l’Internet, pourquoi pas, à condition d’en faire l’usage dans un contexte contrôlé où on apprend non seulement à rechercher l’information, mais aussi à l’utiliser de manière critique et sélective.

Je lance un appel pour que cette excellente enquête, réalisée dans des conditions parfaitement rigoureuses et professionnelles et qui peut être élargie (il sera possible aux établissements eux-mêmes de s’en inspirer pour tester leurs propres élèves), constitue l’électrochoc salutaire qui fasse évoluer rapidement une composante actuellement embryonnaire ou liée au hasard, et pourtant essentielle, de la formation des jeunes en Communauté française de Belgique.

Social Networks
Internet crée de nouvelles opportunités et de nouvelles habitudes. Celles-ci sont rapidement saisies, exploitées et intégrées, en particulier par les jeunes. C’est ainsi qu’on voit se développer les « Social Networks » ou « réseaux sociaux » du Net. Ils reposent sur le principe du référencement d’amis et de connaissances en cascade, avec les possibilités de contacts nouveaux que cela implique. Beaucoup d’adolescents se lancent sur cette piste qui, plus que toute autre opportunité de rencontre, permet de contourner les difficultés sociales de la rencontre réelle, de dépasser la timidité et les inhibitions du vrai face-à-face. Le succès actuel des réseaux sociaux est le meilleur signe de leur efficacité. C’est ainsi que Facebook, LinkedIn, MySpace, Friendster, Netlog ou le très critiqué Tagged, ont rallié des dizaines de milliers de membres.

On pourra disserter longtemps sur le point de savoir si ces réseaux sont une bonne chose ou non. Selon certains, ils apportent des opportunités inégalées d’établissement de contacts et permettent de nouer des camaraderies ou des amitiés, et le nombre quasi illimité de contacts augmente statistiquement les chances de trouver la relation idéale. Pour d’autres, la dissimulation derrière la barrière protectrice de l’écran d’ordinateur augmente les risques de réclusion volontaire et offre aux adolescents le leurre de la prise de contact facile, voire inoffensive.

Ce qui est sûr, c’est que ces réseaux ne sont pas sans danger, comme le rappelait encore récemment Eric Nunès dans Le Monde, pas moins que les rencontres véritables, de nombreux requins rôdant dans le cyber-océan…

Les réseaux sont nés aux USA, l’un des plus célèbres étant Facebook, inventé par des étudiants de l’Université Harvard et leur servant de « trombinoscope » virtuel. Très vite, cet outil interne a connu une très grande popularité et est devenu leur meilleur moyen de rencontre, chacun y notant ses goûts, ses intérêts et ses hobbies, y insérant sa ou ses photos, et s’accordant de la sorte des possibilités de faire connaissance et de bavarder avec des inconnus, avant d’en venir à des rencontres réelles. Rapidement, l’outil est sorti du campus universitaire pour se répandre dans le monde entier (un site Facebook francophone existe) et devenir une grande aventure commerciale extrêmement lucrative grâce, précisément, aux informations sur les goûts et les intérêts des membres. En effet, ces informations qui ne concernent, en principe, que les autres membres ou futurs membres du réseau, sont captées par les robots de recherche et servent à orienter l’avalanche de publicités qui va déferler ensuite sur eux, parfaitement ciblée.

Pourquoi pas chez nous ?
Une université qui se veut à la pointe de l’informatique en tant qu’outil de communication ne peut ignorer ces pratiques nouvelles. Elle se doit même de les utiliser, non pas pour les « récupérer », encore moins pour les contrôler, ces deux objectifs n’étant pas acceptables, mais s’il s’agit d’un outil fréquemment utilisé par beaucoup d’étudiants, l’Institution doit pouvoir adopter ce nouveau concept et en faire elle-même un usage « sympathique » et perçu comme positif par tout le monde. Nous développons actuellement un outil de ce genre, sur la base du « trombinoscope » que nous avons lancé avec le nouveau site web. La technologie est au point, il ne manque que l’ajout de fonctionnalités usuelles dans ce genre d’outils que nous pourrions élaborer en collaboration étroite avec les étudiants eux-mêmes avant de la mettre complètement à leur disposition.

Pourquoi recréer un réseau pour nos étudiants alors que Facebook et d’autres existent ? Comme mentionné préalablement, les outils publics sont une mine d’informations pour des exploitations commerciales, voire même potentiellement pour des usages nettement moins avouables. D’autant que les jeunes utilisateurs de ces produits n’ont que très rarement une attitude prudente dans la divulgation d’informations qui les concernent. Il est de notre devoir de protéger la vie privée de nos étudiants. Tous les développements réalisés sur myULg respectent ce leitmotiv.

Mais le besoin existe-t-il ? Les étudiants de l’ULg participent-ils à ces réseaux ?
Une enquête réalisée tout récemment par le SEGI nous indique que, pour ce qu’on peut en savoir, on trouve sur Facebook un groupe « ULg » qui compte 1.058 membres, ce qui est beaucoup. On en trouve également d’autres: « HEC-ULg » (732 membres), « Faculté de Droit « (214), « Ingénieurs civils » (195), « HEC Alumni » (187), « Faculté de Médecine » (122) et « Etudiants vétérinaires » (113). On y trouve aussi beaucoup de groupes relatifs aux principaux établissements d’enseignement de Liège, des groupes Erasmus, etc.

Le pli est donc largement pris et on comprend d’emblée le mécanisme d’appartenance à un réseau large, mondial, mais aussi à des sous-groupes plus restreints. Si ces sous-groupes peuvent définir une catégorie particulière de gens qui ont (ou pensent avoir) un point commun (par exemple: les joueurs d’échecs ou les philatélistes), il est intéressant de remarquer que se constituent, dans Facebook, des sous-groupes « ULg » ou « Etudiants vétérinaires à l’ULg ». Ceci indique donc qu’il existe un usage potentiel pour un réseau organisé dans la Maison.

L’existence d’un réseau propre à l’ULg ne remplacerait certes pas l’usage d’un système plus vaste, mais pour autant qu’on laisse aux étudiants le loisir de le gérer et de le modérer eux-mêmes (afin d’éviter à la fois les dérapages ou un sentiment de « Big Brother is watching you! » qui constituerait un frein à l’adoption des réseaux maison), il pourrait trouver une utilité et concourir à une meilleure solidarité étudiante, une meilleure mobilisation dans leurs rangs pour une implication dans des responsabilités de politique étudiante au sein de l’ULg. Il pourrait aussi servir d’organe de diffusion à la disposition des étudiants pour une plus grande liberté d’expression et une plus grande participation à la vie de l’Institution. On imagine également l’efficacité d’un tel outil pour la simple diffusion d’informations en matière de culture, de divertissements et d’organisations diverses ou tout simplement pour des contacts rapides liés aux cours, aux horaires, etc. Enfin, en tant que facilitateur potentiel de la socialisation de certains étudiants peu enclins aux contacts sociaux directs, un tel outil représente un facteur supplémentaire de réussite.
Et il n’est nullement besoin de réinventer la roue, notre système très avancé et déjà bien en place, myULg, peut être la base d’un développement de cette nature.

Pas que pour les étudiants
Enfin, on réalise aisément l’intérêt d’un tel système pour les diplômés, les anciens qui pourraient ainsi rester en contact, reprendre contact, s’aider dans leur recherche d’emplois et garder avec l’institution elle-même, et sa toute nouvelle cellule de suivi des diplômés en particulier, un lien fort utile. L’Association des Amis de l’ULg, récemment renommée « RéseaULg » (tiens donc!) devrait également y trouver un intérêt car le principe étant basé sur les réseaux de réseaux et leur imbrication en poupées russes, les associations disciplinaires ou thématiques pourraient également profiter de ce système.

Le projet, à l’étude au SEGI, devrait être disponible dans quelques mois et confirmer, s’il en était encore besoin, le profil de notre Institution en tant qu’Université numérique…

Je ne voudrais pas donner l’impression de réduire la réflexion étudiante face à « Bologne » à celle que je décrivais la semaine dernière. La plupart des étudiants européens ont d’autres idéaux et font preuve d’une vision bien plus intéressante que celle des quelques étudiants catalans qui voulaient nous faire écrire une motion demandant la démission de leur recteur parce qu’il avait, lors d’une manifestation la semaine précédente, fait intervenir la police…
En effet, à ce même congrès de l’EUA à Barcelone, une expression plus représentative a été donnée par Christine Scholtz, une étudiante en histoire de l’art, science politique et philosophie à l’Université Libre de Berlin. Très active dans la mise en œuvre de « Bologne » en Allemagne depuis plusieurs années, elle a montré une très grande maturité dans son approche des atouts et des défauts de la réforme. En substance:
1. la mobilité étudiante reste, dans toute l’Europe, un mythe car peu d’entre eux profitent réellement des crédits transférables, faute de soutien financier;
2. la pratique des langues étrangères reste encore, dans certaines universités, très limitée, voire inexistante;
3. l’enseignement du type « gavage de poulets en batterie » subsiste encore dans quelques pays (dont le nôtre!) où l’ex-cathedra demeure un principe de base;
4. certains pays (dont le nôtre!) passent largement à côté de l’esprit de « Bologne » en maintenant une organisation de l’enseignement supérieur basée sur l’année académique, ce qui rend très peu utile la notion de crédits accumulables.

En conclusion, au lieu d’entretenir une logique d’affrontement entre autorités académiques-enseignants et étudiants, elle appelle à une alliance objective en vue d’obtenir que le processus de Bologne, voulu par les gouvernements et considéré à tort par bon nombre d’entre eux comme accompli, se réalise réellement, non pas au travers de mesures cosmétiques et peu intéressantes, globalement, mais dans l’accomplissement de ses intentions originales.

Cette semaine, lors de la réunion de l’EUA à Barcelone où étaient rassemblés 350 recteurs d’universités, les étudiants catalans se sont manifestés et nous ont octroyé deux heures de palabres dignes de la meilleure époque de la contestation universitaire de ’68, et une séquestration dans les bâtiments universitaires.
Si l’ambiance et le ton y étaient, si on se croyait, qu’on le veuille ou non, revenus à l’époque tout à la fois bruyante, brûlante et joyeuse d’il y a (déjà!) quarante ans, le sujet était moins glorieux. En effet, la revendication ici portait sur l’abolition du processus de Bologne, non seulement symbole, mais mise en œuvre à leur yeux de la décadence universitaire par la marchandisation et la mondialisation de l’enseignement.
Il n’est pas toujours facile — sans doute pas plus qu’il y a quarante ans pour les recteurs de l’époque — de suivre la rhétorique des représentants étudiants qui semblent débobiner par cœur leurs slogans bien plus qu’ils ne donnent réellement l’impression d’y croire.
Evidemment, il n’est pas simple de suivre les propos énoncés par des étudiants dont l’idéal est de n’apprendre ni l’anglais, ni le français, ni aucune autre langue, et qui portent sur la gratuité des études, le droit universel à la réussite et le refus systématique de la mobilité et de l’internationalisation, symbole selon eux de la globalisation perverse des universités et de l’élitisme financier.
Si on pouvait se retrouver dans l’atmosphère (qui m’a paru cependant plus grave et désabusée mais peut-être n’est-ce qu’un effet d’optique dû au temps qui passe), on ne pouvait se reconnaître dans les idéaux ni dans la nature même du combat et de la revendication.
Sommes-nous devenus comme les bourgeois de Brel, ou les enjeux ont-ils réellement changé ?

Un nouveau site institutionnel
Lundi dernier, nous « basculions » le site internet de l’ULg dans sa nouvelle configuration.
C’était enfin l’arrivée d’un nouveau design plus moderne et plus professionnel, d’une nouvelle structure pensée en fonction de l’utilisateur et non plus en fonction de l’organisation interne de l’Institution.
Ne jetons la pierre à personne. L’ancienne structure était le reflet de la manière dont les choses se sont mises en place dès la naissance de l’Internet, chaque entité se présentant dès qu’elle en a eu la possibilité.
Aujourd’hui, lorsqu’on arrive sur le site, il existe deux principales possibilités d’aller plus loin: par thèmes ou en fonction du profil du visiteur. On bénéficie donc d’une double navigation.
L’élaboration du nouveau site a nécessité un effort considérable: 2.000 nouvelles pages, 6.000 nouveaux documents. Que toutes les équipes qui ont mis les bouchées doubles pour respecter les délais soient remerciées, le travail est impressionnant, le résultat est formidable.

Une extraordinaire ressource pour les étudiants
Le principe déjà en fonction de « myULg » trouve dans ce nouveau site un épanouissement et des fonctionnalités sans précédent. Il est très utile pour le personnel de l’université mais surtout pour les étudiants, qui bénéficieront du système le plus avancé et le plus complet en Communauté Française et parmi les plus performants d’Europe. Je sais, ça fait très « cocorico » mais c’est néanmoins la réalité. On nous reproche souvent d’être tellement modestes qu’on finit par laisser passer inaperçues nos spécificités: je romprai cette fois avec cette habitude.
Le système permet à la fois une gestion, par l’Administration et les Facultés, du parcours de chaque étudiant mais également une communication permanente entre tous les acteurs de la formation: étudiants, administration et encadrants.
En fait, myULg offre la possibilité d’une gestion de toute la “vie universitaire” de l’étudiant, de l’admission au diplôme. Hormis sa première inscription, toutes les formalités administratives peuvent se faire en self-service via le portail myULg

myULg est une « e-administration » en self-service
L’étudiant peut effectuer des formalités administratives anticipées (pré-inscriptions, admissions) et ceci est particulièrement utile pour les étudiants étrangers qui s’apprêtent à venir chez nous en séjour Erasmus.
Il peut choisir, « en ligne », des cours et des options pour l’année entière.
Il peut prendre connaissance de ses résultats à tout moment en cours d’année, choisir les examens qu’il souhaite présenter à nouveau, consulter son bulletin de notes, s’inscrire pour l’année suivante s’il a réussi ou à la seconde session s’il a échoué, effectuer le paiement en ligne via le service Ogone (VISA, online banking, …)

Fort bien, mais les étudiants utilisent-ils myULg?
En 2007, 61.317.673 pages de myULg ont été vues, soit 168.000 pages par jour. myULg a reçu 3.868.344 visites, soit 10.600 visites par jour. myULg a eu 16.232 visiteurs distincts, 5 terabytes ont été téléchargés, une énorme augmentation par rapport à l’année précédente, ce qui indique que de plus en plus de matériel y est consultable. Les étudiants adoptent le système (90% l’utilisent régulièrement), les encadrants aussi.
Et on peut rétorquer à ceux qui nous reprocheraient d’entrer résolument dans l’ère de l’électronique sans nous soucier des moyens financiers que cela implique pour l’étudiant, que 47 salles et 650 ordinateurs sont mis gracieusement à leur disposition.

Podcast et Streaming
Dans le même esprit, nous nous préparons activement à la mise en œuvre de deux technologies relativement récentes: le podcast et le streaming.
Certains cours vont pouvoir être enregistrés en audio, voire en audio & vidéo pour être ensuite diffusés aux étudiants inscrits à ces cours. Ils les trouveront sur leur myULg personnel et pourront le décharger sur leur ordinateur et éventuellement, s’ils en ont un, sur leur iPod ou autre baladeur MPEG4, ou sur baladeurs MPEG3 pour le son seul.
Plutôt qu’un incitant à l’absentéisme, il s’agit d’un véritable outil de remédiation (comme l’expérience américaine le démontre) : l’étudiant pourra revoir un passage mal compris autant de fois qu’il le souhaite, mais également des animations, des films projetés par le professeur au cours ainsi que les expériences et démonstrations effectuées au cours.
Cet outil sera entièrement automatisé et intégré aux systèmes de gestion des cours et des étudiants, sous contrôle simple par l’enseignant. Les premiers tests sont en cours actuellement et la mise en production est prévue pour 2008-2009.
Bien évidemment, cet outil sera à la disposition des enseignants qui désireront l’utiliser, mais on peut prévoir une certaine pression bottom-up de la part des étudiants…!

Contrôle anti-plagiat
Nous allons prochainement mettre en service un système de recherche de plagiat de sources disponibles sur Internet qui s’appliquera aux thèses de doctorat, aux travaux de fin d’études, aux rapports d’études, etc. Ce système sera bientôt disponible (juin 2008, après la période de test en cours) au travers de myULg pour l’ensemble des enseignants. Je me suis expliqué précédemment sur cette nécessité de plus en plus inévitable de décourager le plagiat et la fraude en général, mais aussi de veiller à prévenir ce fléau par l’éducation.

Une infrastructure d’avant-garde
L’ULg s’est dotée d’une infrastructure informatique exceptionnelle qui la place en tête des universités européennes: un backbone (ossature) en fibres optiques permettant un débit de 10 Gbps (gigabits par seconde) couvrant le Sart Tilman et le bâtiment central, des liaisons à très haute vitesse avec notre campus d’Arlon, le campus Saint Gilles de HEC-Ecole de Gestion de l’ULg, et un relais performant via Belnet avec notre partenaire de l’Académie Wallonie-Europe: la Faculté d’Agronomie de Gembloux.
Nous disposons de 20.000 points de connexion, de 800 bornes WiFi couvrant 100% des surfaces universitaires avec des doses d’émissions inférieures , même à proximité, à 1/60è des valeurs minimum recommandées par les normes européennes et belges.

Enfin, nous sommes la première université en Communauté française à avoir réalisé la transition complète de notre téléphonie sur IP il y a un an déjà, ce qui nous ouvre l’accès aux nouveaux canaux de communication : Skype, visiophonie, etc.

Ceci représente l’effort intensif de très nombreuses personnes dans les diverses administrations, AEE, ARI, ARH, ARF, ARD, Relations extérieures et, last but not least, le SEGI qui s’est réellement surpassé !
Que chacun trouve ici les remerciements qu’il mérite et un encouragement à toujours améliorer et perfectionner les services offerts par l’ULg à son personnel et à ses étudiants.

Il y a près de deux ans, j’avais exprimé tout mon malaise face à l’effet « reçu-collé » du concours organisé en fin de 1er bac en Médecine. L’expérience d’une année supplémentaire et l’approche d’une nouvelle session n’ont pas atténué ce malaise, au contraire.

Le sentiment d’injustice, voire d’absurdité, que ressentent les malheureux qui ont réussi mais qui restent sur le carreau parfois pour un dixième de point, ne fait que grandir, d’autant plus que chaque année, le nombre de bisseurs augmente et ce sont des bisseurs de qualité! L’impression, pour le nouvel arrivant, de voir ses chances diminuer de plus en plus, est décourageante, même pour ceux qui ont la vocation. En outre, l’ambiance parmi les « concurrents » que sont devenus les étudiants qui abordent l’université est détestable. Pour ceux-là, nous manquons complètement notre mission qui est de leur apprendre l’entraide, la solidarité, le travail collectif, l’échange de savoir et la collaboration. Au contraire, le système leur inculque l’inverse. A cet égard, c’est un désastre.

Si on peut se réjouir d’une formule qui est de loin préférable aux précédentes, on ne peut s’empêcher de penser qu’on n’est pas au bout de la réflexion.

Une nouvelle proposition émane aujourd’hui unanimement des Doyens des 5 institutions qui organisent les bacs en Médecine (ULB, UCL, ULg, FUNDP, UMH). Cette proposition, qui appelle l’organisation d’un examen d’entrée, a été déposée auprès du Conseil des Recteurs (CReF). C’est à ceux-ci qu’il appartiendra d’en soumettre les termes à la Ministre qui a l’Enseignement Supérieur en charge. Des fuites ont informé la presse de cette proposition, mais elles sont restées fragmentaires. Ces révélations étaient prématurées. Elles ont donc été mal comprises par tout le monde. A commencer par les associations d’étudiants, qui y ont vu une tentative ou, à tout le moins, un danger de voir se généraliser le principe de l’examen d’entrée à l’université. Ce n’est évidemment en aucun cas l’idée, ni des Doyens, ni des Recteurs. Le contingentement n’est nullement le fait des universités, qui ont pour mission d’accueillir tout ceux qui le désirent dans les orientations de leur choix.

Soyons bien clair: le contingentement est voulu par le Gouvernement fédéral. Je n’aborderai pas ici le fait, connu de chacun aujourd’hui, que le nombre maximum imposé ne reflète pas du tout la réalité des besoins en diplômés, pour me concentrer uniquement sur la méthode de sélection et sur son caractère plus ou moins supportable. Les Communautés doivent logiquement organiser les mesures qui permettent à cette limitation de devenir une réalité. Sans l’intervention des Communautés, le filtre serait appliqué lors de l’accession à la reconnaissance INAMI, donc à la fin des études… Très judicieusement, le Gouvernement communautaire a mis en place un filtre plus précoce, en fin de 1er bac. Pour rappel, ce barrage fut pendant quelques années mis en place en fin de 3è année! Il n’est donc pas saugrenu d’imaginer une sélection AVANT même l’entrée à l’université. La qualité et les modalités de cette sélection doivent encore être examinés, de même que les chances d’un examen (plutôt qu’un concours) de réaliser le contingentement. Mais tout ceci doit faire l’objet de discussions préalables avec des représentants de l’enseignement secondaire et des étudiants. En effet, il importe de comprendre exactement les buts recherchés et d’évacuer les procès d’intention erronés.

L’annonce récente dans la presse d’un « enterrement de première classe » du projet par les recteurs n’est donc pas le reflet de la réalité. Que les Recteurs souhaitent mettre toutes les chances du côté du projet en évitant de s’échouer sur les écueils les plus immédiats serait une appréciation plus correcte.

Nouveaux commentaires à propos du billet sur les méthodes d’enseignement.

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