septembre 2014


Après neuf ans, je mets un terme à ce blog. J’ai pris beaucoup de plaisir à l’écrire et il a été pour moi un excellent moyen de m’exprimer librement et, souvent, d’apporter une explication bien nécessaire à certaines prises de position ou certaines décisions difficiles. Il a aussi servi d’exutoire a plusieurs de mes colères ou de mes indignations. Il m’a rendu beaucoup de services et c’est avec un brin de nostalgie que je le quitte. J’en lance immédiatement un nouveau dont vous trouverez l’adresse ci-dessous.
Je remercie tous mes lecteurs pour leur fidélité et leur patience ainsi que pour les commentaires que certains ont mis en ligne.
Je souhaite bon vent à mon successeur et à mon université que je continuerai à servir de mon mieux.

Rendez-vous sur « Ouvertures immédiates ». Ceux qui me connaissent bien comprendront les divers intérêts (ouverture d’accès, ouverture d’esprit, ouverture focale, ouvertures musicales,…) qui me tiennent à cœur et auxquels ce nouveau titre fait allusion.

Par André Gérard

De bon matin…
…il avait pris le train.
D’abord en 2ème classe – comme tout l’monde –, il progressa bientôt vers le compartiment des premières (en belle compagnie, d’ailleurs), prit d’assaut la micheline de tête pour se retrouver un beau jour… Chef de Gare ! Mais pas une petite gare de province ou de cambrousse comme, par exemple, Chaumont-Gistoux, Hout-si-Ploût ou Tavarnelle. Non, non ! Une vraie grande gare à vocation internationale, rayonnant urbi et orbi et tutti quanti. Pas vraiment une sinécure, donc, comme nous le verrons tout-à-l’heure.

La tradition protocolaire veut que tout Chef de Gare nouvellement promu reçoive du précédant titulaire les insignes symboliques de sa charge : le képi, le sifflet et le petit drapeau. Il ne put échapper à la règle mais n’abusa ni de l’un ni des autres, ne revêtant la pompe sacerdotale qu’en de rares et précieuses occasions comme, par exemple, pour la remise du titre de Chef de Gare Honoris Causa à quelques pairs ou personnalités en marge de la voie ferrée mais très bien quand même. Sinon, il préféra la jouer soft, vu le chantier qui l’attendait…

Il avait hérité du rêve bucolique d’un lointain prédécesseur : installer les gares à la campagne ! Une grande gare à vocation universelle, c’est évidemment beaucoup de bâtiments et de matériel et pas n’importe lesquels. Faut de la place, faut du fiable, du beau, du qui en jette, du que l’on cite en exemple aux Beaux-Arts jusqu’au fin fond de la Syldavie… et la participation de vaches grasses. Mais quand celles-ci s’anémient au point de ne même plus voir passer les trains, c’est alors que le Chef de Gare doit faire preuve de conviction, d’habileté et de capacité à donner de la voix sur toutes les voies ! Fort heureusement, il disposait d’un bel organe.

Evidemment, toutes ces infrastructures ne font sens qu’en raison de celles et ceux qui les font vivre. Et c’est encore à notre Chef de Gare qu’il incombe de guider cette communauté ferroviaire de techniciens, conducteurs de locomotive, accompagnateurs, aiguilleurs – voire, de pédaleurs de fond quand l’énergie vient à manquer – mais aussi de manipuler lui-même la burette à huile. Sans oublier les passagers qui font la queue aux guichets ! Comment assurer ces derniers qu’ils recevront le juste ticket qui les mènera à bon port, ou, plus exactement, au port qui leur convient alors qu’eux-mêmes parfois n’en ont pas la moindre idée ? Et avec quels types de convoi ? Des petits tortillards de nos ancêtres ou de fougueux TGV ? Wagons-lits ou banquettes en bois ? Service à la carte ou potée pour tout le monde ? Et puis, que faire de ceux qui resteront sur le quai ? Devront-ils se résigner à prendre le 6h47 pour LLN ?
Ensuite, vocation universelle oblige, comment régler harmonieusement les différences d’écartement des voies, de hauteurs de quai ou de titres de transports entre soi et des territoires parfois lointains ?
Que dire encore de l’indispensable communication accompagnant ce bastringue ? Il ne s’agit pas seulement de veiller au bon fonctionnement des passages à niveau (ou des passerelles), des aiguillages, d’annoncer les changements de voie ou les retards mais encore de dialoguer avec ces autres grandes gares à vocation universelle, chacune – comme on le sait – s’efforçant de persévérer dans son être et toujours prête à vous tailler aimablement des croupières ?

On le voit par ces quelques exemples, notre Chef de Gare n’avait même plus le temps de taper le carton au Tultay ni de faire des courses de pots de Danone sur la Magrée.

C’est alors que, le 24 septembre 2014, notre Chef de Gare fit mine de descendre sur le quai en refilant la casquette, le sifflet et le petit drapeau à un homme de fer dans un habit de velours. Mais d’autres trains déjà lui faisaient les yeux doux…

« Que va-t-il se passer maintenant ? » se demande le lecteur haletant. « Partira-t-il vers d’autres aventures, flamberge au vent, ou prendra-t-il le temps de cueillir les pommes de son verger ? »

Sois sage, Oh bibliomane impatient, et tiens-toi bien tranquille ! Tu le découvriras bientôt en ne manquant pas notre prochain épisode et – compte tenu de l’homme – fort probablement sur ton écran.

- Tavier, le 25 septembre 2014 -