Généralités


Il y a maintenant six ans que je blogue… Avec, incontestablement une perte de régime ces derniers mois. Il est vrai que l’exercice est exigeant et que je manque de plus en plus de temps. Bien souvent, il me prend l’envie de relayer des informations ou des idées sans avoir à rédiger tout un texte. C’est pourquoi, bien que j’aie beaucoup de réserves concernant les « réseaux sociaux », je me suis lancé dans Twitter… où vous me retrouverez facilement. L’avantage de Twitter, c’est qu’on ne vous demande d’être « l’ami » de personne et que personne ne vous importune. Vous « suivez » qui vous voulez et vous êtes accompagné de « suiveurs » discrets et silencieux, qui peuvent néanmoins vous joindre par le système des messages, personnels ou publics, du réseau, et dont vous faites exactement ce que vous voulez. Depuis deux semaines donc, je diffuse des commentaires, je signale des informations qui me semblent intéressantes.

Concernant l’ULg, vous trouverez également sur Twitter: l’Université de Liège, Culture ULg, Speed Liège, Gembloux Agro Bio-Tech, Alumni droit, les Bibliothèques de l’ULg, HEC-ULg, l’Aquarium-Muséeum de l’ULg, le P’tit Torè des étudiants…
Ainsi que divers twitteurs: Quanah Zimmerman à Gembloux, Thomas Froelicher à HEC, Didier Moreau, Stéphane Grétry et Annick Comblain aux RE, Rémy Hespel à la Web TV, entre autres. Une mine d’informations à notre portée.

Je reste réfractaire à m’inscrire sur Facebook, trop intrusif à mon goût. Néanmoins, je reconnais qu’il s’agit là d’un des grands moyens de communication en pleine explosion aujourd’hui. On y trouve notamment: la page officielle de l’ULg avec près de 1.000 fans, un groupe ULg qui, avec 4.700 membres, est en fait un des plus grands groupes universitaires sur Facebook, Culture ULg, Reflexions, la WebTV de l’ULg, SPEED Liège, la candidature liégeoise pour le Centre de formation des sportifs de haut niveau (CFSHN) de la Communauté française (voir mon billet précédent ci-dessous), Gembloux Agro Bio-Tech, HEC-ULg, Réjouisciences, ULg Emploi

Bonne promenade…!

Dans la foulée du Projet pour l’ULg, plusieurs nouveautés devaient se mettre en place. Parmi elles, l’extension des procédures d’évaluation est en bonne place. Car en effet, on ne peut imaginer de mettre en place un contrôle des flux de ressources et une répartition plus juste et mieux adaptée de ceux-ci, colonne vertébrale de toute la réforme, que sur base d’une évaluation.

Évidemment, pour que cette innovation fonctionne, il faut avant tout que chacun, au sein de l’Institution, en comprenne le bien-fondé et adhère au processus. En particulier, il faut en admettre la raison d’être, la légitimité, la méthode et l’utilisation qui en sera faite.

Pour obtenir cette adhésion, les évaluateurs doivent se montrer extrêmement clairs sur ces différents aspects, tout particulièrement sur l’adéquation de la méthodologie et sur les conséquences que l’on doit en attendre.

A côté de ces évaluations qui justifient des décisions d’attribution de moyens de la part de l’Institution, il est important d’organiser des évaluations qui conduisent à des décisions de changement de la part des évalués eux-mêmes. C’est à cette deuxième catégorie qu’appartiennent les évaluations de l’agence AEQES de la CFB, qui sont assistées sur place par notre SMAQ. c’est pour cette raison que ces évaluations, appelées informatives ou formatives, portent sur les filières d’enseignement. Le seul impact de cette évaluation informative est s’instruire les acteurs de la filière eux-mêmes des forces et faiblesses de leur enseignement et d’en déterminer les éventuelles évolutions souhaitables.

Mais ce n’est pas aux filières que les moyens sont accordés, c’est aux départements via les facultés. Ceci montre bien que ces évaluation n’ont pas d’effets directs en matière d’allocation de ressources. Il peut certes y avoir un effet indirect car certaines améliorations ou renforcements souhaitables dans une filière nécessitent des moyens supplémentaires. Ceci se perçoit d’ailleurs régulièrement lors des remises de conclusions des experts de l’AEQES qui recommandent une augmentation du taux d’encadrement. L’Université étant globalement sous-encadrée, il n’y a là rien d’étonnant.

Où alloue-t-on des moyens, dans ce cas ? Aux Facultés, qui les repartissent entre les départements et, bientôt, aux centres de recherches. Cette procédure-là doit présider à un réexamen de la répartition des ressources, de manière à mieux correspondre aux besoins réels et à effectuer une répartition des ressources plus solidaire, plus juste.

Attention : solidaire ne veut pas dire juste. Solidarité n’implique pas égalitarisme. Les différences quantitatives et qualitatives existent et on doit en tenir compte. Etre solidaire, c’est ne laisser personne sur le carreau mais cela n’implique pas nécessairement de donner la même chose à tout le monde…

Il est donc important de se donner des critères objectifs avec lesquels tout le monde puisse être à peu près d’accord et qui permettent une juste distribution des moyens. Pour cela, nous avons besoin d’instruments de mesure et c’est cela que nous venons précisément de mettre progressivement en place avec l’ensemble des bases de données de l’Institution (ULIS, Penelope, SAP, Real Estate, SIRE, etc.) et avec le programme RADIUS de récolte et de traitement croisé des données. Je n’ai pas la prétention de croire que nous pourrons être justes d’emblée, mais nous nous y efforcerons et nous tendrons vers cet idéal-là, tout en assurant la solidarité entre tous.

« Comment le management gangrène les unifs ». Etonnante, la carte blanche dans la Libre Belgique par 15 universitaires — et non des moindres — (dont 5 liégeois) qui pose ainsi cette question (LLB, 5/1/11, p27). Amorce de débat légitime, en soi, mais curieusement hétéroclite dans sa rédaction, inégale et brouillonne dans son raisonnement.

En résumé, voici l’argument: deux évènements indépendants récents, la démission du recteur de l’ULB et l’échec de la fusion des quatre institutions universitaires catholiques en une UCLouvain, dénonceraient un même malaise qui s’étendrait, au delà des universités impliquées, à l’ensemble de l’enseignement universitaire belge francophone. Ce malaise serait dû à trois causes majeures: 1) l’élitisme universitaire qui freine la démocratisation des études, 2) les regroupements d’institutions qui nuisent à la formation de proximité et donc également à la démocratisation et 3) l’évaluation, miroir aux alouettes des responsables universitaires, tous fascinés par le conformisme unificateur à la bolognaise et terrorisés par la sanction des classements d’universités. Ce raisonnement un peu compliqué aboutit à une conclusion à laquelle je ne puis cependant que me rallier totalement: la loi de financement et la restructuration du paysage universitaire doivent faire l’objet d’une révision sur base d’un débat démocratique.

Ce débat a eu lieu, au sein des commissions de la Table Ronde sur l’Enseignement supérieur du printemps 2010 et, contrairement à ce qui est écrit dans l’article, ces différents aspects ont été débattus, longuement. Que rien de concret n’en soit encore sorti, c’est évidemment regrettable, mais on s’accordera à reconnaître que les conditions politiques ont été pour le moins perturbantes chez nous cette année.

Que l’Université devienne un business est certes inquiétant et doit être évité. Que ceci se passe ailleurs ne fait pas de doute. Qu’il s’agisse d’un reflet d’une pensée qui a tendance à devenir dominante est alarmant et appelle à la vigilance. Mais inférer de la mise en place de procédures d’évaluation qu’elles signent la soumission bêlante des universités au principe de la marchandisation à outrance constitue un raccourci surprenant et, pour tout dire, inacceptable.

Autant l’on peut s’accorder sur l’affirmation que « la permanence d’une mentalité élitiste et une loi de financement à enveloppe fermée placent constamment les différents établissements en situation de concurrence » (même si personnellement, je mettrais un bémol à l’élitisme car ça se discute), autant il est choquant de lire que « le pilotage des universités est guidé par une boussole omniprésente, celle qui vise la conquête de quelques places dans les classements ». Car en effet, c’est faire un bien mauvais procès aux dirigeants des universités que de réduire leur pilotage à un objectif aussi médiocre. C’est aussi totalement confondre d’une part le principe de l’évaluation et d’autre part les conséquences qu’on pourrait éventuellement risquer d’en tirer. C’est là un procès d’intention permanent qui deviendrait lassant s’il n’avait pour vertu de garder vive notre attention à ne pas laisser s’installer de dérive.

L’évaluation est un processus parfaitement légitime et naturel, trop longtemps absent du fonctionnement des universités (si ce n’est qu’il a toujours été omniprésent dans l’activité des universitaires vis-à-vis de leurs étudiants ou vis-à-vis de leurs pairs). Les conséquences de l’évaluation peuvent être diverses et le danger n’est certes pas nul de voir s’installer, comme dans certains pays, des sanctions immédiates et spectaculaires. Il suffit toutefois d’être clair sur cette question et d’éviter tout mauvais usage de l’outil qui est, lui, extrêmement salutaire et informatif pour l’évalué, s’il est bien manié.

Toutefois, le rapport avec la recherche d’une progression dans les classements est un fantasme qui revient souvent à la surface et qui me semble hors de proportion. Y attribuer le malaise qui a conduit à la démission du recteur de l’ULB en septembre dernier est complètement à côté de la question. Philippe Vincke a été très clair : sa démission était la conséquence d’un problème interne, spécifique à son institution, à savoir l’existence de plus en plus dérangeante de comportements claniques parmi les administrateurs, comportements contraires à son éthique personnelle. La démission du recteur visait à dénoncer ces pratiques et à sensibiliser la communauté universitaire à l’impasse dans laquelle ces comportements la conduisaient. Rien à voir avec un malaise général lié à l’élitisme, ni, comme ses détracteurs ont voulu le laisser entendre, en raison d’un désaccord sur le principe de l’avenir de l’académie universitaire Wallonie-Bruxelles.

Par ailleurs, l’affirmation que « la population universitaire ne compte pas aujourd’hui plus de jeunes issus de milieux populaires que par le passé » est contredite par toutes les études statistiques sur le sujet.

Il est également inexact que le regroupement de 2004 en académies était « soutenu par les autorités universitaires » et encore plus inexact qu’il reposait sur « un regroupement selon les obédiences philosophiques ». Cela semble évident, mais il s’agit là d’une constatation a posteriori. En réalité, avant même que les discussions et négociations sur le regroupement qui leur était imposé n’aient pu s’accomplir, l’Académie Louvain s’est formée entre les 4 institutions catholiques et c’est cette décision-là qui, dans son extrême rapidité, a conditionné tout le reste. Toutes les universités n’avaient donc pas « choisi de raviver le clivage philosophique qui segmente la société belge ». Il est toujours dangereux de réécrire l’Histoire.

Je partage par contre entièrement l’idée de « privilégier les formes de l’offre de formation de proximité » afin de permettre à l’enseignement universitaire de « s’adresser aux publics qui s’en trouvent encore toujours écartés ». Mais je ne puis être d’accord avec l’affirmation que, « avec le zèle de nouveaux convertis, les universités mettent en place des procédures d’évaluation des personnes et des équipes » afin de se conformer à la « nouvelle logique de l’esprit de Bologne ». C’est évidemment très réducteur et cela fait injure au discernement dont les autorités universitaires sont capables, comme si l’accession aux commandes des institutions rendait subitement stupide, en quelque sorte. Je prétends au contraire que le système d’évaluation mis en place — avec plus ou moins de bonheur, je le reconnais — vise à donner des bases plus rigoureuses (même si la vraie rigueur est, hélas, utopique) à des processus qui, jusqu’ici étaient aléatoires ou pire, injustes et éminemment subjectifs. D’autre part, la compétition pour les moyens de la recherche a toujours existé, elle était bien plus féroce lorsque j’ai commencé ma carrière qu’aujourd’hui.

Je suis donc étonné qu’une brochette d’excellents universitaires nous serve une telle macédoine de concepts, de manière aussi désordonnée et confuse. Personnellement, le malaise qu’ils dénoncent, c’est à la lecture de leur article que je le ressens, même si, en définitive et par un autre raisonnement, j’adhère à leur requête: la loi de financement en enveloppe fermée contient beaucoup des maux dont l’enseignement universitaire de la CFB est perclus. Il s’agit d’une part du financement dégressif de l’étudiant puisque le montant est fixe et que la population augmente, et d’autre part de l’effet de compétition et de son corollaire pervers, la chasse à l’étudiant. Focalisons-nous tous ensemble sur cet objectif commun et évitons de polluer le débat avec des éléments qui n’ont rien à voir et servent d’autres visées.

La semaine dernière, après le décès tragique d’un étudiant d’une haute école liégeoise à la sortie d’une nuit de libations, organisée en prélude à la célèbre Saint Nicolas des étudiants par l’Association générale des étudiants liégeois (AGEL), un groupement indépendant de l’Université et qui compte des étudiants de toutes les institutions d’enseignement supérieur (et de plus en plus, secondaire), la presse n’a pas manqué de me demander mon avis ni ce que je comptais faire. Allais-je attendre un quatrième décès pour agir ?

En dehors du fait que je n’avais strictement rien à voir avec cet événement, je rappelais que, si je suis en faveur d’un site « en dur » et « sécurisé » pour les guindailles et autres activités « folkloriques », je suis dans l’impossibilité de faire des propositions financières ou immobilières et que j’ai par contre fait des propositions d’emplacement au Sart Tilman. L’AGEL ayant rejeté cette proposition, tout reposant maintenant sur un accord de l’AGEL avec la Ville.

Alors que je donnais une interview, les étudiants commençaient à arriver en cortège sur la place du 20 Août. L’ambiance bruyante, braillarde et joyeuse, pour laquelle j’ai, d’habitude, beaucoup de tolérance et de compréhension (n’ayant manqué moi-même aucune Saint Nicolas lors de mes études, je l’avoue), m’est apparue terriblement choquante, moins de 10 heures après le drame. J’ai donc exprimé mon sentiment d’indignation face à ce que je considérais comme un festoiement déplacé à ce moment-là. Je l’ai dit spontanément et je le maintiens. La décence impose, me semble-t-il, que la mort d’un participant entraîne l’annulation des festivités.

Certes, les mauvais exemples abondent, de la mort de Senna à celle des victimes du Heysel, l’indécence s’est banalisée et va aujourd’hui jusqu’à la considération qu’il est normal qu’un groupe — vaste et hétérogène, je le concède — prolonge ce qui n’est somme toute que réjouissances et festivités malgré la gravité suprême de l’accident survenu. Les justifications entendues sont toutes édifiantes : « l’argent investi ne peut être perdu » ou « il serait dangereux de lâcher en ville une horde d’étudiants frustrés par l’annulation de la fête ». Ou encore, le plus consternant : « le défunt, on ne le connaissait même pas, personnellement ». Ces excuses sont évidemment de mauvaises excuses, qui, toutes, mettent en lumière une terrible confusion des valeurs.

A quoi rime donc la fête, si elle ne solidarise pas ?
Que devient la fête, lorsqu’elle est instrumentalisée par des intérêts financiers divers, par ailleurs externes au monde strictement étudiant, et pour lesquels seul compte la rentabilité ?
Quel est le sens de la fête si elle n’est que pur plaisir égoïste du moment ?
La valeur argent, la valeur plaisir, la valeur « tout, tout de suite », la valeur « moi d’abord » ont-elles remplacé aujourd’hui la valeur de la vie humaine et du respect de celle-ci ?

La cerise sur le gâteau fut l’intervention du monde politique, ou, plus précisément, celui des jeunes engagés politiquement, avec un extraordinaire communiqué de presse émanant des « Ecolo J – ULg », des « Etudiants démocrates humanistes (Edh) de Liège » et des « Etudiants Libéraux Liégeois (FELU) » et fustigeant l’irresponsabilité d’un recteur qui a osé blâmer les fêtards pour ce qu’il appelle de l’indécence. Et d’expliquer pourquoi la décision de continuer la fête était parfaitement décente, responsable et appropriée. A ceci s’ajoute le commentaire sur Facebook de l’incontournable Michel Peters : « L’irresponsable, aujourd’hui, c’est le Recteur de l’Université de Liège ! Il serait peut-être temps qu’il arrête de parler de ce qu’il ne connaît pas. On ne peut pas être malin en tout ! ». Curieuse déclaration d’un conseiller communal dont, évidemment, on connaît l’engagement en faveur de la guindaille et du folklore étudiant, mais dont on attendrait qu’il sache ce qu’est réellement le sens des responsabilités, de l’éthique élémentaire et du savoir-vivre.

Enfin, dans l’énorme débat qui suivit le « buzz » toute la semaine, on vit à nouveau apparaître une totale confusion. Ma déclaration portait exclusivement sur le caractère inapproprié, selon moi, de la prologation de la fête dans l’immédiate période de deuil. Je fus néanmoins rapidement accusé de vouloir combattre la guindaille et liquider le folklore étudiant. Encore une fois, je réaffirme que je ne suis pas opposé aux distractions de la vie étudiante, que j’ai salué la qualité du maintien de l’ordre et de la sécurité, tant par les forces de l’ordre, massivement mobilisées cette nuit-là, que par l’organisation elle-même. J’ai reconnu que l’accident était survenu en dehors de la durée et du périmètre de responsabilité des organisateurs ou de la police. On ne peut reprocher à une organisation tout ce qui va se passer par après. Ca ne viendrait d’ailleurs à l’esprit de personne si ces soirées n’étaient copieusement arrosées, ce qui, évidemment, augmente les risques. Je ne jetais donc la pierre à personne pour l’organisation de soirées, du cortège ou de rassemblements quelconques. Je ne rejette pas la fête. Je pense seulement qu’il y a un temps pour tout et que, parfois, les événements réclament deux comportements honorables: réserve et dignité.

Second discours prononcé lors de la Séance solennelle de Rentrée académique de l’ULg, le 22 septembre 2010

L’enseignement universitaire se démocratise.
Voici une affirmation, encore contestée par certains, qui commence à faire ses preuves. Bien sûr, il ne faut pas confondre massification — terme détestable s’il en est — et démocratisation. La première notion est purement quantitative, la seconde est plus qualitative. La première est aisément quantifiable, la seconde l’est moins car elle requiert une analyse fine et très malaisée du statut social de l’étudiant, qui ne peut se réduire à l’avertissement/extrait de rôle de ses parents, pourtant le seul critère que le respect de la vie privée nous autorise à utiliser. Des enfants de riches peuvent avoir rompu avec leurs parents, des parents riches peuvent présenter une déclaration fiscale modeste, l’effort financier consenti pour la formation des enfants par les familles peut varier énormément, même au sein des dépenses totales consacrées aux enfants, et j’en passe. Une chose est claire: le nombre d’étudiants universitaires ne cesse d’augmenter, et c’est une bonne chose. En effet, dans une Communauté comme la nôtre, tout le monde s’accorde aujourd’hui à reconnaître l’importance essentielle de la formation au plus haut niveau pour le maintien d’un dynamisme économique, voire pour engager une réelle croissance économique.
L’augmentation de l’accès à l’Université est donc une bonne chose et nous devons nous en réjouir.

Néanmoins, et ce n’est un secret pour personne, une telle affluence pose quelques problèmes qui méritent toute notre attention.
La première difficulté est tout simplement logistique. Lorsqu’on reçoit plus d’étudiants que les auditoriums ne peuvent en contenir, on se trouve confronté à un problème logistique. Mais tous les problèmes techniques ont leur solution, nous pouvons temporairement les résoudre, et rapidement.

Toutefois, cet aspect purement logistique ne doit pas en masquer un autre, celui qu’impose une loi implacable, la Loi de l’encombrement, qui dit que « plus il y a d’étudiants au cours, moins le cours est efficace ».

Il n’y a donc que deux solutions à ce problème: restreindre l’entrée par un moyen quelconque ou fractionner les grandes sections et multiplier les sous-groupes. La première mesure — un concours ou un examen — comme cela se fait dans tous les pays et communautés qui nous entourent, est impopulaire, contraire aux engagements politiques annoncés et relativement inégalitaire en raison des diversités d’options dans l’enseignement secondaire. La seconde, qui implique de multiplier les encadrants, bien entendu, coûte cher et dépasse les moyens actuels des universités.
Je ne plaiderai pas pour la première — dussé-je déplaire aux doyens des facultés de Médecine qui sont confrontés avec une réalité inextricable et qui ont toute ma sympathie — mais plutôt pour la seconde. Evidemment, dans ce cas, le support financier doit bien provenir du pouvoir subsidiant et je ne suis pas naïf au point d’ignorer que les budgets de la Communauté ne sont pas disponibles aussi simplement que cela. C’est néanmoins, me semble-t-il, la voie que nous devons suivre, dans un effort commun de l’ensemble des universités et du gouvernement.

Je lance donc aujourd’hui l’appel du 22 septembre, un appel qui devrait mobiliser toutes les forces universitaires unies, les responsables politiques ainsi que le monde économique et social, pour la mise sur pied d’un effort collectif de grande envergure visant à refinancer substantiellement l’enseignement universitaire. Un tel refinancement, à propos duquel nous devrions rapidement nous réunir et que nous devons évaluer au plus juste, devrait permettre d’affronter les réalités de notre temps dès la rentrée académique de 2011. Cette année, les universités vont faire avec ce qu’elles ont. Elles vont puiser dans leurs dernières ressources et sacrifier diverses initiatives pourtant bien utiles afin d’assurer la qualité de leur enseignement. Des mesures sont déjà prises, comme le dédoublement des classes, grâce au dévouement des professeurs qui vont donner deux fois leurs enseignement en sacrifiant leurs missions de recherche et de service à la société et je les en remercie très sincèrement. Toutefois ces mesures restent des emplâtres sur des jambes de bois et ne peuvent résoudre que très partiellement le problème. Il nous faut imaginer pour l’avenir des solutions pédagogiquement acceptables et, je le souhaite, profiter de cette difficulté pour accomplir de vrais progrès pédagogiques, en un mot, pour rebondir. Ils nécessiteront des investissements considérables, mais la Communauté tout entière en retirera collectivement les fruits.
J’ai suffisamment dit que j’étais adversaire du principe des classements d’universités puisqu’on y compare des choses non-comparables. Toutefois je constate que, face aux universités du monde entier, c’est essentiellement le critère du taux d’encadrement qui handicape les nôtres.

Il n’est en effet pas tenable d’enjoindre aux universités d’accueillir tout le monde sans aucune forme de sélection et, en même temps, de maintenir fermée l’enveloppe de financement. Quand, en outre, on exige d’elles qu’elles améliorent le taux de réussite, on a atteint le sommet de l’absurde.

Certes, ces objectifs d’ouverture et de réussite sont louables, mais ils ne sont pas gratuits. Les atteindre coûte cher. Dans le carcan financier qui nous est imposé aujourd’hui, c’est «mission impossible».

Venons-en à la sélection. Quels objectifs sert-elle? Essentiellement celui qui consiste à réduire «l’effet de balast» que constituent les étudiants mal orientés ou insuffisamment préparés. La sélection vise à leur épargner l’expérience négative et frustrante de l’échec après une année d’errance plus ou moins consciente. Elle vise aussi, soyons clair, à limiter l’interférence avec ceux qui sont bien à leur place et qui pâtissent de la fameuse «loi de l’encombrement». Pour les opposants à la sélection, ceux qui sont à leur place sont précisément les nantis. Il est plus que temps que la démocratisation de l’accès à l’université se voit attribuer une définition claire. Pour moi, comme pour tout le monde, j’imagine, on peut être d’accord sur celle-ci: c’est la possibilité pour chacun, pour autant qu’il ou elle en ait les capacités, de faire des études universitaires, quel que soit son statut social et financier. C’est le « pour autant qu’il ou elle en ait les capacités» qui est généralement escamoté et qui impose une évaluation. Ce n’est pas parce que des injustices sociales marquent le parcours pré-universitaire des élèves que le diagnostic sur leur état de préparation doit être tabou.

J’ai dit que je ne plaidais pas en faveur d’un tri par concours, le système est déplaisant et, somme toute, injuste quoi qu’on fasse. Dans une certaine mesure, j’accepte de ne pas plaider non plus pour un examen d’entrée, pourtant un moyen simple, efficace et logique de sélectionner. Si on analyse les résultats du 1er Bac en Sciences appliquées, [on constate que 58% des nouveaux entrants réussissent à la fin de l’année alors que ce chiffre tourne autour de 37% pour l’ensemble des facultés.

Au moins alors pourrait-on plaider pour un simple test, destiné à l’étudiant lui-même et qui lui donne, à lui seul, une information, non contraignante, sur l’état de sa préparation à aborder les études qu’il a choisies. Un tel test, pour être réellement informatif et significatif, nécessite un énorme chantier de réflexion, mais s’il est bien un endroit où l’on peut élaborer un tel travail de façon parfaitement professionnelle, c’est à l’Université. J’ai du mal à croire qu’un étudiant averti de ses faiblesses ne soit pas tenté par une opportunité de se préparer spécifiquement. Evidemment, ceci implique la mise en place d’une année ou, selon certaines variantes, d’un semestre, de «remédiation» efficace, donc un coût additionnel non négligeable. Et en outre, ceci nécessite une décision quant à qui, du secondaire ou du supérieur, l’organise — les deux ensemble peut-être — et quant à la manière de ne pas introduire de biais en fonction des universités. Je plaide donc pour la mise en place, dès que possible, d’un test de compétence strictement informatif laissant à l’étudiant la responsabilité de la prise de décision qui en découle. Je plaide en même temps pour une réflexion sur les conditions de sa mise en place — quand, comment, par qui? — et pour la création d’une «remédiation» efficace, juste et équilibrée.

Voila pour le volet du mode de sélection. Maintenant, examinons le volet de l’ouverture universelle. Tout d’abord par rapport aux étrangers. Toutes nos universités sont heureuses d’accueillir des étudiants étrangers. Vous aurez remarqué qu’elles en sont fières et qu’elles ne manquent pas de s’en flatter. Croire que nous sommes mécontents d’un afflux excessif d’étudiants étrangers refoulés par les «numerus clausus» de plus en plus généralisés qui s’instaurent dans leur pays, serait une erreur. Au contraire, nous en sommes ravis. La seule chose qui nous préoccupe, c’est la pléthore par rapport à nos moyens d’encadrement, d’hébergement et d’instrumentation et, une fois de plus, à l’enveloppe fermée qui nous subventionne. Plus le nombre d’étudiants augmente, plus l’enveloppe est étriquée et plus le financement par étudiant diminue, c’est simple à comprendre. Les montants originellement fixés correspondaient pourtant à l’évaluation du coût réel de formation d’un étudiant universitaire. Ce coût aurait-il diminué…?
Il me semble que cela doit être, par contre, un souci pour la Communauté française qui doit certainement se préoccuper du fait qu’elle subventionne de grandes quantités d’étudiants dont la majorité n’exerceront pas le fruit de leur coûteuse formation chez nous. Notre bonne Communauté française Wallonie-Bruxelles, dernier bastion de l’entrée libre, face à la mise en place des concours chez ses voisins et singulièrement chez son voisin francophone principal, me semble devenue une sorte de zone de compétence universelle en matière d’enseignement supérieur.

Si l’afflux d’étudiants étrangers, refoulés par les concours mais cependant bien préparés par au moins une année spécialisée, fait significativement monter le taux de réussite de nos institutions, l’ouverture universelle a eu ses effets pervers. L’initiative de l’entrée libre à l’Université pour les élèves sortant de l’enseignement technique, artistique et professionnel, certes une très généreuse idée pour certaines de leurs orientations dites «de transition» où le niveau de réussite est relativement bon, s’avère cependant désastreuse, avec 6% de réussite pour les autres orientations, soit 6 fois moins que la moyenne générale (qu’ils contribuent à faire descendre). Il est vrai qu’on ne peut que se réjouir pour ces 6% là, qui n’auraient pas accédé à l’Université sans cela. Mais quel gâchis! Est-il raisonnable, et même décent, humainement acceptable, de faire croire ainsi à ces jeunes gens que tout est possible, sans mieux les avertir du niveau qui est le leur et de celui qui est exigé ? Et si on leur laisse leurs chances, ne doit-on pas formellement les avertir ?

Nous sommes aujourd’hui dans la situation de maîtres-nageurs au bord d’un fleuve, responsables de la sécurité de milliers d’enfants attirés par une récompense alléchante sur l’autre rive. Ces maîtres-nageurs savent que 63% de ces enfants (94% pour la catégorie que je viens d’évoquer) seront emportés par le courant simplement parce qu’ils ne savent pas ou pas suffisamment bien nager. Ces maîtres nageurs vous diront ceci: «Nous ne pouvons cautionner ce désastre. Imposons un test de capacité de natation, au calme et loin du danger. Envoyons ceux qui en ont besoin apprendre à nager dans de bonnes conditions. Et laissons ceux qui en ont les capacités et la robustesse traverser le fleuve en minimisant pour eux les embûches, en les accompagnant nous-mêmes et en veillant sur eux.» Ca demande plus de maîtres-nageurs, c’est vrai, et compétents. Beaucoup plus. Et cela coûte plus cher. Beaucoup plus cher. Mais en définitive, n’aurons nous pas bien plus de succès, en nombre de jeunes arrivant sains et saufs sur l’autre rive plutôt qu’en laissant le torrent faire son œuvre et charrier au loin une majorité d’entre eux, s’accrochant aux autres et diminuant les chances de ceux-ci de s’en sortir ?

Voilà, Mesdames et Messieurs, l’état de mes réflexions sur cette question lancinante, devenue aujourd’hui une préoccupation d’urgence, pour toutes les universités, face à l’augmentation du nombre de nouveaux étudiants mais aussi et surtout face au taux important des échecs, malgré les efforts innombrables que nous faisons pour accompagner nos étudiants, efforts dont la liste serait beaucoup trop longue pour que je l’énumère ici. J’en profite pour donner un coup de chapeau à toutes les personnes qui s’y consacrent avec dévouement.
C’est pourquoi je confirme le lancement de cet Appel du 22 septembre pour une prise de conscience citoyenne majeure amenant à un refinancement massif des universités de la CFWB. J’ai conscience du fait que ce refinancement devra être évalué à son juste coût et qu’il ne pourra s’envisager qu’après une réflexion approfondie des diverses questions qui se posent, conjointement avec le gouvernement. Mais j’ai la conviction absolue qu’il n’existe aucune autre issue et qu’il faut qu’on cesse de croire qu’on peut continuer à faire plus (augmenter l’accès, ouvrir au monde entier, augmenter le taux de réussite, augmenter la qualité de la formation) avec moins (laisser diminuer l’allocation par étudiant).
Je suis convaincu que mes collègues recteurs ici présents, de même que l’ensemble de la communauté universitaire francophone belge, et, sans doute, tous les citoyens soucieux du bien public, partageront mon analyse. Je peux témoigner que tous ressentent intimement cette nécessité. Je souhaite que le monde politique s’en fasse le relais, ainsi que le monde économique et social.

Pour un enseignement supérieur de l’excellence et de la compétence, utile au bien-être et au bien-vivre de nos concitoyens, je forme le vœu de pouvoir revenir en ce même endroit dans un an, vous annoncer que la synergie de tous les acteurs impliqués dans cet appel ou interpellés par lui, sera mise en place.

Premier discours prononcé lors de la Séance solennelle de Rentrée académique de l’ULg, le 22 septembre 2010

Je voudrais commencer par remercier notre nouveau Maître de Cérémonie, le Professeur Jean-Jacques Claustriaux, Vice-recteur Honoraire de la Faculté des Sciences agronomiques de Gembloux, pour avoir accepté de prendre la relève de notre collègue de Professeur Robert Laffineur, aujourd’hui admis à la retraite. Je remercie également notre nouveau secrétaire académique le Professeur Bernard Jurion qui succède au professeur Luc Angenot.
Je remercie d’emblée Jacques Stotzem d’avoir accepté de nous accompagner tout au long de cet après-midi. Guitariste verviétois, autodidacte de talent, Jacques Stotzem est un orchestre à lui seul. Sa collaboratrice, Anne-Françoise Biet, le qualifie de «guitariste inclassable, bousculant les règles de la musique avec un naturel désarmant et redessinant avec son âme les frontières du « fingerpicking ». Il flirte avec le blues, le folk, le jazz, le rock ou encore des sonorités qui invitent aux voyages et rappellent les contrées asiatiques lointaines où régulièrement il se rend». On dit de lui que sa musique évoque l’image, que sa musique est une image ! Qui aurait, dès lors, mieux que lui, accompagné nos invités aujourd’hui ?

Cette année, nous saluerons d’emblée la présence des personnalités qui recevront dans quelques instants les Insignes de Docteur Honoris Causa de notre Insitution: Agnès VARDA, William KLEIN, Santiago CALATRAVA et Victor BURGIN. Malheureusement, pour des raisons impérieuses de santé ou d’agenda, Pierre ALECHINSKY, Jacques PERRIN et Bill VIOLA n’ont pu nous rejoindre aujourd’hui. Ils nous ont cependant fait le plaisir de nous promettre de venir à l’Université de Liège au cours de cette année académique. Aujourd’hui, ils seront représentés respectivement par Michel DRAGUET, Directeur du Musée des Beaux-Arts et professeur à l’Université Libre de Bruxelles, Monsieur le Consul Général de France Zaïr KEDADOUCHE et Monsieur Robert STEPHANE, chargé de cours honoraire de l’ULg que nous connaissons tous comme brillant journaliste, Directeur honoraire de la RTBf, passionné de vidéographie et ami de Bill Viola.

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,

Il est des moments, dans la vie, où la fonction qu’on exerce vous apporte des bonheurs insoupçonnés. J’ai aujourd’hui cette chance et je me suis empressé de la saisir. Depuis ma plus tendre adolescence, j’ai nourri pour l’image une véritable passion. Arrière petit-fils d’un pionnier de la photographie, fils de peintre et père de vidéaste, c’est donc bien d’une fibre familiale qu’il s’agit, même si, à chaque génération, nous avons su modestement reconnaître nos limites et même si, pour ce qui me concerne, le talent est bien plus imperceptible que celui des trois autres.
Néanmoins, cette passion, que j’ai pu discrètement infiltrer dans ma vie de chercheur et d’enseignant, m’a fait connaître — par œuvre interposé — et m’a fait admirer des personnalités nombreuses et variées.

Aujourd’hui, c’est donc à d’illustres représentants des arts de l’image que sont réservés les honneurs académiques et c’est un vieux rêve, vaguement conscient, qui s’accomplit pour moi. J’espère que vous partagez mon plaisir.
Les personnalités que nous honorons ce jour ne sont pas seulement des maîtres incontestés de leur art, mais en outre — et c’est bien là le premier fil rouge qui relie nos invités — ils ont ajouté d’autres cordes à leur arc et se sont également distingués dans des arts connexes, voire différents. C’est ce que j’appelle «le supplément de génie».
Il existe aussi un second fil rouge, moins visible sans doute, et moins complet, qui sont les liens qui se sont tissés entre plusieurs de nos invités au fil de leur existence, ainsi que l’admiration qu’ils se portent mutuellement. Vous devriez percevoir ces liens dans les séquences de présentation.
Aussi, aujourd’hui n’est-ce pas un échantillonnage de célébrités au hasard qui est devant vous, mais une logique les relie.

Le thème de l’image me tenait à cœur, vous l’avez compris, mais il n’est pas fortuit. Il correspond à une préoccupation importante dans le monde entier et tout particulièrement ici, où les technologies de l’image se développent dans l’excellence, dans notre université, chez nos ingénieurs, chez nos médecins, chez les deux ensemble, mais aussi dans le département de communication, chez nos philosophes, chez les chercheurs et les enseignants de toutes nos facultés. J’ai le plaisir, à cette occasion, de vous annoncer le lancement, à la fin de cette année 2010, d’un nouveau media de communication de notre Institution qui diffusera des séquences audiovisuelle d’information sur l’enseignement, la recherche et les diverses activités et spécificités de l’Université, en un mot, la WebTV-ULg. On retrouve cette excellence dans notre région, où les entreprises impliquées dans le développement de l’image fixe ou animée, télévisuelle ou cinématographique, se développent avec le succès que l’on sait. De nombreuses activités telles que le festival ImagéSanté ou le festival 3D, dans lesquels l’Université et le CHU sont partie prenante, donnent à Liège une connotation de «pôle de l’image». Le thème de cette rentrée est donc aussi un constat et le soutien des gouvernements, tant régional que communautaire, à toutes ces initiatives n’est pas étranger à leur succès.

Mais le thème de l’image, dans une université, c’est aussi celui d’une certaine précaution, d’une vigilance par rapport à son aspect trompeur, à la manipulation qu’on peut en faire. Car si l’image est au centre de notre civilisation aujourd’hui, sa déformation ou, plus exactement, la désinformation qu’elle peut apporter, volontairement ou non, doivent demeurer au cœur de nos préoccupations. Car l’image n’est pas que belle ou laide. Elle peut aussi véhiculer des messages et des idées. Elles peut inciter à l’action par symbolisme ou par provocation. Et c’est là que la méthode et l’expérience doivent intervenir pour nous protéger de ces effets pervers. C’est un des objectifs d’une formation universitaire bien comprise, qui laisse à l’émotion son champ d’action, mais qui limite rationnellement ses effets délétères.

L’image, c’est le reflet de la réalité. A nous d’apprendre à mesurer le degré de fidélité de ce reflet. L’image, c’est aussi le rêve, la fantaisie, l’imaginaire. Elle peut donc être tout et son contraire. Le rôle de l’Université aujourd’hui, est de l’utiliser au mieux à des buts scientifiques sans se fermer aux aspects artistiques, à l’onirisme et à la fantaisie. L’image est aujourd’hui omniprésente, rendons hommage, à travers elle, à celles et ceux qui ont su en faire une si bel usage.

Le Conseil d’Administration d’avril 2010 a décidé d’imposer un test de français à tous les étudiants entrant à l’ULg, à effectuer lors du premier quadrimestre. Ce test existe depuis le milieu des années ’90, comme service aux étudiants. Il leur permet d’évaluer leur connaissance du français dès l’entrée à l’Université et, en cas de défaillance, de bénéficier d’une remédiation. C’est donc bien un service et nullement un contrôle. Il n’est communiqué qu’à l’intéressé et n’a aucune incidence sur des évaluations ultérieures, quelles qu’elles soient.

La nouveauté est aujourd’hui que le test devient désormais obligatoire et qu’il sera accessible en ligne. Le caractère obligatoire, tout en préservant la discrétion, sera appliqué par une procédure simple: le test sera mis à disposition de l’étudiant sur son « MyULg »; tant qu’il n’y aura pas répondu ou qu’il n’aura pas signifié par un simple « clic » qu’il ne souhaite pas passer le test — geste on ne peut plus simple —, celui-ci restera disponible et cette non-participation restera visible dans son dossier. Dans ce cas, une sanction devra être appliquée, non pas pour non-réussite du test, mais pour non-passage du test. Ceci ne semble pas excessif! Par contre, l’étudiant qui, informé de ses lacunes, juge qu’il pourrait bénéficier d’une remédiation, pourra la demander et elle sera organisée pour lui.

Cette initiative n’a pas manqué de susciter des remarques.
• Les premières concernent l’accessibilité d’un tel test pour d’autres étudiants, ceux des années supérieures et surtout les étudiants étrangers. Il est clair qu’ils pourront tous le passer, mais qu’il ne sera obligatoire que pour les « premiers bacs ».
• Les deuxièmes portent, assez classiquement, sur notre capacité de prendre en charge la remédiation. Comme d’habitude, je remercie les inquiets pour leur sollicitude, mais il est vrai que nous n’avons pas l’habitude de négliger la prévision des moyens de notre politique…
• Enfin, le troisième souci est celui de voir s’installer un test obligatoire qui ne serait que la préfiguration d’un examen d’entrée. Il me paraît pourtant bien clair que ceci n’a rien à voir et je peux le garantir, au cas où quelqu’un pourrait trouver une relation entre les deux.

Retenons simplement que ce test
1. est conçu en faveur des étudiants, afin de leur permettre déviter des échecs liés à la mauvaise compréhension des cours, des nuances qui s’y trouvent et dont l’importance peut être capitale, et même de l’énoncé des questions d’examen;
2. constitue une charge supplémentaire pour l’Institution;
3. est gratuit pour l’étudiant;
4. n’entraîne aucune conséquence sauf celles que l’étudiant décidera de mettre en œuvre et n’est pas communiqué aux corps encadrant;
5. ouvrira la voie d’une remédiation également gratuite pour l’étudiant, mais coûteuse pour l’Université.

C’est un beau projet, techniquement difficile et qui demandera beaucoup d’efforts à de nombreuses personnes, tant pour sa préparation que pour son fonctionnement, ainsi que pour la remédiation à organiser. Je les remercie tous dès à présent. Et j’espère que les étudiants comprendront bien que ce test n’est pas dangereux, qu’il est purement informatif et qu’il est fait pour eux.

Etrange, le calme des cieux ce week end… Fameuse tuile pour les collègues qui devaient se rendre à des réunions scientifiques un peu éloignées. Tuile plus grande encore pour ceux qui étaient partis et doivent rentrer au bercail, obligés de prolonger quelque peu leur séjour, ce qui peut paraître amusant à première vue, mais qui ne l’est quasi jamais en réalité. C’est aussi l’aventure qui arrive à 70 étudiants de notre faculté de Gembloux AgroBioTech et à deux de leurs professeurs, bloqués ainsi après un stage au Maroc. Ils sont, me dit-on, confortablement logés dans un hôtel de Casablanca et ils vont tous bien. On n’attend pas leur retour avant lundi, au plus tôt…

Il est bien rare qu’un bouleversement de cette ampleur ne puisse être attribué à aucun responsable, politique, industriel ou spéculateur financier. Comment donc en vouloir à ce brave Eyjafjöll qui, dans le fond, ne fait que son métier millénaire de volcan.

Par contre, c’est une aubaine pour le calme de la campagne et le charme d’une journée ensoleillée de printemps, même pas assombrie par un nuage que l’oeil nu ne peut déceler. Prenez donc des photos, il pourrait s’écouler de nombreuses décennies avant qu’on ne revoie un ciel impeccablement bleu, sans la moindre trace d’un sillage aérien !

Il y a une quinzaine de jours, The Economist publiait un article posant la question de savoir si la crise financière devait avoir un impact sur l’éducation et la formation, en d’autres termes, si les pouvoirs publics devaient réduire les allocations en conséquence pour boucler leur budget ou si, au contraire, l’effort demandé ne devait pas plutôt porter sur tout le reste, en immunisant l’enseignement, sur la base du fait qu’il s’agit d’un domaine crucial et indispensable au redéveloppement…
Et de constater la réponse du gouvernement britannique qui, alors que pour faire face à la crise, les études doivent être allongées et diversifiées, annonce une réduction du financement des universités de près de 700 millions d’€.
En Californie, le gouverneur Arnold Schwarzenegger a décidé de réduire de 20% les subventions de l’Etat à l’Université de Californie, une des rares universités d’Etat américaines de grande réputation (UCSF, UCLA, UCSD, etc) répartie sur 11 campus. Une catastrophe pour ces universités prestigieuses qui tirent néanmoins la majeure partie de leur financement de ressources externes et du minerval des étudiants (celui-ci devrait, en raison de ces coupes claires, dépasser bientôt les 10.000$…)

Une des chances de l’Europe serait de ne pas suivre ces exemples consternants et, au contraire, de se serrer encore plus la ceinture afin de garantir un développement accru de l’enseignement de base, de la formation continue et de la recherche (en France, c’est bien là le pari de la rentabilité à terme de l’emprunt public dont les universités devraient être les pricipaux bénéficiaires), pour autant qu’on veuille bien admettre que ces valeurs sont incontournables dans le cadre d’un redéploiement économique, quel que soit, d’ailleurs, le modèle économique qu’on choisisse.

La catastrophe de Liège, l’explosion de la rue Léopold, dont le bilan final ne peut encore être établi, a fait de nombreuses victimes, dont 12 mortelles à ce jour. Elle a fauché en pleine jeunesse plusieurs jeunes diplômés de notre institution. Pierre Guilliams était un de nos chercheurs en Géographie depuis deux ans et accomplissait actuellement un Master en Gestion en horaire décalé. Il allait avoir 26 ans dans un mois. Les témoignages sur lui, qui affluent en grand nombre, sont tous formidablement élogieux. Notre institution a ainsi perdu un élément sympathique, dynamique et prometteur.
Sa ville natale, Hannut, a été durement frappée dans cette catastrophe, puisqu’elle y a perdu quatre jeunes du même âge, comme la compagne de Pierre, Charlotte François, une romaniste dont tout le monde se souvient dans le département de Philologie romane et devenue professeur dans l’enseignement secondaire. La cérémonie organisée devant l’hôtel de ville de Hannut, à laquelle j’ai assisté aujourd’hui en présence de nombreuses autorités et d’une foule énorme, était empreinte d’émotion, bien sûr, mais aussi d’une grande dignité. Les funérailles de Pierre et de Charlotte auront lieu lundi (13h30 à l’Administration communale; 14 heures en l’église Saint-Christophe de Hannut).

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