juillet 2007


Etrange, cet enthousiasme francolâtre des liégeois qui se cristallise le 14 juillet par l’ampleur des réjouissances républicaines… Et cependant sympathique en diable.

Les liégeois ne s’en rendent pas toujours compte, mais vus par les non-liégeois, ils sont « principautaires » avant tout. Et pourtant, la principauté de Liège, c’était bien plus que l’actuelle province, bien plus que la région liégeoise.
Pourquoi, alors une fête de la République française emporte-t-elle un tel succès? Faut-il y voir un profond sentiment « rattachiste »? Pas si on interroge les gens en général.
Peut-être est-ce une occasion de manifester qu’une « autre » fête peut supplanter notre fête nationale… Qui, ayant lieu le 21 juillet, juste une semaine plus tard, supporte mal la comparaison.

Mais alors, pourquoi ne pas trouver une occasion plus spécifiquement liégeoise?
Le 14 avril, date de l’avènement de Notger, le premier Prince-évêque, en 972? Il donna à Liège sa première grandeur et en fit un centre de premier plan en matière d’enseignement dans le Saint Empire germanique.
Le 6 janvier, pour célébrer la date putative de la fondation d’une Liège indépendante, en 980?
Le 9 avril, pour l’application de la charte d’Albert de Cuyck en 1230?
Le 6 juin pour la « Lettre des Vingt-deux » et le triomphe de la démocratie, en 1343, ou le 1er juillet et la « Lettre de Saint Jacques », qui confirme la précédente, la même année?
Le 27 octobre pour les infortunés 600 franchimontois? Mais ils ne donnèrent lieu qu’au sac de Liège en 1468, dont on dit que l’incendie dura 7 semaines, et à l’exil du Perron à Bruges.
Le 2 mai pour le sacre d’Erard de la Marck? Pacificateur et grand bâtisseur, on lui doit notamment le Palais des Prince-évêques, même s’il n’en vit pas l’achèvement.
Certainement pas le 1er octobre, date de l’annexion de Liège par la Première République française en 1795, qui mit fin à 800 ans de Principauté et qui aurait dû inspirer aux liégeois une haine coriace de la France!
Pourquoi donc le 14 juillet, qui n’eut aucun impact sur Liège, si ce n’est l’avènement d’un régime qui mit fin à la fierté séculaire des liégeois 6 ans plus tard?

Non. Décidément, les liégeois sont différents, souvent sans s’en apercevoir, ils paraissent parfois incohérents ou incompréhensibles, ils restent attachés à une tradition d’indépendance millénaire même si celle-ci fut perdue il y a plus de 200 ans, mais ils sont assez particuliers, même dans les festivités qu’ils célèbrent, pour que les autres wallons le ressentent profondément, à juste titre ou non…

Qui sont-ils vraiment? Et qui veulent-ils être?

L’Internet va décidément révolutionner la Recherche. C’est d’ailleurs exactement pour cela qu’il a été inventé, même si les autres applications plus profanes en ont fait l’outil universel qu’il est rapidement devenu!

Les blogs ont permis une expression large et libre, nullement intrusive et facilement accessible. Ils permettent même aux recteurs d’universités de s’exprimer!
Les sites de photos, puis maintenant de vidéos ouvrent également des horizons sans limites.

A voir, l’expérience timide mais intéressante lancée par un de nos collègues de l’UCL: la description d’une recherche en vidéo.
Mais bien sur, on va bientôt aller beaucoup plus loin. On peut imaginer la mise en vidéo des expériences elles-mêmes, de la réflexion scientifique, de l’élaboration des protocoles de travail, bref, un véritable suivi de l’aventure scientifique et une manière plus directe, plus « crue » de communiquer le cheminement intellectuel et pratique de la Recherche. Des blogs apparaissent déjà au sein des réseaux de chercheurs et dans le domaine de la vulgarisation.

On n’ose imaginer les perspectives de communication scientifique qu’apporte un tel outil, le contact infiniment plus proche avec le chercheur et son travail, le dialogue et la confrontation des résultats en temps réel, la visualisation par tous de l’expérimentation même, avant la lecture de la relation aseptisée qu’en fait la publication au sens classique du terme: l’article sur papier.
Au moment où on se lance dans le podcasting pour les enseignements — l’expérience est tentée à l’ULg et va se développer considérablement — pourquoi pas en Recherche également? La publication de podcasts et de videocasts par le Museum of Science de Boston en donne déjà un parfum intéressant, de même que le vidéogramme sur l’évolution de l’American Association for the Advancement of Science.

Le rôle du site web « REFLEXIONS » de l’ULg sera proche de celui-là. Il mettra les chercheurs et leur recherche en évidence et contiendra des démonstrations filmées bien plus informatives, dans certains domaines, que l’information « papier » qui, même assortie de photos ou de schémas, reste incomplète à l’heure de la vidéo.

Mais à côté de ces magazines « policés » de synthèse, on verra aussi se développer des « griffonnages » en vidéo, des billets filmés que pourront diffuser les chercheurs pour partager entre eux les « trucs » de laboratoire ou la progression de leurs travaux et ainsi inventer une toute nouvelle forme de communication en matière de recherche.

Toutes ces approches nouvelles vont secouer sérieusement le monde des chercheurs. On objectera que le peer reviewing doit rester présent et on aura raison, on regrettera les facteurs d’impact et on aura tort. Mais quoi qu’il en soit, qu’on aime ou non, qu’on soit aventureux ou nostalgique, on n’aura bientôt d’autre choix que celui de s’adapter aux nouveaux moyens de communication, sous peine de s’enterrer dans un immobilisme poussiéreux et obsolète et de perdre pied dans la déferlante médiatique.

Préparons-nous au changement. Vite.

26 lauréats américains du Prix Nobel écrivent une lettre ouverte au Sénat des Etats-Unis en faveur de l’Open Access.

Il s’agit de: Peter Agre, Chimie, 2003; Sidney Altman, Chimie, 1989; Paul Berg, Chimie, 1980; Michael Bishop, Médecine, 1989; Baruch Blumberg, Médecine, 1976; Gunter Blobel, Médecine, 1999; Paul Boyer, Chimie, 1997; Sydney Brenner, Médecine, 2002; Johann Deisenhofer, Chimie, 1988; Edmond Fischer, Médecine, 1992; Paul Greengard, Médecine, 2000; Leland Hartwell, Médecine, 2001; Robert Horvitz, Médecine, 2002; Eric Kandel, Médecine, 2000; Arthur Kornberg, Médecine, 1959; Harold Kroto, Chimie, 1996; Roderick MacKinnon, Chimie, 2003; Kary Mullis, Chimie, 1993; Ferid Murad, Médecine, 1998; Joseph Murray, Médecine, 1990; Marshall Nirenberg, Médecine, 1968; Stanley Prusiner, Médecine, 1997; Richard Roberts, Médecine, 1993; Hamilton Smith, Médecine, 1978; Harold Varmus, Médecine, 1989 et James Watson, Médecine, 1962.

Ils constatent qu’aujourd’hui, lorsqu’on recherche sur l’Internet les possibilités de traitement du cancer du sein, par exemple, on en trouve beaucoup, mais pas ceux qui sont déduits des recherches de qualité revues par des pairs car celles-ci demeurent inaccessibles sauf à en payer le prix fort.

Ils demandent que les résultats des recherches financées par les NIH (National Institutes of Health) puissent être librement accessibles pour qu’on puisse en tirer le fruit, voire les prolonger et ainsi leur donner le maximum d’impact afin de faire profiter au mieux la collectivité de son investissement dans la science pour le bien public. L’attitude des NIH en cette matière est d’encourager le dépôt institutionnel dans leur digithèque, PubMed Central. Les signataires de cet appel demandent que les NIH passent à une politique de dépôt obligatoire, seul moyen d’atteindre le résultat espéré.

Happy birthday, Mr PPt !

Voici déjà 20 ans que PowerPoint a envahi le monde de la recherche et de l’enseignement.
Beaucoup l’ont dit et plus encore le disent aujourd’hui: les présentations illustrées par ce mode de projection peuvent être la meilleure et la pire des choses.

En réalité, le logiciel n’y est pour rien. Même si son homologue plus jeune chez Apple, Keynote, est considérablement plus performant et plus convivial, PowerPoint a le mérite d’avoir été le premier à se développer — PowerPoint 1.0, par Robert Gaskins en 1987 pour Apple Macintosh, ça se reconnaît ;-) — et, après son acquisition par Microsoft la même année pour 14 millions de dollars, il est devenu rapidement le standard indétrônable pour les présentations illustrées. Et il renferme suffisamment de caractéristiques utiles pour remplir son rôle d’aide aux présentations.

Non, le logiciel n’y est pour rien. La faute est à l’utilisateur qui, trop souvent, s’en sert en dépit du bon sens, noyant l’auditeur sous une pléthore de textes ou projetant des textes différents de son discours, ou encore les deux à la fois!
PowerPoint a été pensé en tant qu’appui, remplaçant les bonnes vieilles diapositives, tant pour les images que pour le texte. Les dérapages datent donc déjà de cette époque-là. La facilité et la quasi-instantanéité de l’informatique n’ont fait qu’amplifier les choses. On peut même changer ses présentations juste avant de commencer, voire même pendant l’exposé!
Le maître-mot, en matière de communication scientifique ou d’enseignement, est la sobriété. Les projections visent à illustrer le propos par des images, schémas, photos ou même films, depuis que les mémoires des ordinateurs portables le permettent. Elles ne doivent pas trop servir d’aide-mémoire à l’orateur et encore moins être constituées de textes à lire in extenso.

Les écueils ont été souvent décrits (1, 2, 3, 4, 5, 6, 7).
« Donner des gadgets aux professeurs sans formation adéquate peut faire plus de mal que de bien dans la classe! » disent les étudiants dans Chronicle of Higher Education.

Certes, d’aucuns diront que rien ne vaut la bonne vieille craie et le tableau noir. Et ils ont sans doute raison. Les schémas complexes passent trop vite en projection et ne sont pas vraiment retenus, même s’ils sont compris sur le moment. C’est dans la combinaison de tous les moyens, employés avec modération et habilement adaptés, que réside le secret de la bonne communication.

Tout s’apprend

L’exemple du PowerPoint, aussi universel soit-il, est anecdotique mais il illustre (sans jeu de mots!) parfaitement le souci que l’on doit garder présent à l’esprit lorsque l’on enseigne. De nombreux autres aspects de l’enseignement (cours oral, travaux pratiques, répétitions, séminaires, groupes de travail, évaluation des « enseignés » donc examens sous toutes leurs formes, etc.) sont trop souvent laissés à l’improvisation et, pire, à la certitude de savoir bien faire, de savoir tout faire bien. Tout s’apprend, et il n’y a pas de honte à cela. Les techniques évoluent, la réceptivité des étudiants et leur relation aux études aussi. On peut retirer ce que l’on veut des formations et informations aujourd’hui disponibles, mais on ne peut s’en désintéresser totalement. Celles qu’organise l’ULg, et l’IFRES (Institut de Formation et de Recherche en Enseignement Supérieur) en particulier, constituent une opportunité à saisir, un service rendu aux encadrants, de quelque niveau qu’ils soient.

C’est pourquoi notre Conseil d’Administration a, le 13 juin dernier, décidé à l’unanimité d’approuver l’organisation par l’IFRES d’un programme structuré visant à une meilleure formation des étudiants de l’Université de Liège à travers trois axes :
1. une offre de formation pédagogique diversifiée pour les encadrants;
2. le développement d’initiatives pédagogiques et de recherches dans le domaine de la pédagogie de l’enseignement supérieur en collaboration étroite avec les Facultés;
3. l’adoption par l’ULg du paradigme de la formation orientée vers le développement de compétences.

Dans la foulée, le C.A. a également décidé de s’inscrire immédiatement dans cette dynamique et pour cela, d’approuver les principes suivants:
1. les nouveaux assistants seront tenus de suivre une formation pédagogique de base (10 demi-journées) qui sera une des conditions de l’éventuel renouvellement de leur mandat;
2. cette formation de base et la poursuite de cette formation, seront vivement recommandées aux assistants en cours de deuxième ou de troisième mandat, aux didacticiens (logisticiens affectés à l’enseignement), ainsi qu’aux premiers assistants et chefs de travaux;
3. s’ils ne l’ont déjà suivie, les nouveaux chargés de cours seront également tenus de suivre la formation. S’ils l’ont déjà suivie, ils seront encouragés à la poursuivre.
Par ailleurs, l’expérience antérieure de chacun sera valorisée dans ce contexte.

De façon plus générale, il sera vivement recommandé à tous les enseignants en fonction de profiter de l’opportunité qui leur est offerte de pouvoir bénéficier de ces formations qui seront considérées comme un élément positif de leur curriculum et constitueront un atout lors des évaluations diverses auxquelles ils sont soumis au cours de leur carrière.

D’aucuns ne manqueront pas de s’offusquer du caractère coercitif de ces mesures, en tout cas à l’égard des nouveau-venus. Je pense au contraire que la formule utilisée, faisant appel à l’expérience et au vécu de chacun, donc très participative, trouvera un écho positif et que ceux qui y auront goûté reviendront, au-delà même de ce qui leur est demandé.

Les objectifs de l’IFRES, et du Centre de Didactique supérieure en particulier, sont très clairs:
- informer les encadrants de première année sur les structures d’aide à la réussite des étudiants et les cellules d’appui aux encadrants en matière de pédagogie universitaire,
- valoriser les initiatives innovantes prises en première année des différents cursus,
- favoriser une réflexion commune et un échange de bonnes pratiques entre les encadrants,
- aider ces derniers dans leurs réalisations concrètes.

En fait, nous sommes intimement convaincus que personne, dans une université moderne et dynamique, ne peut se satisfaire de la conviction qu’il ou elle peut avoir de bien faire son métier, sans l’avoir appris autrement que par l’exemple de ses maîtres et sans l’avoir fait vérifier. Le métier d’enseignant à l’université a beau être un métier unique, par sa nature même, combinant harmonieusement enseignement et recherche, il n’échappe cependant pas à la règle qui prévaut pour toutes les autres professions aujourd’hui: apprentissage et évaluation.

A propose de mon billet du 24 mars, Simone Jérôme attire mon attention sur la dérobade du Conseil de l’Europe (présidé par le sénateur belge Luc Van Den Brande !) concernant l’offensive créationniste.
Inquiétant.