novembre 2005


LE VERDICT

Par un arrêt rendu ce mercredi 23 novembre 2005 ((167/2005), la Cour d’Arbitrage vient de rejeter le recours introduit par 57 membres des corps académique et scientifique de l’ULg ainsi que de mandataires du FNRS à l’encontre du décret de la Communauté française du 31 mars 2004 définissant l’enseignement supérieur, favorisant son intégration à l’espace européen de l’enseignement supérieur et refinançant les universités mieux connu sous le nom de « Décret Bologne« .

Nos collègues critiquaient trois aspects du décret:
1. la limitation géographique de l’ULg à 6 cantons (Liège, Aywaille, Herstal, Seraing, Fléron et, pour les sciences et gestion de l’environnement et l’océanographie, Arlon),
2. la création de 3 académies universitaires qui, dans les faits, se sont avérées peu équilibrées et cela au détriment de l’ULg,
3. la mise en place de mesures disciplinaires qui pouvaient constituer une atteinte à la liberté académique.

Concernant les deux premiers points, la Cour a jugé que les requérants n’avaient pas d’intérêt direct à contester ces dispositions et que seule l’Université aurait pu se prévaloir d’un préjudice direct. Le recours n’était donc pas, pour ces points, recevable à ses yeux. Elle n’a pas jugé sur le fond.

Concernant le troisième point, la Cour a considéré que le recours était recevable, mais non fondé. En effet, selon elle, le décret ne menace pas la liberté académique mais au contraire, il en réaffirme le principe et il appartient aux universités de mettre en œuvre des mesures qui la garantissent effectivement pour leur corps enseignant.

QU’EN PENSER ?

Chacun peut se réjouir de cet arrêt. Les requérants puisqu’ils n’ont pas été déjugés sur le fond pour leurs deux premières critiques et qu’ils ont été rassurés sur la troisième, et tout le personnel académique puisqu’il est aujourd’hui patent que sa liberté n’est en aucun cas altérée par le décret, toutes les sécurités étant mises en place.

Pour ce qui est de l’Institution, sa position est claire comme elle l’a toujours été.

La restriction géographique

Concernant le point 1 (la limitation géographique de l’ULg à 6 cantons), il est vrai que cette mesure prive l’ULg d’une liberté historique que l’on peut même qualifier de privilège, puisque les universités « privées » étaient, elles, confinées spécifiquement à certains cantons. Il faut toutefois reconnaître que l’ULg n’a rigoureusement jamais fait usage de ce privilège dans les 188 ans de son existence. En effet, ce qu’il ne nous est plus possible d’organiser n’importe où en Belgique, c’est un enseignement conduisant à un grade académique — ceci ne concernant pas les formations continuées — or il n’est nullement dans nos intentions de le faire, pas plus aujourd’hui qu’auparavant.
Et ce n’est pas ce non-changement qui fera de notre université ce que certains prétendent qu’elle va devenir : une université de village.

Pour bien comprendre pourquoi, hormis un agacement bien naturel sur le principe en soi, je n’ai pas de difficulté particulière à admettre cette mesure, il faut préciser qu’elle n’affecte en rien l’aire de recrutement de nos étudiants. La restriction qui nous est imposée n’est pas de celles qui, à la française, limitent le choix des étudiants à des institutions particulières dans la zone géographique à laquelle ils appartiennent.

Pour moi, ce n’est pas en créant des bacs dans diverses provinces belges que l’ULg augmentera la zone de recrutement de ses étudiants, elle n’en aurait d’ailleurs pas les moyens humains. Par contre, c’est par des ententes et accords avec d’autres institutions, belges ou étrangères, en vue de compléter son offre de formations, qu’elle atteindra ce but.

Notre attractivité est inchangée. Elle reste due à la qualité de notre institution, de son enseignement et de sa recherche, bref, à sa réputation. A nous de l’entretenir et de l’améliorer.

Les académies

Quoi que certains puissent en dire, l’Académie Universitaire Wallonie-Europe, constituée par l’ULg et la Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de Gembloux (FUSAGx) se porte fort bien. A elles deux, nos institutions couvrent l’ensemble des domaines d’enseignement de la communauté, hormis la théologie, sans redondance. Par la rationalisation de l’offre de formations qui ne manquera pas d’être imposée aux académies tôt ou tard, la nôtre ne sera aucunement affectée. Par ailleurs, la complémentarité entre agronomie et médecine vétérinaire constitue un atout majeur.

Si, à première vue, nous souffrons de nous retrouver au sein de la plus petite des trois académies, un examen plus approfondi nous montre que les avantages de notre situation surpassent largement cet inconvénient et risquent fort, à terme, de jouer clairement en notre faveur.

La liberté académique

La lecture que fait la Cour du titre VI du décret est tout à fait rassurante.
La Cour rappelle que la liberté académique assure aux enseignants et aux chercheurs une « très grande liberté » pour mener des recherches et exprimer leurs opinions dans l’exercice de leurs fonctions, dans l’intérêt du développement du savoir et du pluralisme des opinions. Elle ajoute que la liberté académique fait partie de la liberté d’expression garantie par la Constitution et par la Convention européenne des droits de l’homme et qu’elle est spécifiquement réaffirmée dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle précise que cette liberté n’est pas illimitée en ce qu’elle ne peut porter atteinte à l’intérêt général ni à la qualité de l’enseignement dispensé au moyen des deniers publics.

Selon la Cour d’arbitrage, le décret « Bologne » n’entrave en rien la liberté académique mais la réaffirme explicitement dans son article 67.

Par ailleurs, on pouvait craindre qu’en organisant les enseignements selon le principe de la détitularisation — que personnellement, je préfère appeler « non-titularisation » et qui prévoit l’attribution temporaire de la charge d’enseignement et une révision périodique de cette charge — le décret ne menace la liberté académique en subordonnant la carrière d’un enseignant à la « conformité » des opinions qu’il exprime dans l’exercice de ses fonctions.

En fait, la non-titularisation instaurée dans le décret l’a été à la demande de l’ULg qui souhaitait ainsi bénéficier des avantages de mobilité interne et de souplesse dont jouissent les universités libres. En accordant cette requête aux institutions publiques, le décret prévoit que la révision périodique et la modification éventuelle du contenu de la charge d’un enseignant doit s’opérer selon un règlement établi par le Conseil d’administration (C.A.) et adopté à la majorité des deux tiers des membres présents. A charge donc du C.A. d’en fixer les garanties.

L’université a-t-elle pris ses responsabilités ?

Le C.A. de l’ULg s’est réuni en séance extraordinaire en novembre 2003 et s’est penché sur ce qui n’était alors qu’un projet de décret. Il a proposé une reformulation qui est reprise dans le texte définitif en mars 2004 et qui introduit la phrase : selon un règlement établi par le Conseil d’administration et adopté à la majorité des deux tiers des membres présents. Notre C.A. était donc bien conscient de cette disposition : il l’avait lui-même proposée !
La reformulation suggérée portait également sur le fait que le renouvellement ou la modification du contenu de la charge doit se faire après « avis de l’intéressé » et non simple information ou consultation de l’intéressé.

Une commission a reçu du C.A. la mission de proposer un règlement d’ordre intérieur, conformément aux exigences du décret. Le rapport de cette commission a été examiné et adopté par le C.A. le 17 novembre 2004, qui a acté la conclusion que, ni le décret, ni le règlement n’apportent de modification au statut des enseignants et qu’ils ne concernent que le renouvellement ou la modification de leur charge. Il a constaté que le règlement veillait à la protection des intéressés et à l’objectivité des décisions qui doivent être dûment motivées.

Une commission de sages a en outre été établie, qui examinera les cas litigieux éventuels et rendra un avis au C.A. Si celui-ci venait à prendre une décision contraire à l’avis des sages, il ne pourra le faire qu’à la majorité des deux tiers.

Dès le 17 novembre 2004, l’ULg était ainsi dotée d’un règlement interne (Doc C.A. 13.444) définissant les procédures et garanties concernant le principe de non-titularisation, comme l’exigeait le décret.

CONCLUSION

La Cour d’arbitrage a donc rejeté les recours en annulation partielle du décret « Bologne », à la satisfaction des requérants autant qu’à celle de l’université.

Dans leur communiqué à la communauté universitaire, les requérants insistent sur le fait que «C’est donc à nos autorités académiques actuelles, relayées par le monde politique, de défendre les intérêts futurs de notre institution au sein du paysage universitaire de notre Communauté». Je ne puis que partager cet avis avec enthousiasme et nous saurons prendre nos responsabilités.

Toutefois, il serait injuste de prétendre que les autorités et le C.A. précédents ne les avaient pas prises. Toutes les dispositions sont en place depuis un an, pratiquement jour pour jour, et c’est pour cette raison que les autorités de l’ULg et son C.A. n’ont pas jugé opportun de mettre en péril l’énorme travail mis en œuvre pour se conformer à la réforme de l’enseignement supérieur européen en contestant juridiquement un décret pour trois de ses aspects qui leur ont paru sans gravité ou sans réel danger, en raison des dispositions et garanties qu’ils ont prises.

Cette semaine s’est avérée riche en évènements révélateurs.

Lundi, conférence de presse sur la collaboration FN Herstal-ULg. J’en retire qu’au delà de collaborations technologiques que nous pouvons avoir avec des industries dans bien des domaines, il existe également des collaborations qui se révèlent très pluridisciplinaires. C’est le cas ici, avec le développement d’armes (fleuron du savoir-faire liégeois depuis des siècles) dont la dangerosité est réduite. Chacun s’accordera à dire que dans le maintien de l’ordre comme dans le maintien de la paix, nul ne souhaite voir utiliser des armes mortelles ou très dangereuses. La mise au point et la commercialisation d’armes à dangerosité réduite nécessite l’intervention d’ingénieurs, de physiciens, de chimistes, mais également de médecins légistes, de criminologues, de sociologues et de psychologues. Notre institution renferme toutes ces expertises et la collaboration paraît idéale.
C’est un superbe exemple de la complémentarité des spécialités, qui peut engendrer des développements très complets et intégrés.

Jeudi, conférence de presse sur la collaboration Arcelor-ULg. De celle-là, je retire essentiellement la mise en contact de chercheurs de l’entreprise et de l’Université, chercheurs de formation très différente. De la rencontre entre Biologistes, ingénieurs et physiciens de la recherche spatiale, chimistes d’une part et ingénieurs sidérurgistes d’autre part, sont nées une cinquantaine d’idées originales et totalement inattendues, qui elles-mêmes ont donné naissance à une cinquantaine de projets étonnants. Aucun d’entre eux ne serait arrivé à concevoir de tels projets sans ces rencontres fertilisantes.
C’est un superbe exemple du caractère indispensable du choc des cultures scientifiques pour la vraie innovation, celle qui ne se contente pas d’une amélioration de procédés mais qui fait naître des concepts totalement neufs, ceux-là même qui nous permettront de sauver l’avenir économique de notre région.

Il faut ajouter que, du côté de l’Université, les chercheurs impliqués dans ces programmes innovants ont derrière eux des années de travail acharné sur des sujets dont peu de gens ont jamais compris à quoi ils pourraient servir un jour. Ce sont les recherches fondamentales, qui semblent un luxe inutile de recherche pure de la connaissance pour elle-même, qui nourrissent le processus d’innovation, à condition d’être replacées dans un contexte inattendu.

Favoriser la rencontre de ces mondes apparemment distants est précisément notre rôle.

Pour la deuxième des Grandes Conférences Liégeoises (GCLg) organisées conjointement par le Ville et l’Université de Liège, le succès de foule est encore au rendez-vous !

Après la conférence remarquable de Pierre Harmel que j’ai commentée précédemment, et qui s’était soldée par la nécessité regrettable de refuser du monde, celle d’André Comte-Sponville, le 24 novembre, « A-t-on encore besoin d’une religion ? » s’annonce très difficile à gérer. En effet, notre Salle Académique — à laquelle nous tenons beaucoup pour le prestige des lieux et la participation active de l’ULg dans les GCLg — peut accueillir environ 350 personnes et nous en sommes déjà à plus de 850 préinscriptions !

A ce stade de l’évolution des choses, l’utilisation de la salle académique n’est plus possible. Sachons le reconnaître: nous sommes victimes de notre succès.
Toutefois nous tenons à respecter notre public et à lui offrir des conditions d’écoute décentes. La Salle Académique surchargée ne sera pas un endroit confortable et d’autre part, refuser autant de monde serait vraiment dommageable à l’image des GCLg.

Aussi avons-nous opté pour une solution raisonnable qui consiste à déplacer l’événement vers le Palais des Congrès, mieux adapté à un tel nombre d’auditeurs. Nous veillerons à ce que chacun soit bien informé du changement de lieu pour cette conférence. Merci de le faire savoir autour de vous.

Nous présentons toutes nos excuses à notre public pour les inconvénients qu’entraînera ce changement. Ils seront, je pense, moindres que ceux qui découleraient de notre entêtement à vouloir rester dans notre salle.

Le décidément surprenant magazine Trends-Tendances semble avoir décidé de nous en sortir une bien bonne chaque semaine…!
Et dans le style douche écossaise.

Après avoir fait du Recteur de l’ULg un « superhéros », voici qu’il fustige notre Institution pour avoir osé décider d’offrir aux membres de son personnel des conditions avantageuses lors de l’inscription de leurs enfants à l’université de Liège (p7, Les Confidentiels). Malheureusement, le journaliste non identifié qui rédige ce billet est terriblement mal renseigné, de toute évidence parce qu’il a bâclé son travail alors qu’une rapide enquête lui eût donné toutes les informations nécessaires pour écrire un article très positif.
Mais voilà. Soit il était trop pressé, ce qui est regrettable, soit il tenait à être négatif a priori, ce qui est pire encore.

Jugez-en vous-mêmes, je reprends ici le texte in extenso:

« L’ULg cajole son personnel
L’Université de Liège offre, à partir de cette année académique, des conditions d’inscription imbattables aux enfants de son personnel: €65 par an de frais administratifs,
punt aan de lijn. Face aux €759 de minerval que les parents doivent normalement produire pour inscrire leurs rejetons, l’écart fait bien entendu jaser. « Toute entreprise consent des conditions particulières aux membres de son personnel, c’est normal » rétorque un assistant. Reste à lui rappeler que le fisc s’intéresse de près aux ristournes consenties par l’employeur à son personnel. Reste aussi à voir ce que la Fédération des étudiant(e)s francophones (FEF) et le monde politique pensent de cette condition différenciée d’accès à l’enseignement public, qui, de surcroît, ne tient pas du tout compte du niveau de revenus des parents. »

Tout d’abord, d’autres universités telles que l’ULB et l’UCL appliquent ce principe depuis longtemps sans que cela heurte quiconque. Pour tout dire, notre programme est d’ailleurs inspiré de celui que l’UCL a mis en œuvre depuis des années et j’en profite pour féliciter nos collègues louvanistes pour leur excellente initiative.

D’autre part, l’ULg est une institution respectueuse des lois, contrairement à ce que l’article insinue en faisant apparaître cette nouveauté comme un coup d’audace vis-à-vis du fisc, du genre « ça passe ou ça casse ». Seulement voilà, une institution de cette ampleur et de cette réputation ne saurait envisager un comportement aussi irresponsable. Elle est parfaitement au fait de la législation en matière d’avantages en nature. Les décisions de son Conseil d’Administration sont examinées attentivement par un Commissaire du Gouvernement et par un Délégué du Ministre du Budget. Elle ne prend donc pas ses décisions à la légère.

J’ai toujours considéré Trends-Tendances comme un journal d’un grand professionnalisme. C’est pourquoi je suis sidéré d’y lire un article aussi bâclé et dont même le style dénote avec la qualité du journal. S’il s’était bien renseigné, l’auteur de ce billet aurait appris qu’en l’occurrence, ce n’est pas l’ULg qui octroie un avantage en nature à son personnel mais que cet avantage est offert par une ASBL, PromULg, constituée par décision du Conseil d’Administration de l’ULg et dont l’objet social consiste à « soutenir l’ULg dans ses missions de promotion de la recherche et de l’enseignement universitaires grâce à des subsides et dons ; assurer la promotion du bien-être moral, matériel, social, culturel et sportif de l’ensemble des membres de la communauté universitaire ; procurer un soutien aux efforts des personnes, groupes, associations et organismes officiels ou privés qui poursuivent un objet semblable. Ainsi, notamment, elle a pour objectif de faire bénéficier l’ULg d’un outil lui permettant d’obtenir des subsides (européens, fédéraux, etc.) qui requièrent ce type de structure juridique, ainsi que de recevoir des dons et des subsides en vue notamment d’accorder des bourses, moyens d’encouragement ou facilités diverses à des étudiants, chercheurs, membres du personnel ou de la communauté universitaire au sens large ».

L’initiative de la réduction de minerval pour les enfants du personnel entre donc parfaitement dans le cadre des objectifs de cette association. Les fonds de l’ASBL « PromULg » proviennent pour une large part, de dons extérieurs à l’Institution, et pour le reste, du rassemblement des moyens de diverses fondations dédiées aux œuvres sociales de l’ULg.
Il ne s’agit donc nullement de « ristournes consenties par l’employeur à son personnel ».

Mais peu importe. Ce ne sont ni ces imprécisions, ni cette partialité qui m’agacent, c’est cette façon déplaisante de prendre notre université pour cible sur base de renseignements glanés de manière aussi superficielle, en consultant un « assistant » au lieu de prendre tout simplement contact avec les autorités académiques responsables, toujours disponibles pour un entretien, fût-il téléphonique, et qui auraient pu exposer l’ensemble de ces considérations. Cette négligence est le signe d’une grande légèreté sur le plan professionnel.

Comme il faut toujours considérer le côté positif des choses, j’espère que ceux de nos étudiants qui se destinent au métier de journaliste et qui me lisent aujourd’hui sauront tirer la leçon de cet incident pour éviter un des principaux et plus dangereux écueils de leur future profession.

Nous allons réagir officiellement, en tant qu’institution nommément citée, par une lettre que j’adresserai lundi au rédacteur en chef de Trends-Tendances avec une demande d’utilisation de notre droit de réponse, justifiée par le préjudice qu’a pu causer ce billet à l’image et à la réputation de l’ULg. Toutefois en raison du nombre de réactions des membres de la communauté universitaire que j’ai reçues dès jeudi, je tenais à exprimer immédiatement mon indignation sur mon blog.

Le classement 2005 des 200 « meilleures » universités mondiales par le Times Higher Education Supplement (T.H.E.S.) vient de sortir.
Une fois encore, l’ULg n’apparaît pas dans ce classement, alors que l’ULB (76è), l’UCL (88è) et la KUL (95è) sont bien classées.
Ce n’est pas une surprise… Après tout, nous nous trouvions à la 344è place l’an dernier et réagissant à cette nouvelle en janvier, il eût tenu du miracle que nous nous hissions dans les 200 premiers en 6 mois (l’enquête a été réalisée au mois de juillet-août).
Toutefois, il serait intéressant de savoir si, au moins, nous avons progressé dans le classement.

J’ai donc contacté directement les auteurs de l’enquête pour qu’ils me communiquent des informations plus complètes : où nous situons-nous dans le classement général ? où nous situons-nous pour chacun des critères ?
Ce n’est qu’en présence de ces informations que nous pourrons tirer les conclusions qui s’imposent. Je rappelle que, dans l’enquête de l’Université de Shanghaï réalisée l’an dernier et basée sur des critères plus convaincants, nous nous classions 263è mondial et 97è européen — une information qui ne pourrait ressortir du classement du T.H.E.S. — et les trois mêmes universités belges (ULB, UCL et KUL) figuraient dans le top-200 mondial et le top 50 (52 pour l’UCL) européen.

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Dear Mr Ince,

I have just read the new Times H E Supplement on the World University Rankings.
Of course, it is not easy for me to acknowledge once again that my university does not belong in the top 200.
However, making such a leap forward in less than a year would have been simply prodigious and I was not exactly expecting this.
My purpose here is to ask you in which position the University of Liège is actually ranking, according to your criteria.
This will tell me how far we are lagging behind our fellow Belgian universities.
It is important for me to know because we all admit that there are no such considerable differences between Liege, Louvain and Brussels in terms of most of the criteria. I admit that Liege itself is less notorious than Brussels as a city and than Louvain which is a university of almost millenary tradition in Europe. Considering that notoriousness is a key factor in the THEWU Ranking, I understand the results to some extent, but I would like to evaluate how far we are.
I would be delighted if you could send me any information on our results in the various criteria as well as on our overall ranking.
It would be very fruitful to us, in order to improve our position in the next few years, which is, I believe, one of the aims of the THEWU Rankings to start with.

Thanking you very much in advance, I remain,
Sincerely Yours.

Professor Bernard Rentier
Rector
University of Liege
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Dear Dr Rentier

Thank you very much for this email.
In our final analysis, your institution was 296 in the world, 48 places higher than in 2004.
You are right that Liege itself is less familiar than Brussels or Leuven as an academic centre, both in the opinion of academics and of employers. It seems from our results that you have a fairly staff body, but do not generate a large amount of citations
The scores were :
Peer review 12
Employer 3
International staff 9
International students 34
Staff/student 14
Citations 4
Total 16 cf Harvard 100

Best regards

Martin Ince
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Le classement 2004

Avant de tirer des conclusions hâtives, il convient de revenir sur la manière dont cette analyse a été faite. Examinons celle de 2004.

Elle a été confiée par le T.H.E.S. à une firme privée : QS, de Londres.
Celle-ci a commencé par collationner deux données pour chaque institution :
1. Un « Peer review score », c’est-à-dire une enquête de notoriété. Elle consistait à demander à un échantillon de 1.300 universitaires de 88 pays sur tous les continents quelles sont les universités qu’ils considèrent comme les plus prestigieuses dans leur domaine d’activité, un critère exclusivement basé sur la notoriété. Cet élément d’enquête compte pour 50 % dans le calcul final.
2. Une mesure de l’impact de la recherche, calculé sur base des citations des membres des institutions répertoriées dans « Essential Science Indicators » (publié par Thomson Scientific, ex-ISI). Un critère favorisant indiscutablement les anglo-saxons et les sciences dites « dures ». Cette mesure intervient pour 20%.

Sur base de ces deux éléments, QS a opéré une sélection des 300 premiers classés après élimination d’un petit nombre d’institutions spécialisées qui ont produit moins de 5.000 publications sur l’année (une rapide enquête sur « Scholar Google » en détecte 27.778 pour l’ULg en 2004, mais en comptant 2.530 publications pour le CHU de Liège qui « omettent » de mentionner l’ULg, 658 qui se déclarent du Centre hospitalier universitaire de Liège et 2.600 de l’University Hospital of Liège !)

Ensuite, QS a recherché un complément d’informations dans les bases de données telles que celles de l’ISI, sur les sites web, ainsi que par courriel ou téléphone aux institutions elles-mêmes. Les questions posées :

3. Le rapport d’encadrement (20 %)
4. La proportion d’encadrants étrangers (5 %)
5. La proportion d’étudiants étrangers (5 %)

Interviennent également dans le classement :

6. Le nombre de lauréats du Prix Nobel ou de la Médaille Fields
7. Le nombre et le rapport d’encadrants belges et internationaux
8. Le nombre et le rapport d’étudiants belges et internationaux normalement inscrits (hors-Erasmus)
9. L’ampleur de la mobilité étudiante dans des réseaux d’échange (entrants et sortants)
10. Le nombre d’étudiants de 2è et de 3è cycles
11. Le montant moyen du minerval pour les étudiants internationaux de 2è cycle et de 3è cycle
12. Les dépenses totales pour les bibliothèques

Le classement 2005

Cette année, on ne nous demandait plus les lauréats de prix Nobel ou de médaille Fields et surtout l’enquête de notoriété ne comptait plus que pour 40 %. Néanmoins, l’esprit de cette évaluation n’était pas fondamentalement modifié.

De quoi paniquer ?

Sans doute n’est-il pas nécessaire de s’inquiéter particulièrement. Rien ne fait de ce classement un passage obligé. Les critères qu’il utilise sont très contestables et particulièrement biaisés. Le succès des universités australiennes est très suspect (13 dans les 161 premiers !), de même que celui des universités de Hong Kong ou de Singapour. Il se trouve que je connais personnellement quelque peu l’Université de Novosibirsk et son président. Sa 169è position laisse rêveur… Mais mon propos n’est certainement pas de dénigrer quiconque. Qu’on apprécie le choix des critères ou non, leur pondération et les inévitables biais qu’ils induisent sont les mêmes pour toutes les institutions francophones belges et les écarts que nous constatons avec nos universités-sœurs de Bruxelles et de Louvain doivent nous amener à nous poser des questions. Questions auxquelles nous devons répondre rapidement si nous voulons combler ce retard, non pas en une année pour la prochaine édition, mais dans les 4 ou 5 années à venir.

Nous avons donc significativement progressé, puisque nous sommes entrés dans le top 300, ce qui nous a valu d’être interrogés plus avant et d’être inclus dans la seconde phase de l’enquête. Nous étions 344è en 2004. Pas de quoi pavoiser, mais en position honorable quand même, eu égard au grand nombre d’universités qui existent dans le monde et au solide biais de l’enquête en faveur de la notoriété.

A quoi pouvons-nous attribuer notre progression ?

1. A l’importance moindre accordée à la simple notoriété en 2005 (40% au lieu de 50%).
2. Aux efforts que nous avons fait pour donner une meilleure estimation de notre production scientifique, grâce à une enquête réalisée auprès des départements cet été.
3. A une évaluation plus précise des informations demandées par les enquêteurs grâce à la mise sur pied d’une coordination des réponses à ce genre d’enquête par les administrations de l’Enseignement et de la Recherche au sein du service des Relations extérieures de l’ULg, ainsi que grâce à l’enquête réalisée cet été auprès des départements de l’ULg en matière de publications. Cette coordination permet de mieux faire face à ces demandes extérieures qui arrivent souvent sans crier gare.
Le mouvement entamé est donc le bon. Il nous reste à le perfectionner.

Comment progresser ?

Comme je l’ai annoncé, nous allons entamer une réflexion de fond sur la question de notoriété, en examinant en particulier les moyens à notre disposition pour améliorer notre image auprès de nos diplômés actuellement répandus à la surface de la planète. Ils assurent une partie importante de notre réputation dans le monde. Les étudiants étrangers qui ont étudié chez nous peuvent, s’ils sont heureux de leur séjour ici, contribuer à notre aura internationale. Accueillons-en beaucoup et accueillons les bien.

En termes de publications, de toute évidence notre second point faible (trop peu de citations), certaines mesures s’imposent.
Une cellule de veille (mixte Réseau des Bibliothèques-Relations extérieures-ARD) examinera dorénavant les publications de l’ULg et vérifiera que l’appellation Université de Liège ou University of Liege est toujours bien employée, y compris par nos collègues qui travaillent partiellement au CHU ou dans un organisme qui nous est associé. Pour tout dire, certains membres de centres de recherche de l’ULg omettent de mentionner celle-ci dans leurs publications! Je signalerai personnellement ces manquements aux intéressés et leur rappellerai cette obligation qui s’applique à tout membre à temps plein ou à temps partiel de l’Institution.
Cette cellule vérifiera également les calculs du THES et les maintiendra à jour.

Je compte demander au Réseau des Bibliothèques de me fournir des informations plus précises sur la production scientifique des membres de l’Institution. Il s’agit là d’un projet que je caresse de longue date, cette opportunité va nous permettre de lancer une grande opération de mise à jour permanente des publications de l’ULg. Nous pourrons ainsi être plus précis et fournir une estimation plus réaliste de notre production scientifique.

Notre projet « Répertoire institutionnel » qui a l’ambition de répertorier toutes les publications de l’ULg va être accéléré et se voir accorder des moyens adéquats. Il devra comprendre toutes les publications récentes des membres de l’Institution.
Afin d’assurer à ce projet la meilleure exaustivité, dorénavant les évaluations des curricula vitae des membres de l’ULg pour quelque propos que ce soit (nomination, promotion, demande de crédit, etc) se baseront exclusivement sur les données introduites dans la « bibliographie institutionnelle ». Chacun aura donc à cœur de participer systématiquement à l’établissement de cette base de données. Même si, dans un premier temps, cette mesure va paraître contraignante, elle deviendra rapidement un soutien apprécié des chercheurs, j’en suis sûr. En effet, toute répétition de cet encodage deviendra inutile. La seule contrainte sera de maintenir cette base à jour. Nous tâcherons de rendre cet accès aussi convivial que possible.
Cette mesure aura également pour effet de donner à notre institution un outil qui lui manque depuis longtemps : un répertoire de sa production scientifique, vitrine de sa recherche.

Enfin, je tiens à encourager tous nos chercheurs, quel que soit leur domaine de recherche, à publier le résultat de leurs travaux dans des revues à diffusion internationale reprises dans les sources d’information pour l’évaluation du nombre de citations. Que l’on m’épargne les réserves d’usage concernant le biais anglo-saxon de ces mesures, ainsi que le biais en faveur des sciences dites dures ou exactes et des sciences bio-médicales, je les connais et je les comprends. Néanmoins, je constate que ce n’est guère dans ces domaines que nous sommes à la traîne de nos universités-sœurs de la Communauté française, mais plutôt dans des domaines qui touchent aux sciences humaines où nos collègues des autres institutions se placent mieux à cet égard. J’insiste donc pour que chacun réfléchisse aux opportunités qu’il ou elle peut avoir de publier ses recherches dans des revues à grand lectorat qui lui donnent plus de chances d’être cité(e).

Et, bien évidemment, j’en profite pour rompre encore une lance en faveur d’un de mes « dadas »: la publication en accès libre qui est en train de devenir, comme je l’avais annoncé il y a deux ans, un des vecteurs de lecture démontrant la plus forte croissance aujourd’hui, en termes de citations et de facteur d’impact. Je rappelle, à cet égard, que l’Institution aide et encourage concrètement ses chercheurs à choisir cette voie.

Je compte enfin demander à 4 de mes conseillers (Recherche, Enseignement, Image et Relations internationales) de plancher sur la question et de soumettre dans les prochains mois un rapport sur la stratégie à mettre en œuvre pour répondre efficacement à ce que je considère malheureusement comme un manque global de notoriété de notre université. Certes, je sais que beaucoup d’entre nous sont mondialement connus, mais force nous est de constater que ceci ne retombe pas de manière efficace sur l’ensemble de l’Institution.

Deux commentaires à l’article ci-dessus ont été déposéés sur le blog interne, je les reproduis ici.

Merci pour votre commentaire éclairé de ce classement : le rappel des critères sur la base desquels certaines universités sont distinguées commes les “meilleures” est une chose essentielle, méconnue du grand public… et parfois des membres de l’université eux-mêmes. Ce rappel des critères impliqués nous indiquent au moins dans quelle direction travailler, et nous épargnent le triste sentiment de mésestime que l’on rencontre parfois dans les petites et moyennes universités, où certains font cependant un travail remarquable.

Que la notoriété constitue un critère déterminant (majeur) dans un classement dont les conclusions s’énoncent dans un terme (”meilleur”) qui désigne généralement une “qualité” (ce qui donne à penser qu’il s’agit de la qualité de la recherche et de l’enseignement des universités), nous pouvons toutefois légitimement nous en étonner, puisque ces phénomènes (notoriété-qualité) ne sont pas de même nature. Même si l’on voit bien les corrélations plus ou moins fortes qui peuvent lier la notoriété et la qualité de la recherche, ne devons-nous pas prendre également en considération le fait que la notoriété croît ou décroît naturellement en proportion de la taille des universités (nombre de membres du personnel et des étudiants) ? D’autres éléments n’entrent-ils pas en ligne de compte, qui sont, eux, en corrélation de plus en plus floue avec la “qualité”, tels que la notoriété acquise dans le passé, la présence de centres de recherche anciens et bien connus, etc. ?

Merci pour cette réflexion.

Florence Caeymaex
Collaborateur scientifique FNRS
Philosophie morale et politique

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Merci pour ces commentaires fort éclairants sur la méthodologie utilisée lors de la réalisation de ce genre de classements. Si la méthodologie est évidemment discutable, comme sans doute le principe même d’établir ce type de classements, force est pourtant de constater qu’ils ont une importance, et qu’il serait vain d’essayer de nous y soustraire. Ces classements ont un écho dans la presse, ont un impact sur la réputation de notre université (et donc de nos travaux), déterminent sans doute le choix de certains étudiants, et en particulier des étudiants étrangers… Je me réjouis donc de lire qu’un effort va être fait pour que nous progressions dans ce classement !

François Gemenne.

Afin de répondre à une demande fréquente de la part de personnes extérieures à l’ULg qui regrettent que mon blog soit exclusivement réservé aux membres de la communauté universitaire, j’ai décidé d’en rendre publique une partie. J’y consignerai les articles qui s’adressent aussi bien aux milieux extérieurs qu’aux membres de l’ULg. J’y ai déja placé les articles publiés durant le mois d’octobre.

Les articles qui ne concernent que les membres de l’ULg ou ceux dont je souhaite réserver l’exclusivité à l’ULg se trouveront uniquement sur le blog Intranet
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