English version below.

La « 2011 CIHE Engineering & Manufacturing Task Force », établie l’an dernier par le « Council for Industry and Higher Education » au Royaume Uni, dans son rapport inaugural, presse les universités de partager leurs idées gratuitement. Leur slogan: « Powering Up; Business and Universities Collaborating for Manufacturing Competitiveness in the New Industrial Revolution ».

L’idée est de demander aux universités du Royaume Uni de mettre généreusement leur savoir à disposition et de distribuer gratuitement leurs idées. Le CIHE affirme qu’en dépit de nombreux succès, les universités dépensent plus de 50 millions de livres sterling par an pour breveter leurs idées, dont beaucoup sont sans valeur commerciale, dit-il.

Pour moi, il s’agit ici d’un véritable braquage. Et de surcroît, on surfe sur la popularité croissante de l’Open Access (OA), dont il se trouve que je suis un supporter enthousiaste. Mais il s’agit ici d’une vision distordue de l’OA qui nous ramène loin dans le temps, aux temps heureux pour l’industrie, lorsque les données produites par les universités pouvaient être allègrement transférées au privé pour des cacahuètes.

L’OA, ce n’est pas cela. En aucun cas il n’interfère avec la propriété intellectuelle ni ne force à y renoncer. Si un brevet doit être pris, que l’on publie en OA ou non ne fait pas la moindre différence. Et il est choquant de constater qu’une institution respectable comme le CIHE tente de tirer profit d’un mouvement majeur au sein du monde scientifique pour semer la confusion chez les chercheurs et les gestionnaires des universités sur un sujet essentiel. S’il est vrai que la recherche réalisée avec les deniers publics doit être rendue publique, cela n’empêche en rien la prise de précautions en matière de brevets et de licences d’exploitation. C’est trop de pointer son nez maintenant, à la faveur d’un nouveau concept d’accès libre très en vogue, de demander que toutes les barrières tombent et de se servir dans l’étalage gratuit des informations de recherche.

Je l’ai dit, je suis un enthousiaste de l’Open Access, mais dans un contexte bien défini, où la propriété intellectuelle est pleinement respectée. Les universités ont trop longtemps abandonné à d’autres le profit de leur travail et leurs découvertes. Depuis quelque temps, elles ont appris à les garder pour elles et à ne les laisser partir vers l’exploitation qu’avec précaution et sur base de contrats clairs. Elles ont, par ailleurs, réagi fortement contre une exploitation éhontée du marché des publications par des requins féroces, ce n’est pas le moment d’abandonner tous ces progrès et d’être abusés sur la signification de l’accès libre, en faisant à quiconque le cadeau du fruit de leur travail.

The 2011 CIHE Engineering & Manufacturing Task Force, established last year by the Council for Industry and Higher Education in the UK, in its inaugural report, is urging universities to share ideas freely. Their motto: « Powering Up; Business and Universities Collaborating for Manufacturing Competitiveness in the New Industrial Revolution ».

The idea is to ask « UK universities to open their knowledge banks and to give more of their ideas away free of charge ». They claim that, « in spite of many successes, universities are spending more than £50 million a year patenting ideas, many of which are commercially worthless ».

To me, this looks like as a total rip-off. And, in addition, it is surfing on the more and more successful wave of Open Access, of which I happen to be a strong supporter. But this is a distorted view of open access, that is taking us back a long way, to the happy times for industry, when data produced by universities were freely transferred to industry for peanuts.

This is not what Open Access is all about! Open access does not interfere with intellectual property. If any patent has to be taken, whether you publish in the traditional mode or in Open access does not make the slightest difference. It is shocking to realise that a respectable institution like CIHE is trying to take advantage of a major revolution in scientific research to sow confusion among researchers and university managers on an essential topic. Although it is true that research done with public resources should be made publicly available, this by no means precludes the other necessary precautions in terms of patenting and licensing. It is all too easy to jump in now and, based on a trendy concept of open access, ask that all walls fall and just help oneself in a free market of scientific data.

As I said, I am a strong supporter of Open Access, but in a very well defined context, where intellectual property rights are perfectly secured. Universities have given away for too long the profit of their work and discoveries. For some time now, they have secured that quite well. They have reacted strongly against crude exploitation by some sharks in the publishing market, this is not the time to relinquish all this progress and be lured by the term « open access » giving away the fruits of their labour.

Il y a maintenant six ans que je blogue… Avec, incontestablement une perte de régime ces derniers mois. Il est vrai que l’exercice est exigeant et que je manque de plus en plus de temps. Bien souvent, il me prend l’envie de relayer des informations ou des idées sans avoir à rédiger tout un texte. C’est pourquoi, bien que j’aie beaucoup de réserves concernant les « réseaux sociaux », je me suis lancé dans Twitter… où vous me retrouverez facilement. L’avantage de Twitter, c’est qu’on ne vous demande d’être « l’ami » de personne et que personne ne vous importune. Vous « suivez » qui vous voulez et vous êtes accompagné de « suiveurs » discrets et silencieux, qui peuvent néanmoins vous joindre par le système des messages, personnels ou publics, du réseau, et dont vous faites exactement ce que vous voulez. Depuis deux semaines donc, je diffuse des commentaires, je signale des informations qui me semblent intéressantes.

Concernant l’ULg, vous trouverez également sur Twitter: l’Université de Liège, Culture ULg, Speed Liège, Gembloux Agro Bio-Tech, Alumni droit, les Bibliothèques de l’ULg, HEC-ULg, l’Aquarium-Muséeum de l’ULg, le P’tit Torè des étudiants…
Ainsi que divers twitteurs: Quanah Zimmerman à Gembloux, Thomas Froelicher à HEC, Didier Moreau, Stéphane Grétry et Annick Comblain aux RE, Rémy Hespel à la Web TV, entre autres. Une mine d’informations à notre portée.

Je reste réfractaire à m’inscrire sur Facebook, trop intrusif à mon goût. Néanmoins, je reconnais qu’il s’agit là d’un des grands moyens de communication en pleine explosion aujourd’hui. On y trouve notamment: la page officielle de l’ULg avec près de 1.000 fans, un groupe ULg qui, avec 4.700 membres, est en fait un des plus grands groupes universitaires sur Facebook, Culture ULg, Reflexions, la WebTV de l’ULg, SPEED Liège, la candidature liégeoise pour le Centre de formation des sportifs de haut niveau (CFSHN) de la Communauté française (voir mon billet précédent ci-dessous), Gembloux Agro Bio-Tech, HEC-ULg, Réjouisciences, ULg Emploi

Bonne promenade…!

L’ULg fait partie du Consortium SPEED (Sport d’Excellence et Education) formé avec la Province de Liège ainsi que les Villes de Liège et de Seraing, pour déposer la candidature liégeoise à l’accueil du Centre de formation des Sportifs de Haut Niveau de la Communauté française Wallonie-Bruxelles. Ces quatre acteurs publics régionaux majeurs ont rassemblé leurs meilleures compétences et ressources pour offrir aux futures élites sportives des conditions d’entraînement optimales tout en ne négligeant pas leur formation scolaire de base. C’est exactement l’idée qui sous-tend le cahier des charges de l’appel d’offre communautaire.

Nos Centres Sportifs du Sart Tilman, en plein cœur du domaine universitaire, seront l’épicentre des activités, sans oublier la piscine olympique de Seraing, autre atout de taille.
L’intérêt du projet SPEED repose aussi sur la proximité de tous les services médicaux du CHU de Liège, ainsi que sur les compétences scientifiques reconnues de nos équipes du Département des Sciences de la Motricité dans le suivi du sportif et l’optimalisation des performances sportives.
Le projet SPEED offre également une importante réduction de coûts pour la Communauté française grâce à l’engagement concret de tous les partenaires et à l’utilisation maximale de nombreuses infrastructures déjà existantes.
Les quatre opérateurs publics de SPEED proposent ainsi un projet ambitieux pour la formation des sportifs de haut niveau de Wallonie et de Bruxelles.

Au-delà des qualités intrinsèques du dossier SPEED, nous avons besoin du soutien de la population. Vous pouvez soutenir ce projet en en parlant autour de vous ; sur le site web de SPEED, vous pouvez vous informer sur les principaux éléments de cette candidature ainsi que dédier symboliquement vos minutes de pratique sportive à SPEED.

Vous pouvez également vous tenir au fait des différentes informations sur la page Facebook et sur Twitter.

La compétition sera rude, nous le savons. Elle sera très empreinte de politique politicienne sub-régionale, comme souvant dans notre Communauté, mais nous saurons défendre ce projet sur la simple base de ses atouts réels, de son coût, de la rapidité de sa mise en place opérationnelle et des très nombreuses autres qualités qui en font le meilleur candidat des huit qui sont en lice, dont celle d’émaner d’institutions publiques (pour une initiative de la Communauté Française, cette caractéristique est de majeure importance. Certains la considèrent même comme un prérequis, assez logiquement. En effet, on imagine mal qu’un étudiant sportif doive obligatoirement, à l’initiative de la CFWB, faire ses études dans une institution confessionnelle pour bénéficier des avantages d’un tel centre) et néanmoins de proposer un éventail large d’établissements d’enseignement.

SPEED est un projet important pour notre Université dont les étudiants sportifs bénéficient déjà d’un statut particulier, mais aussi pour tous les établissements scolaires de la région liégeoise et pour toute la région. Il mérite d’être activement soutenu !

A en croire Le Soir de ce samedi, les entreprises dragueraient les universités. S’il est difficile de démontrer le contraire, il est en tout cas assez simple de dire que les choses sont plus complexes qu’il n’y parait.
Il me semble que plusieurs aspects doivent être envisagés.

1. La « drague » consisterait en une demande des entreprises pour que la formation dans l’enseignement supérieur tienne mieux compte des nécessités immédiates de l’emploi. En souhaitant que les jeunes diplômés soient immédiatement efficaces grâce à une formation très ciblée sur les besoins industriels, les industries s’éviteraient l’investissement de la transformation de diplômés « adaptables » en techniciens efficaces. Elles rendraient même sympathique cette exigence en affirmant qu’elles contribueraient ainsi à l’augmentation significative des chances de nos diplômés de trouver un emploi.

2. Il est vrai que beaucoup d’entreprises aujourd’hui trouvent de jeunes diplômés directement efficaces en France et qu’elles en importent beaucoup. Il est également vrai que le système français utilise beaucoup plus que le nôtre les stages en entreprise durant les études, ce qui offre à l’étudiant(e) une formation plus pratique, plus en prise avec la réalité et une chance réelle de rester, comme employé(e), dans l’entreprise où il (ou elle) a effectué son stage.

3. Cette formation plus « adéquate », plus « sur mesure » concerne nettement plus les hautes écoles que l’université. Toutefois, on voit bien comment on pourrait y venir également, en particulier dans des filières d’études dont la finalité professionnelle est assez évidente et que j’appellerais les sciences appliquées ou, pour ne pas induire de confusion avec les seules études d’ingénieur, les matières d’application. J’entends par là toutes les formations qui conduisent à des métiers utiles aux entreprises. La volonté de « façonner » les étudiants selon leurs besoins n’est guère une nouveauté de la part des entreprises, c’est une revendication quasi séculaire. Et les universités y ont toujours résisté, au moins dans une certaine mesure. Non pas pour rejeter une ingérence considérée comme inacceptable, mais par souci de donner aux étudiants une formation large et surtout de leur apprendre à apprendre, c’est-à-dire, leur apprendre à savoir s’adapter à tout. Il est en effet dans l’intérêt de l’étudiant, plus que dans celui de l’entreprise si la volonté de celle-ci est la rentabilité sans le moindre délai, d’acquérir la capacité de s’adapter à tout, et de pouvoir se reconvertir en fonction de l’évolution du marché, des technologies, des méthodes, des modes et des nécessites commerciales. Nous avons la faiblesse, nous, universitaires, de croire que c’est là non seulement l’intérêt de l’étudiant, mais également celui de l’entreprise, qui ne pourra que se louer de l’adaptabilité de ses cadres dans la durée, même si c’est au prix d’une mise à jour lors de l’embauche.

4. Tout le monde comprendra qu’on puisse envisager une nuance dans le raisonnement selon qu’on parle d’étudiants universitaires ou de haute école. Je ne me prononcerai pas sur ce point, faute de vraie connaissance de la question.

5. Dire que les universités résistent à cette pression serait exagéré. Certaines se lanceraient même fièrement dans cette voie. L’exemple cité dans l’article du Soir de ce samedi en dit long: cette détermination est même considérée par le vice-recteur d’une grande institution comme un avantage compétitif (« nous avons une longueur d’avance »). C’est néanmoins en contradiction avec les concepts défendus par le Conseil des Recteurs. Il y aura donc du relâchement sur ces principes, soyons en sûrs. On pourra le déplorer mais ce sera une réalité. Le tout sera de voir jusqu’où certains succomberont. En tout cas, dire que tous suivent la même voie serait inexact et, s’il est vrai que les responsabilités des recteurs sont souvent celles de chefs de grosses entreprises, on ne précisera jamais assez qu’il s’agit d’entreprises pas comme les autres. Dès que l’on étend l’analogie aux produits finis, commercialisables, qui seraient d’une part le diplômé et d’autre part la production de recherche, on tombe dans la comparaison facile et trompeuse: bref, on déraille.

6. De tout temps, il a été tentant, pour bien des gens, de souhaiter une meilleure adéquation entre formation et emploi. De tout temps, la démonstration du contraire (dans une mesure raisonnable, cela va de soi!) a été évidente, à terme. Certes, dans bien des domaines, particulièrement ceux qui conduisent presqu’invariablement à des professions déterminées, la formation s’est adaptée à l’évolution des nécessités de la profession. Mais il n’en reste pas moins vrai qu’une université qui veut pouvoir se regarder en face pense plus à donner à ses futurs diplômés une formation large et polyvalente qu’une adéquation immédiate et, parfois, temporaire.

7. Il faut, me semble-t-il, préciser que l’expérience tentée dans le cadre du plan Marshall de la RW dit « 2.vert » s’adresse, comme le dit l’article, à trois hautes écoles en tant que pilotes. Il n’est nullement question aujourd’hui d’y associer les universités, même si l’une d’entre elles dit vouloir le faire. Celle-là parle de 12 programmes de masters en dentisterie, polytechnique et management. Une telle politique est évidemment inquiétante en ce qu’elle peut avoir de démagogique. Proposer aux étudiants un « prêt à l’emploi » est plus un slogan de vente qu’une proposition sérieuse de formation universitaire. Mais peut-être cette « mise en adéquation » est-elle plus de forme que de fond, on peut en tout cas l’espérer.

8. Cette mise au point ne doit cependant pas masquer la nécessité de renforcer le principe trop peu utilisé des stages externes. Il me parait que nous avons largement manqué l’occasion qui se présentait à nous, avec la mise en place de « Bologne », lors de l’allongement des études universitaires de 4 à 5 ans pour bon nombre de filières (pas les ingénieurs, les vétérinaires, les médecins ni les psychologues, évidemment) en ne profitant pas de cette année supplémentaire pour introduire des stages dans le cursus. Sans être une concession au monde de l’industrie, le stage externe, pas nécessairement en entreprise, d’ailleurs, est un rapprochement utile avec le monde extérieur et devrait être amplifié. On jugera que mon point de vue sur les stages extérieurs n’est pas négatif, tout est dans la mesure et actuellement, nous en organisons trop peu. Mais je tiens à preciser qu’il ne s’agit nullement de « vendre » l’université, ni de la corrompre, ni de l’assujettir aux puissances de l’argent, ni de la privatiser.

9. Ceci nous amène au problème lancinant du financement public strict des universités. Disons-le tout net: la menace d’une forme d’inféodation au privé, si nous nous en défendons pas tous très fort, existe. Personnellement, j’y suis réfractaire, mais si les conditions de financement public de nos institutions continuent de diminuer aussi dramatiquement, j’ai des craintes pour un avenir, qu’on peut certes espérer encore lointain mais qui se rapproche, on le sent bien, de voir les institutions académiques céder aux sirènes des sources de financement privé. En effet, le nombre d’étudiants ne fait qu’augmenter, dans toutes les universités. Le contingent étranger, excellent pour notre rayonnement, augmente également très fort. Mais notre enveloppe budgétaire reste irrévocablement constante, ne montant qu’avec l’index des prix, donc diminuant à vue d’œil. Chaque étudiant est aujourd’hui bien moins subventionné qu’il ne l’était les années précédentes et ceci continuellement depuis la fermeture de l’enveloppe budgétaire il y a une a quinzaine d’années. Comment alors en vouloir à certaines institutions de succomber aux opportunités de financement de divers enseignements par le privé?

10. Il est temps que chacun se ressaisisse et que ce problème chronique de sous-financement des universités soit réellement pris à bras le corps par les élus d’une société de plus en plus consciente de l’importance d’une formation de haut niveau pour le plus grand nombre et non plus pour une élite restreinte. Cette ambition a un prix et seuls les pays qui sauront le reconnaitre et prendre les mesures en relation avec cette clairvoyance auront des chances de sortir des grandes crises par le haut et de s’adapter à l’émergence des nouvelles puissances internationales.

Dans la foulée du Projet pour l’ULg, plusieurs nouveautés devaient se mettre en place. Parmi elles, l’extension des procédures d’évaluation est en bonne place. Car en effet, on ne peut imaginer de mettre en place un contrôle des flux de ressources et une répartition plus juste et mieux adaptée de ceux-ci, colonne vertébrale de toute la réforme, que sur base d’une évaluation.

Évidemment, pour que cette innovation fonctionne, il faut avant tout que chacun, au sein de l’Institution, en comprenne le bien-fondé et adhère au processus. En particulier, il faut en admettre la raison d’être, la légitimité, la méthode et l’utilisation qui en sera faite.

Pour obtenir cette adhésion, les évaluateurs doivent se montrer extrêmement clairs sur ces différents aspects, tout particulièrement sur l’adéquation de la méthodologie et sur les conséquences que l’on doit en attendre.

A côté de ces évaluations qui justifient des décisions d’attribution de moyens de la part de l’Institution, il est important d’organiser des évaluations qui conduisent à des décisions de changement de la part des évalués eux-mêmes. C’est à cette deuxième catégorie qu’appartiennent les évaluations de l’agence AEQES de la CFB, qui sont assistées sur place par notre SMAQ. c’est pour cette raison que ces évaluations, appelées informatives ou formatives, portent sur les filières d’enseignement. Le seul impact de cette évaluation informative est s’instruire les acteurs de la filière eux-mêmes des forces et faiblesses de leur enseignement et d’en déterminer les éventuelles évolutions souhaitables.

Mais ce n’est pas aux filières que les moyens sont accordés, c’est aux départements via les facultés. Ceci montre bien que ces évaluation n’ont pas d’effets directs en matière d’allocation de ressources. Il peut certes y avoir un effet indirect car certaines améliorations ou renforcements souhaitables dans une filière nécessitent des moyens supplémentaires. Ceci se perçoit d’ailleurs régulièrement lors des remises de conclusions des experts de l’AEQES qui recommandent une augmentation du taux d’encadrement. L’Université étant globalement sous-encadrée, il n’y a là rien d’étonnant.

Où alloue-t-on des moyens, dans ce cas ? Aux Facultés, qui les repartissent entre les départements et, bientôt, aux centres de recherches. Cette procédure-là doit présider à un réexamen de la répartition des ressources, de manière à mieux correspondre aux besoins réels et à effectuer une répartition des ressources plus solidaire, plus juste.

Attention : solidaire ne veut pas dire juste. Solidarité n’implique pas égalitarisme. Les différences quantitatives et qualitatives existent et on doit en tenir compte. Etre solidaire, c’est ne laisser personne sur le carreau mais cela n’implique pas nécessairement de donner la même chose à tout le monde…

Il est donc important de se donner des critères objectifs avec lesquels tout le monde puisse être à peu près d’accord et qui permettent une juste distribution des moyens. Pour cela, nous avons besoin d’instruments de mesure et c’est cela que nous venons précisément de mettre progressivement en place avec l’ensemble des bases de données de l’Institution (ULIS, Penelope, SAP, Real Estate, SIRE, etc.) et avec le programme RADIUS de récolte et de traitement croisé des données. Je n’ai pas la prétention de croire que nous pourrons être justes d’emblée, mais nous nous y efforcerons et nous tendrons vers cet idéal-là, tout en assurant la solidarité entre tous.

« Comment le management gangrène les unifs ». Etonnante, la carte blanche dans la Libre Belgique par 15 universitaires — et non des moindres — (dont 5 liégeois) qui pose ainsi cette question (LLB, 5/1/11, p27). Amorce de débat légitime, en soi, mais curieusement hétéroclite dans sa rédaction, inégale et brouillonne dans son raisonnement.

En résumé, voici l’argument: deux évènements indépendants récents, la démission du recteur de l’ULB et l’échec de la fusion des quatre institutions universitaires catholiques en une UCLouvain, dénonceraient un même malaise qui s’étendrait, au delà des universités impliquées, à l’ensemble de l’enseignement universitaire belge francophone. Ce malaise serait dû à trois causes majeures: 1) l’élitisme universitaire qui freine la démocratisation des études, 2) les regroupements d’institutions qui nuisent à la formation de proximité et donc également à la démocratisation et 3) l’évaluation, miroir aux alouettes des responsables universitaires, tous fascinés par le conformisme unificateur à la bolognaise et terrorisés par la sanction des classements d’universités. Ce raisonnement un peu compliqué aboutit à une conclusion à laquelle je ne puis cependant que me rallier totalement: la loi de financement et la restructuration du paysage universitaire doivent faire l’objet d’une révision sur base d’un débat démocratique.

Ce débat a eu lieu, au sein des commissions de la Table Ronde sur l’Enseignement supérieur du printemps 2010 et, contrairement à ce qui est écrit dans l’article, ces différents aspects ont été débattus, longuement. Que rien de concret n’en soit encore sorti, c’est évidemment regrettable, mais on s’accordera à reconnaître que les conditions politiques ont été pour le moins perturbantes chez nous cette année.

Que l’Université devienne un business est certes inquiétant et doit être évité. Que ceci se passe ailleurs ne fait pas de doute. Qu’il s’agisse d’un reflet d’une pensée qui a tendance à devenir dominante est alarmant et appelle à la vigilance. Mais inférer de la mise en place de procédures d’évaluation qu’elles signent la soumission bêlante des universités au principe de la marchandisation à outrance constitue un raccourci surprenant et, pour tout dire, inacceptable.

Autant l’on peut s’accorder sur l’affirmation que « la permanence d’une mentalité élitiste et une loi de financement à enveloppe fermée placent constamment les différents établissements en situation de concurrence » (même si personnellement, je mettrais un bémol à l’élitisme car ça se discute), autant il est choquant de lire que « le pilotage des universités est guidé par une boussole omniprésente, celle qui vise la conquête de quelques places dans les classements ». Car en effet, c’est faire un bien mauvais procès aux dirigeants des universités que de réduire leur pilotage à un objectif aussi médiocre. C’est aussi totalement confondre d’une part le principe de l’évaluation et d’autre part les conséquences qu’on pourrait éventuellement risquer d’en tirer. C’est là un procès d’intention permanent qui deviendrait lassant s’il n’avait pour vertu de garder vive notre attention à ne pas laisser s’installer de dérive.

L’évaluation est un processus parfaitement légitime et naturel, trop longtemps absent du fonctionnement des universités (si ce n’est qu’il a toujours été omniprésent dans l’activité des universitaires vis-à-vis de leurs étudiants ou vis-à-vis de leurs pairs). Les conséquences de l’évaluation peuvent être diverses et le danger n’est certes pas nul de voir s’installer, comme dans certains pays, des sanctions immédiates et spectaculaires. Il suffit toutefois d’être clair sur cette question et d’éviter tout mauvais usage de l’outil qui est, lui, extrêmement salutaire et informatif pour l’évalué, s’il est bien manié.

Toutefois, le rapport avec la recherche d’une progression dans les classements est un fantasme qui revient souvent à la surface et qui me semble hors de proportion. Y attribuer le malaise qui a conduit à la démission du recteur de l’ULB en septembre dernier est complètement à côté de la question. Philippe Vincke a été très clair : sa démission était la conséquence d’un problème interne, spécifique à son institution, à savoir l’existence de plus en plus dérangeante de comportements claniques parmi les administrateurs, comportements contraires à son éthique personnelle. La démission du recteur visait à dénoncer ces pratiques et à sensibiliser la communauté universitaire à l’impasse dans laquelle ces comportements la conduisaient. Rien à voir avec un malaise général lié à l’élitisme, ni, comme ses détracteurs ont voulu le laisser entendre, en raison d’un désaccord sur le principe de l’avenir de l’académie universitaire Wallonie-Bruxelles.

Par ailleurs, l’affirmation que « la population universitaire ne compte pas aujourd’hui plus de jeunes issus de milieux populaires que par le passé » est contredite par toutes les études statistiques sur le sujet.

Il est également inexact que le regroupement de 2004 en académies était « soutenu par les autorités universitaires » et encore plus inexact qu’il reposait sur « un regroupement selon les obédiences philosophiques ». Cela semble évident, mais il s’agit là d’une constatation a posteriori. En réalité, avant même que les discussions et négociations sur le regroupement qui leur était imposé n’aient pu s’accomplir, l’Académie Louvain s’est formée entre les 4 institutions catholiques et c’est cette décision-là qui, dans son extrême rapidité, a conditionné tout le reste. Toutes les universités n’avaient donc pas « choisi de raviver le clivage philosophique qui segmente la société belge ». Il est toujours dangereux de réécrire l’Histoire.

Je partage par contre entièrement l’idée de « privilégier les formes de l’offre de formation de proximité » afin de permettre à l’enseignement universitaire de « s’adresser aux publics qui s’en trouvent encore toujours écartés ». Mais je ne puis être d’accord avec l’affirmation que, « avec le zèle de nouveaux convertis, les universités mettent en place des procédures d’évaluation des personnes et des équipes » afin de se conformer à la « nouvelle logique de l’esprit de Bologne ». C’est évidemment très réducteur et cela fait injure au discernement dont les autorités universitaires sont capables, comme si l’accession aux commandes des institutions rendait subitement stupide, en quelque sorte. Je prétends au contraire que le système d’évaluation mis en place — avec plus ou moins de bonheur, je le reconnais — vise à donner des bases plus rigoureuses (même si la vraie rigueur est, hélas, utopique) à des processus qui, jusqu’ici étaient aléatoires ou pire, injustes et éminemment subjectifs. D’autre part, la compétition pour les moyens de la recherche a toujours existé, elle était bien plus féroce lorsque j’ai commencé ma carrière qu’aujourd’hui.

Je suis donc étonné qu’une brochette d’excellents universitaires nous serve une telle macédoine de concepts, de manière aussi désordonnée et confuse. Personnellement, le malaise qu’ils dénoncent, c’est à la lecture de leur article que je le ressens, même si, en définitive et par un autre raisonnement, j’adhère à leur requête: la loi de financement en enveloppe fermée contient beaucoup des maux dont l’enseignement universitaire de la CFB est perclus. Il s’agit d’une part du financement dégressif de l’étudiant puisque le montant est fixe et que la population augmente, et d’autre part de l’effet de compétition et de son corollaire pervers, la chasse à l’étudiant. Focalisons-nous tous ensemble sur cet objectif commun et évitons de polluer le débat avec des éléments qui n’ont rien à voir et servent d’autres visées.

La semaine dernière, après le décès tragique d’un étudiant d’une haute école liégeoise à la sortie d’une nuit de libations, organisée en prélude à la célèbre Saint Nicolas des étudiants par l’Association générale des étudiants liégeois (AGEL), un groupement indépendant de l’Université et qui compte des étudiants de toutes les institutions d’enseignement supérieur (et de plus en plus, secondaire), la presse n’a pas manqué de me demander mon avis ni ce que je comptais faire. Allais-je attendre un quatrième décès pour agir ?

En dehors du fait que je n’avais strictement rien à voir avec cet événement, je rappelais que, si je suis en faveur d’un site « en dur » et « sécurisé » pour les guindailles et autres activités « folkloriques », je suis dans l’impossibilité de faire des propositions financières ou immobilières et que j’ai par contre fait des propositions d’emplacement au Sart Tilman. L’AGEL ayant rejeté cette proposition, tout reposant maintenant sur un accord de l’AGEL avec la Ville.

Alors que je donnais une interview, les étudiants commençaient à arriver en cortège sur la place du 20 Août. L’ambiance bruyante, braillarde et joyeuse, pour laquelle j’ai, d’habitude, beaucoup de tolérance et de compréhension (n’ayant manqué moi-même aucune Saint Nicolas lors de mes études, je l’avoue), m’est apparue terriblement choquante, moins de 10 heures après le drame. J’ai donc exprimé mon sentiment d’indignation face à ce que je considérais comme un festoiement déplacé à ce moment-là. Je l’ai dit spontanément et je le maintiens. La décence impose, me semble-t-il, que la mort d’un participant entraîne l’annulation des festivités.

Certes, les mauvais exemples abondent, de la mort de Senna à celle des victimes du Heysel, l’indécence s’est banalisée et va aujourd’hui jusqu’à la considération qu’il est normal qu’un groupe — vaste et hétérogène, je le concède — prolonge ce qui n’est somme toute que réjouissances et festivités malgré la gravité suprême de l’accident survenu. Les justifications entendues sont toutes édifiantes : « l’argent investi ne peut être perdu » ou « il serait dangereux de lâcher en ville une horde d’étudiants frustrés par l’annulation de la fête ». Ou encore, le plus consternant : « le défunt, on ne le connaissait même pas, personnellement ». Ces excuses sont évidemment de mauvaises excuses, qui, toutes, mettent en lumière une terrible confusion des valeurs.

A quoi rime donc la fête, si elle ne solidarise pas ?
Que devient la fête, lorsqu’elle est instrumentalisée par des intérêts financiers divers, par ailleurs externes au monde strictement étudiant, et pour lesquels seul compte la rentabilité ?
Quel est le sens de la fête si elle n’est que pur plaisir égoïste du moment ?
La valeur argent, la valeur plaisir, la valeur « tout, tout de suite », la valeur « moi d’abord » ont-elles remplacé aujourd’hui la valeur de la vie humaine et du respect de celle-ci ?

La cerise sur le gâteau fut l’intervention du monde politique, ou, plus précisément, celui des jeunes engagés politiquement, avec un extraordinaire communiqué de presse émanant des « Ecolo J – ULg », des « Etudiants démocrates humanistes (Edh) de Liège » et des « Etudiants Libéraux Liégeois (FELU) » et fustigeant l’irresponsabilité d’un recteur qui a osé blâmer les fêtards pour ce qu’il appelle de l’indécence. Et d’expliquer pourquoi la décision de continuer la fête était parfaitement décente, responsable et appropriée. A ceci s’ajoute le commentaire sur Facebook de l’incontournable Michel Peters : « L’irresponsable, aujourd’hui, c’est le Recteur de l’Université de Liège ! Il serait peut-être temps qu’il arrête de parler de ce qu’il ne connaît pas. On ne peut pas être malin en tout ! ». Curieuse déclaration d’un conseiller communal dont, évidemment, on connaît l’engagement en faveur de la guindaille et du folklore étudiant, mais dont on attendrait qu’il sache ce qu’est réellement le sens des responsabilités, de l’éthique élémentaire et du savoir-vivre.

Enfin, dans l’énorme débat qui suivit le « buzz » toute la semaine, on vit à nouveau apparaître une totale confusion. Ma déclaration portait exclusivement sur le caractère inapproprié, selon moi, de la prologation de la fête dans l’immédiate période de deuil. Je fus néanmoins rapidement accusé de vouloir combattre la guindaille et liquider le folklore étudiant. Encore une fois, je réaffirme que je ne suis pas opposé aux distractions de la vie étudiante, que j’ai salué la qualité du maintien de l’ordre et de la sécurité, tant par les forces de l’ordre, massivement mobilisées cette nuit-là, que par l’organisation elle-même. J’ai reconnu que l’accident était survenu en dehors de la durée et du périmètre de responsabilité des organisateurs ou de la police. On ne peut reprocher à une organisation tout ce qui va se passer par après. Ca ne viendrait d’ailleurs à l’esprit de personne si ces soirées n’étaient copieusement arrosées, ce qui, évidemment, augmente les risques. Je ne jetais donc la pierre à personne pour l’organisation de soirées, du cortège ou de rassemblements quelconques. Je ne rejette pas la fête. Je pense seulement qu’il y a un temps pour tout et que, parfois, les événements réclament deux comportements honorables: réserve et dignité.

Quelques commentaires récents sur l’article original du 2 novembre viennent nourrir le débat sur les atouts de l’accès libre.

A voir: présentation courte de l’Open Access Map par Alma Swan.

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