La Cité des Sciences et de l’Industrie, à Paris, est une initiative merveilleuse et une réussite incontestable. Elle a lancé un blog des enseignants, idée fort intéressante, ce blog étant essentiellement un forum de discussion sur des sujets variés.

Hélas, il arrive que la réalité soit consternante, et c’est le cas, entre autres, d’une discussion sur les hommes primitifs à ne conseiller à personne, si ce n’est à titre d’information sur les dangers que cela représente!
Du risque des forums ouverts, la pseudo-science pouvant même envahir les sites web apparaissant comme les plus sérieux…

L’expression libre de chacun est dans l’air du temps. Ce blog-ci n’échappe pas à cette mode, je le reconnais volontiers.
Mais il reste important que chacun — en particulier de jeunes étudiants — puisse savoir dans quelle pièce il joue. Sommes-nous sur un « blog des enseignants » ou sur un forum libre accueillant l’expression de n’importe qui?
Si les auteurs de ces petites perles sont des enseignants, la France va mal, son orthographe, sa grammaire et la rigueur de ses idées sont en voie de disparition.
S’ils ne sont pas des enseignants, alors le titre du blog est incorrect et prête dangereusement à confusion. Il laisse entendre à de jeunes lecteurs inexpérimentés mais avides d’informations que les idées exposées le sont par des enseignants et qu’elles sont aussi recevables que celles qu’on leur enseigne officiellement.

Je suis pour une expression libre, mais clairement identifiée, replacée dans son contexte. Chacun pourra ainsi juger de l’intérêt de prendre connaissance de l’avis de M. Tout-le-Monde sur la coexistence de l’Homme de Cro-Magnon et de celui de Néanderthal.

Qu’on ne se trompe pas: l’accès libre (Open Access) que je réclame n’a rien a voir avec l’expression libre des forums d’Internet. Il utilise le même outil, mais il doit garantir la qualité et le professionnalisme de ce qu’il offre au lecteur.
Nuance!

Curieux pays que la France, dont le Président mélange si étonnamment (certains diront: si astucieusement) gauche et droite, progrès et conservatisme, vie privée et vie publique… Maintenant, Eglise et Etat! Oubliant qu’il est le représentant officiel d’une République laïque par excellence, qui a établi clairement la séparation des Eglises et de l’Etat en 1905, il déclare cette semaine, en acceptant d’être fait « chanoine d’honneur » par le Pape au Vatican, que la République a besoin de croyants… On s’interroge sur les mesures qu’il compte prendre pour atteindre cet objectif!
Et dire que nous prenions la France en exemple chaque fois que nous déplorions une telle confusion en Belgique…

Je suis un fervent défenseur de la laïcité des Institutions publiques ainsi que du pluralisme, particulièrement en tant que recteur d’une université qui en fait sa marque et sa fierté. Mais si le pluralisme est bien l’acceptation des opinions de chacun et le respect du droit de chacun à les exprimer librement, il exige aussi de chacun de faire la distinction claire entre ses idées personnelles et les principes de l’Institution qu’il représente et au nom de laquelle il s’exprime.

Je suis de plus en plus sollicité par des professeurs qui désirent que je sanctionne des étudiants responsables de plagiat lors de la rédaction de travaux écrits personnels. Difficile de dire si la croissance de ce fléau est liée à la facilité du « copier-coller » informatique ou si c’est la détection qui bénéficie, elle, d’avances technologiques et des nouveaux logiciels de détection de copies. Il est d’ailleurs ironique que les deux phénomènes, attaque et contre-attaque, se développent simultanément.

On peut classer les différents cas en quatre catégories:
1. des idées originales sont reprises et énoncées comme provenant directement de l’imagination et/ou de la réflexion personnelle de l’étudiant;
2. des paragraphes entiers sont recopiés, sans citation;
3. des phrases isolées sont recopiées textuellement, en général dans les introductions, sans être attribuées à leur auteur, par ailleurs parfois cité;
4. des listes de références sont reprises sans citation de celui qui en avait préalablement publié la compilation.
Certes, tous ces cas sont répréhensibles, mais incontestablement à des degrés divers, et je les ai mentionnés par ordre décroissant de gravité, me semble-t-il.

Si je condamne sévèrement ceux qui se placent dans une des deux premières catégories (et qui plaident généralement coupable), je suis habituellement plus souple avec les deux dernières. Je ne vais évidemment pas prendre la défense des plagiaires, mais je m’interroge sur l’avertissement qui a été donné préalablement aux intéressés. Il me semble clair que cette problématique du plagiat ne leur a pas été exposée dans les moindres détails et qu’ils ne sont généralement pas de mauvaise foi lorsqu’ils prétendent n’avoir pas commis de faute volontaire. Ils pensaient « que cela pouvait se faire »…

Je me demande donc si une information sur la nature même du plagiat ainsi que sur ses tenants et aboutissants ne devraient pas être exposés à nos étudiants aussi tôt que possible. Il existe d’excellentes sources à ce sujet, qui font clairement la part des choses. Je recommande particulièrement la lecture approfondie d’un site internet remarquable à cet égard: www.plagiarism.org, riche en explications claires et en conseils intelligents destinés aux enseignants et leur permettant de minimiser les chances de voir se développer le plagiat dans les travaux de leurs étudiants. J’en recommande vivement la lecture à chacun, étudiant ou enseignant.
Une étude réalisée par une équipe croate montre que si les étudiants sont prévenus de l’application d’un logiciel de détection à leurs rédactions, le plagiat diminue significativement.
On pourrait espérer que, mieux encore qu’une mesure répressive (sans nécessairement que l’une remplace l’autre), une mesure préventive sous la forme d’une véritable éducation à la propriété intellectuelle puisse venir naturellement à bout de ces problèmes croissants.

La semaine a été très chargée avec, entre autres:
- la finalisation difficile du budget 2008,
- une réunion-fleuve de la commission des bâtiments,
- le C.A. du FRIA avec un beau résultat des candidats de l’ULg (25 % alors que notre « quota » de financement au nombre d’étudiant n’est que de 21 %),
- la première réunion de l’étrange (mais intéressant) « Groupe Wallonie-Bruxelles », très hétéroclite, étonné d’être là (on a été avertis par la lecture de la presse!), mais peut-être doté d’une chance unique de s’exprimer quant aux handicaps que notre système institutionnel francophone belge nous impose,
- une conférence de presse (n’intéressant guère celle-ci!) sur les investissements de la Communauté Française en recherche,
- la séance d’hommage à nos professeurs émérites et honoraires, longue car ils étaient 19 à nous quitter,
- un saut à Londres (magie de l’Eurostar) pour y introduire la journée d’étude des universités du Royaume-Uni sur les dépôts bibliographiques institutionnels en accès libre par une conférence sur EurOpenScholar,
- une réflexion approfondie sur l’avenir des écoles d’architecture dans le cadre de leur éventuel rattachement universitaire,
- un Conseil des Doyens sur l’évolution du personnel académique et scientifique des facultés en 2008
- et un colloque à présider dans ma spécialité scientifique.

Mais tout ceci est bien dérisoire face à la tragique réalité du décès d’une jeune fille de 20 ans qui était notre invitée dans le cadre des échanges européens Erasmus-Socrates.

Sofia avait quitté momentanément le soleil de Sienne pour les brumes du Nord. Pour venir suivre chez nous les cours de Philologie romane. Pour venir connaître et apprécier Liège et sa vie estudiantine. Pour se perfectionner, apprendre le français et aider à construire une Europe plus ouverte, plus libre et merveilleusement multiculturelle. Certainement pas pour y finir sa jeune vie sous l’étouffoir sournois du monoxyde de carbone, du « tueur silencieux » que nous redoutons tant pour nos étudiants en « kot » et qui fauche encore trop de monde à l’entrée de l’hiver. Et ceci malgré les appels à la vigilance et le souci constant que nous avons, depuis plusieurs années, avec la Directrice générale à l’Enseignement et à la Formation, Monique Marcourt et son équipe ainsi que mon Conseiller à la Santé, le Professeur Jean-Olivier Defraigne, d’avertir les jeunes ainsi que les propriétaires de l’immense danger que ce fléau représente et de la stupidité révoltante des accidents de ce genre.

J’ai écrit mon désarroi et ma tristesse aux parents de Sofia et au recteur de l’Università per Stranieri di Siena. Selon le Consul général d’Italie, nos services administratifs qui ont les étudiants d’échange en charge ont été parfaits, dignes et remarquablement efficaces vis-à-vis de la famille dans les moments tragiques qui ont suivi et je les en félicite. Mais à quoi sert-il d’être bouleversé lorsque l’irréparable s’est produit? Quels mots peuvent atténuer la douleur d’une famille face à une tragédie aussi insoutenable? Comment expliquer à ceux qui nous rendent visite que de tels accidents, dont les causes sont archi-connues, peuvent encore se produire chez nous? Que « ce sont des choses qui arrivent »?

J’ignore les circonstances précises de la mort de Sofia. Je n’accuse donc personne. Mais quoi qu’il en soit, ce n’est pas le premier drame de cette nature qui frappe nos étudiants, ni même nos étudiants étrangers. J’appelle donc la communauté universitaire tout entière, qui partage assurément ma profonde émotion, à participer à cet effort constant de vigilance, à diffuser les informations élémentaires aux nouveaux venus et à créer une prise de conscience collective de ce danger évitable. Je l’appelle aussi à manifester son indignation face aux négligences criminelles encore trop souvent tolérées, comme s’il était normal de faire de l’argent en louant à des étudiants des logements dont les installations de chauffage sont inadéquates ou facilement dérèglables. Il faut que cela cesse. Chacun de nous porte une petite parcelle de responsabilité dans le succès ou l’échec de cette mobilisation pour que toutes les Sofia d’Europe et d’ailleurs puissent désormais venir chez nous, apprendre à connaître et apprécier notre université, notre ville et notre pays, élargir leurs horizons et repartir bien vivantes, en ambassadrices dynamiques de notre Alma Mater, sans courir le risque stupide d’une mort absurde et intolérable.

Discours prononcé lors de la célébration du 20è anniversaire du CHU de Liège

Dans le discours qu’il prononça lors de l’inauguration de la première partie de l’Hôpital en 1985, le recteur Arthur Bodson exprimait son souhait de voir le CHU acquérir au autre nom, « Céhachu » n’étant guère joli — « Chu » (de « choir »!) comme le prononcent certains, encore moins — et CHU étant une appellation répandue dans les villes universitaires de la francophonie. Il lançait alors un appel aux suggestions, en demandant d’éviter « du Sart Tilman », qui eût accordé beaucoup d’honneur à ce Monsieur Tilman, « courageux défricheur de quelques arpents » disait-il, auquel est déjà dédié un village et puis, surtout, une université ! Je ne sais si personne n’a proposé d’idée intéressante, toujours est-il que le nom est resté et que, 20 ans plus tard, la question ne se pose même plus. Le CHU est, dans notre région et pour tout le monde, l’Hôpital universitaire et quand, de plus de 100 km à la ronde, on amène un malade ou un accidenté au CHU, chacun comprend clairement de quoi il s’agit.

Le U de CHU, c’est évidemment « universitaire ». Ce U a toute son importance pour le prestige de l’Hôpital. C’est ce qui le différencie de tous les autres hôpitaux, en ceci qu’il sert, non seulement d’institution de soins, mais également d’école de formation professionnelle des médecins qui font leurs études à l’Université de Liège, d’école d’application pour tous ses spécialistes en devenir. Pour le public en général, l’appellation « universitaire » suffit à garantir la qualité des soins et la certitude de se voir appliquer la médecine la plus avancée, la plus performante, la plus sûre.

Réciproquement, il n’est point d’université complète sans une faculté de Médecine, ni de faculté de Médecine sans hôpital. C’est d’ailleurs la question que me posent toujours mes interlocuteurs lorsqu’ils ne sont pas familiers avec notre université : « avez-vous un hôpital universitaire ? ». Le prestige d’une université est donc lié, en bonne partie, à l’existence d’une faculté de Médecine et donc d’un CHU.

Ainsi donc, si d’aucuns regrettent le manque de poésie de l’appellation, nul ne disconviendra que le U rappelle en permanence cette filiation. Filiation sûrement, car en effet, le CHU est enfant de l’Université. Et si, pour ceux qui s’en souviennent, l’accouchement ne se fit pas sans douleur, il donna naissance à un bébé qui ne tarda guère à faire ses preuves, certes en exigeant beaucoup de ses membres, car à ses débuts, le CHU se construisit sur de nombreux sacrifices, de nombreuses restrictions. Une logique d’entreprise dut immédiatement lui être appliquée, rupture douloureuse avec les habitudes acquises de longue date au sein de l’Université. L’application de cette logique était indispensable car il s’agissait de s’adapter à des conditions nouvelles, celles qui ont prévalu après la fin des golden sixties, après la crise dite « du pétrole » du début des années septante. Les responsables d’alors comprirent que cette adaptation drastique mais nécessaire ne pourrait s’accomplir qu’en dehors du giron de l’Université et c’est ce qui fit du CHU, la plus grande spin-off de l’Université de Liège.

Aujourd’hui, l’enfant a grandi, il a vingt ans. Les sacrifices ont porté leurs fruits et chacun peut maintenant en constater les effets avec satisfaction. Après les crises de croissance, l’enfance agitée, l’adolescence turbulente, l’enfant est devenu aujourd’hui adulte et sage. La sérénité acquise lui permet de réexaminer ses relations avec sa mère, son Alma Mater, et tous deux comprennent à quel point leurs sorts sont liés. Ils comprennent ce que synergie veut dire et combien ils seraient dramatiquement amoindris, l’un sans l’autre.

L’Université et le CHU sont, depuis 20 ans, des entités juridiques distinctes et indépendantes. Le cordon n’a cependant jamais été rompu. Le recteur et l’administrateur, ainsi que le doyen de la Faculté de Médecine, font ex officio partie du Conseil d’Administration du CHU. Le président et l’administrateur délégué du CHU sont invités permanents du Conseil d’administration de l’Université. Mais au delà de ces liens largement symboliques, une prise de conscience de plus en plus forte se fait jour : celle de la nécessité de resserrer les liens plus étroitement encore. C’est dans l’intérêt de tous. Nous vivons dans le même domaine, nous connaissons les mêmes problèmes et difficultés et nous gagnons à les résoudre ensemble.
C’est ensemble que nous voulons aborder la délicate question de la mobilité vers le domaine universitaire et au sein de celui-ci, avec ses corollaires en termes de trafic et de parcage (à l’exception de vous, Madame, tous ceux qui ont atteint cette salle aujourd’hui peuvent comprendre de quoi je parle !). C’est ensemble que nous voulons examiner l’harmonie entre enseignement et prestation de soins de qualité, avec les difficultés et contraintes que cela implique.

L’Université de Liège vient de mettre sur pied un des plus grands centres de biologie cellulaire et moléculaire à finalité biomédicale d’Europe : le GIGA. Près de 300 chercheurs et un incubateur d’entreprises y sont regroupés. Si quatre facultés y participent activement, c’est au CHU (entendu cette fois dans son acception originale, celle d’un centre qui regroupe à la fois l’Université et l’Hôpital) que nous avons décidé de l’installer, ce qui a permis de remplir la dernière des tours, restée vide suite aux péripéties des restrictions de la politique hospitalière fédérale qui n’ont cessé de compliquer à outrance l’évolution de cet hôpital, d’être amenée à la vie, améliorant ainsi grandement l’environnement immédiat. Mais cette proximité porte ses fruits dans les deux sens. Voici aujourd’hui le CHU flanqué d’un centre de recherche dont l’excellence est reconnue, appelé à se développer plus encore puisqu’il sera rejoint par d’autres centres de recherche qui vont s’y intégrer, en commençant par le centre de recherches en cancérologie expérimentale, qui deviendra « GIGA Cancer », et puis d’autres, je l’espère. Cette proximité est une aubaine pour le CHU. C’est aussi une aubaine pour le GIGA, pour deux raisons : la première est qu’elle permet et assure le contact permanent entre les chercheurs et la clinique, parachevant ainsi le processus de regroupement des différentes équipes auparavant dispersées sur le campus et dans la ville. La seconde est qu’une partie de l’originalité du concept du GIGA repose sur l’intégration d’entreprises en son sein même, valorisant ainsi au mieux les recherches qui y sont accomplies, et que ces entreprises trouvent une motivation immense à se développer dans le GIGA, d’une part en raison de la proximité avec les chercheurs fondamentaux, mais aussi en raison de la proximité de la clinique. Le Doyen et moi-même avons d’ailleurs des plans pour le développement d’un volet clinique au GIGA, ce qui complèterait magnifiquement et comme nulle part ailleurs, la fonctionnalité exceptionnelle de ce centre de recherches hors-normes.

Il s’agit ici, bien sûr, d’un exemple, mais il est tout à fait représentatif de cette relation qui, sans qu’il y ait la moindre raison pour un retour en arrière, doit redevenir de plus en plus étroite entre l’Université et « son » CHU. Nous sommes déterminés à continuer de nous y consacrer, nous sommes déterminés à faire de cette alliance une force considérable pour Liège et sa région.

Il a aujourd’hui 20 ans.
Longue vie au CHU !
Longue vie au couple indissoluble Université de Liège – CHU de Liège !

Visite de la Princesse Astrid au CHU de Liège. La presse opère…

Ce message m’est parvenu vendredi. Comme il ne constitue pas réellement un commentaire à un de mes billets, mais qu’il lance une réflexion extrêmement intéressante et qui me tient à cœur, j’en fais plutôt un nouveau billet et je tâche d’y répondre au mieux.

« Monsieur le Recteur,

Il y a quelques jours dans les médias flamands s’ouvrait un débat sur le manque d’initiative des étudiants flamands, notamment en terme de création d’entreprises. Ce même constat peut être fait dans le monde francophone.
Un professeur émérite de la KUL (Roger Blanpain) vient de réagir aujourd’hui par la publication d’un courrier de lecteur à la rédaction du « Standaard », dont je vous livre ici la traduction:

« Le manque d’initiative chez les étudiants tient beaucoup à la nature de notre enseignement et de notre formation. Quelques 50 ans d’expérience universitaire comme enseignant m’a appris que notre enseignement est orienté vers le conformisme (le prof a raison), la prise de note, des cours bloqués par coeur et débités de la même manière à l’examen. L’enseignement et la formation est peu ou pas du tout dirigée vers la créativité, la contribution personnelle, l’esprit critique, la résolution de problème ou la réflexion transversale, comme dans les bonnes universités américaines ou anglaises. Cela demandera une révolution de changer cet enseignement répétitif. Comme doyen de la faculté de droit de la KUL, j’ai consacré à l’époque mon attention aux exercices par petits groupes, la mise en place de séminaires et l’organisation de sessions pratiques. C’était largement insuffisant, car il existait trop de cours ex-cathedra. Pour devenir prof, un nombre d’heure d’enseignement doivent être prestées. De ce fait, beaucoup d’heures de cours sont imposées. Le travail personnel et la créativité sont rarement au rendez-vous. De plus, les séminaires et les exercices sont souvent délégués à de jeunes assistants dévoués mais souvent inexpérimentés, qui ne connaitront la musique que bien plus tard.
En bref, le manque d’initiative de nos étudiants ne m’étonne pas. Nous pouvons y faire quelque chose. Diminuer drastiquement le nombre de cours académiques et beaucoup plus stimuler le travail personnel axé sur la créativité. »

Etant l’un des premiers boursiers Erasmus de la faculté de Philosophie et Lettres (section Philosophie), je ne peux que confirmer cette analyse. A l’université de Hull, où j’ai séjourné un an en 1992, je peux témoigner que plus de la moitié des cours consistaient en travaux de lecture dirigés par petits groupes, où le rôle du professeur consistait plus à animer le débat et la réflexion entre les étudiants, qui chacun à leur tour devait préparer la leçon et se soumettaient ainsi à la critique de leurs professeurs mais aussi de leurs condisciples. Chaque étudiant était placé sous la protection d’un « tuteur », qui le conseillait de plus quant à ses lectures, quant aux choix de cours à option en fonction du désir profond de l’étudiant. Le mien était le Dr T.S. Champlin, dont le moindre mérite n’était pas de diriger le comité de lecture de la prestigieuse revue Mind. J’en garde encore aujourd’hui un souvenir ébloui.
L’organisation des examens était également très différente puisqu’ils consistaient en des dissertations sur des thèmes abordés dans ces cours et qui pour éviter tout favoritisme, étaient corrigés à l’aveugle par des professeurs externes.

A l’appui encore de ce constat, j’aimerais ajouter que mes deux parents se sont rencontrés et mariés au cours de leur spécialisation médicale à l’université Johns Hopkins de Baltimore dans les années 60. Ma maman y a même exercé des responsabilités importantes au sein de la faculté et participé à des recherches déterminantes en anesthésiologie (son professeur, le docteur Safra a inventé la réanimation cardio-pulmonaire et l’aide médicalisée urgente). Tous deux partagent cette analyse et particulièrement mon père, qui était diplomé en médecine de l’ULG et qui a donc expérimenté comme moi les deux méthodes de travail.

Bien plus que le ranking de l’ULG ou son système de classement des contributions scientifiques, l’ULG devrait prioritairement s’intéresser à sa méthode de travail et d’enseignement.

Très respectueusement,

Philip Hermann

PS: Je vous félicite, par ailleurs, pour l’excellente initiative que constitue ce blog, qui démontre votre volonté de sortir du cadre académique traditionnel. Ce qui m’a incité à y poster ce message.

Cher Monsieur Hermann,

Vous ne pouvez certainement imaginer à quel point votre message me fait plaisir. Tout autant que l’intervention du Professeur Blanpain qui exprime assez exactement ce que je pense.
Nous vivons dans un système universitaire qui, il faut le reconnaître, évolue dans le sens que vous préconisez, mais encore trop lentement et très inégalement d’une faculté à l’autre.

Le mécanisme de financement public de nos universités (publiques ou non) est exclusivement basé sur le nombre d’étudiants, mais en interne, l’allocation des ressources aux facultés et départements — en particulier les ressources humaines (assistants, staff administratif et technique) — qui est largement basée sur des traditions historiques lointaines et désuètes, tient compte à la fois du nombre d’étudiants et du nombre de cours et d’heures de cours. Une vieille culture encore tenace persuade les universitaires que leur importance, leur prestige et leur valeur sont liés au nombre de cours et d’heures de cours qui leur sont confiés et ils multiplient ce nombre d’heures, si ça leur convient, par le nombre d’étudiants. Cette tradition a pour conséquence une augmentation déraisonnable du nombre de cours et des heures associées.
La réforme dite « de Bologne » a légèrement modifié les choses en remplaçant les heures de cours par des crédits transférables entre universités européennes. Mais l’effet est minime. L’importance du professeur reste trop souvent mesurable, à ses yeux, par le produit « nombre d’ECTS x nombre d’étudiants.
Bref, la conclusion que Roger Blanpain et vous-même tirez est la bonne: l’effet pervers du système universitaire actuel est la multiplication des cours et formations, moins dans l’intérêt des étudiants que dans celui de la carrière ou l’ego de leurs enseignants.

Cependant, les choses ne sont pas si simples. Cette dérive, constatée et dénoncée sans relache par mon prédécesseur qui parlait de « l’université aux 6.000 cours » (il faut toutefois noter que ce phénomène n’était pas propre à l’ULg, loin de là), a été fortement enrayée, mais par des mesures plus ou moins coercitives et basées sur une diminution uniforme des allocations de ressources: on s’est tous « serré la ceinture ». Aujourd’hui, les choses allant déjà mieux, une autre approche s’impose: celle d’un calcul plus juste, tenant mieux compte des réalités et des spécificités particulières et décourageant la multiplication des cours et l’allongement du temps de « bourrage de crâne ». On ne peut plus éviter d’affronter de face la question de la multiplication des enseignements qui permet de créer des charges sur mesure et d’assurer aux bons serviteurs de la maison un statut de professeur. Que les étudiants, dans la structure de leur cursus d’études, soient victimes de cette pléthore, n’est pas acceptable.

Si toutes les pratiques anglo-américaines ne doivent certainement pas être adoptées aveuglément, il est clair qu’un système de formation (plus encore que d’enseignement) qui fasse appel au sens de l’organisation , aux qualités d’initiative et d’autogestion des étudiants est un objectif majeur.

C’est pourquoi j’ai dit, lors de la Rentrée Académique dernière, que j’ambitionnais pour mon université d’être une institution dont on sortirait: 1) au moins bilingue, 2) doté d’un bagage de mobilité internationale mais aussi 3) formé à l’auto-apprentissage et à l’aptitude à la recherche autonome du savoir.
J’en ai déjà longuement parlé ici, il importe aujourd’hui de réexaminer la charge d’enseignement et aussi les méthodes. Si l’ex cathedra possède quelque vertu, c’est néanmoins une formule risquée, qui ne présente de qualités qu’avec les grands ténors du tableau noir. Dans ce cas-là, la transmission par le « maître » peut en effet être très marquante pour l’étudiant. Mais il n’en est pas moins vrai que la formation idéale est celle qui donne à l’étudiant les vrais outils qui l’aideront à développer ses capacités personnelles et qui lui permettront de s’épanouir par lui-même.

Ceci nous amène donc à une profonde réflexion sur les modes de formation et à une remise en question du mode d’allocation des ressources aux différents départements, voire même à une autre organisation de l’université. J’aurai l’occasion d’y revenir durant cette année académique, pendant laquelle je compte proposer les réformes correspondantes.

A la demande de l’Université Polytechnique de Valence (Valencia), je me suis rendu cette semaine au colloque du CALSI (Contenidos y Aspectos Legales en la Sociedad de la Información) sur la communication informatique. Il m’était demandé d’y faire une présentation générale sur les principes de l’Open Access et des dépôts institutionnels, ainsi que sur l’initiative EurOpenScholar.

Les nombreuses questions et le débat animé qu’a suscité cette présentation m’ont clairement indiqué combien les esprits des chercheurs eux-mêmes ne sont pas encore prêts à adopter les nouvelles normes ni, en particulier, à se laisser imposer le dépôt institutionnel obligatoire. Ce qui est surtout intéressant, c’est de voir à quel point cette résistance est liée à une méconnaissance du sujet et surtout à un ensemble de confusions, de malentendus et d’idées reçues.

Mais sans doute devons-nous balayer d’abord devant notre porte. Si tant de confusions persistent, c’est sans doute parce que nous expliquons mal. Un petit survol, de nouveau, n’est pas inutile car il n’y a guère de raison qu’on ait mieux compris ici que là-bas. Et le tempérament latin, qu’on dit rétif, est aussi largement le nôtre! Mais il est des circonstances où on doit savoir se plier à des règles, il suffit de comprendre qu’elles jouent en notre faveur, à terme.

La première confusion consiste à penser que l’OA vise à remplacer le système actuel de publication avec revue par les pairs par une sorte de communication directe de chercheur à chercheur, sans garantie de qualité. Il faut bien comprendre que l’OA vise à mettre en accès libre et en ligne les articles tout aussi bien revus par des pairs. Le reviewing process n’est nullement en cause dans l’OA.

La seconde concerne les dépôts institutionnels (Institutional Repositories) et le fait qu’on veuille les rendre obligatoires.
Et là, il faut bien expliquer. Ils ont un intérêt de deux ordres.

1. En déposant le texte complet, dans la dernière version d’auteur, le chercheur assure la disponibilité de ce qu’il a de plus important à dire, à faire savoir. Les dépôts institutionnels sont le réel moyen de faire avancer le monde de la communication du savoir, en particulier du savoir dont la transmission ne souffre pas de délai et qui intéresse un nombre immense de spécialistes. Pour qu’ils remplissent bien leur rôle, il faut que les articles qui y sont déposés disposent de la qualité qu’assure le peer reviewing. Petit à petit, on voit se développer des revues qui publient en accès complètement libre (qu’il y ait aussi une version papier ou non). Mais les éditions traditionnelles existent toujours et les chercheurs souhaitent encore y publier leurs travaux. Fort bien. Rien de plus simple donc, lorsque l’article est accepté pour publication, que de le mettre sur le dépôt et, dès que l’éditeur choisi l’autorise (de plus en plus le font après une période d’attente de 6 mois), de le rendre accessible par accès internet direct. Et pendant la période d’embargo, le texte peut être obtenu sur simple demande, exactement comme l’est et l’a toujours été également un « tiré-à-part ». Comment savoir que cet article existe? Tout simplement en utilisant un des nombeux moteurs de recherche que tout le monde connaît, ou leur version plus spécifiquement scientifique lorsqu’elle existe (je parle de Google Scholar, évidemment), ou encore ceux qui se consacrent tout particulièrement à l’accès libre, à partir de mots-clés significatifs.
Cette manière de procéder, sans atteindre l’OA complet, permet néanmoins à chacun d’accéder rapidement à l’information et de l’utiliser pour faire avancer ses propres recherches. Et plus le nombre de lecteurs est grand, plus les chances d’être cité sont grandes et c’est bien là que réside la mesure de l’impact réel du chercheur sur la communauté de la recherche et sur le monde.

2. Les dépôts institutionnels constituent une vitrine pour les universités et les centres de recherche, en cela qu’ils permettent de montrer ce que les chercheurs font de plus important dans leur vie de chercheur. Ils correspondent, en plus moderne, en plus efficace et en infiniment mieux diffusé, aux rapports annuels et autres liber memorialis qui ont depuis longtemps abandonné l’exaustivité des publications des chercheurs.
Beaucoup de gens me demandent si j’ai pensé à un moyen de faire monter notre université dans les rankings qui aujourd’hui, comme chacun sait, sont largement basés sur la notoriété. En voilà un. Le meilleur probablement. Il serait dommage que ce soit justement les mêmes qui posent cette question et qui refusent de se plier à la discipline du dépôt, donc de la mise en évidence du produit essentiel de leur travail!
Nous nous employons à rendre la manœuvre de dépôt aussi aisée et conviviale possible, et surtout, de faire en sorte qu’elle ne doive être opérée qu’une fois, la communication à d’autres organismes (organismes finançants, dont le FNRS) soit quasi automatique et ne nécessite pas de réencodage.
Les dépôts institutionnels permettront également l’évolution rapide des évaluations de la recherche, par le développement de nouveaux outils plus significatifs de l’impact réel du chercheur. C’est ce que nous voulons faire progresser avec l’initiative EurOpenScholar dont j’ai déjà parlé. Toutes les bonnes volontés compétentes en matière de « Scientométrie » sont évidemment les bienvenues pour nous y aider.

Enfin, ceux qui résistent à toute idée d’obligation qu’ils disent ressentir comme une violence se sont-ils demandé si le plus contraignant, c’était de devoir se plier au principe du dépôt institutionnel ou bien de subir les effets d’une règle à laquelle ils se soumettent sans discuter ni réfléchir, provoquant bien des abus: « publish or perish », l’obligation de publier beaucoup et à haute fréquence qui conditionne l’avancement de leur carrière ?

Dans la revue The Scientist (que je mentionnais il y a peu pour avoir classé la Belgique au premier rang des pays de cocagne pour la recherche) paraissait, il y a quelques jours, un article de Joseph J. Esposito, consultant spécialiste en éditions scientifiques, article rempli de contre-vérités qui indiquent clairement le conflit d’intérêt que représente son intervention dans un tel journal. Le débat qui suit son article (merci à The Scientist de publier tout ce courrier fort édifiant) reflète la réaction de nombreuses personnes qui relèvent dans l’article tous les poncifs présentés par le lobby des grands éditeurs dont j’ai déjà souvent parlé et dont les méthodes rappellent curieusement et tristement celles des lobbies du tabac. Heureusement, ici au moins, on ne joue pas avec la santé des gens, seulement avec l’argent de la recherche.

En résumé, il pense (dans une interview radio podcastée où il s’exprime suite à son article) que l’OA est le spam de la recherche…
Il pense que ce qui manque aux chercheurs, ce ne sont pas les moyens nécessaires pour acheter les revues (dont, soit dit en passant, le prix moyen a triplé pendant que l’index des prix à la consommation augmentait de 30 %), mais c’est le temps de les lire et que, par conséquent, augmenter par internet le nombre d’articles à lire serait un cauchemar, impliquant ainsi que la sélection par l’argent est la bonne sélection. Il oublie que les moteurs de recherche nous indiquent les articles, mais qu’on peut juste en apercevoir le titre et parfois le résumé: pour lire l’article, il faut souscrire.
Il pense qu’on n’a qu’à être dans une « bonne » institution qui a des moyens, pas dans une petite institution qui fait ce qu’elle peut face aux prix pratiqués, pas dans un pays en développement, et il appelle ça des « exceptions », ce qui est risible. Aucune université au monde ne peut s’offrir les 25.000 revues à révision par les pairs qui existent aujourd’hui.
Il pense que l’OA consiste à éviter la révision par les pairs et n’est donc réservé qu’à une science de mauvaise qualité, ce qui est absurde. Le peer reviewing est au départ une affaire de chercheurs, pas d’éditeurs. Ce sont d’ailleurs forcément des chercheurs qui révisent!
Il pense que les défenseurs de l’OA font du lobbying, oubliant que le lobbying, c’est lui et ses consorts payés par les multinationales de l’édition scientifique qui le pratiquent. Nous, nous essayons bénévolement de défendre une diffusion large du savoir.
Bref, un véritable florilège !
Il pense décidément trop, ce monsieur, et mal. Si ce n’est qu’il est payé pour dire ce qu’il dit.

Les adversaires de l’Open Access, dont l’opposition est souvent due à des intérêts personnels et commerciaux*, entretiennent savamment quelques mythes. Dans son blog, « Journalology », Matt Hodgkinson nous les rappelle:

1. Le coût qu’implique la mise à disposition de chacun en accès libre des publications de recherche va réduire la disponibilité des fonds pour la recherche elle-même. FAUX.
2. L’accès ne pose pas de problème. Pratiquement tous les chercheurs ont accès à toute la littérature scientifique. FAUX.
3. Le public peut accéder à tous les articles publiés en s’adressant à une bibliothèque ou via un prêt interbibliothèque. FAUX.
4. Les patients n’arriveraient pas à s’y retrouver si on laissait toute la littérature médicale à leur disposition librement sur le web. FAUX.
5. L’OA est une menace à l’intégrité scientifique en raison de conflits d’intérêts liés au paiement pour publier. FAUX.
6. Les pays pauvres ont aujourd’hui accès à la littérature biomédicale. FAUX.
7. Les articles imprimés sont plus clairement accessibles que ceux qui sont en OA. FAUX.
8. Un journal de qualité majeure comme Nature devrait demander à ses auteurs un paiement équivalent à 15 à 45.000 € si elle devait se convertir au modèle de l’OA. FAUX.
9. Il faut bien que les éditeurs fassent un profit énorme si on veut soutenir l’innovation. FAUX.
10. Les éditeurs doivent détenir les droits d’auteur afin de protéger et garantir l’intégrité des articles scientifiques. FAUX.

*Exemple particulièrement choquant: l’article publié par Rudy M. Baum, éditeur en chef de la revue Chemical & Engineering News de la célèbre American Chemical Society (ACS) dans lequel, un comble pour une soi-disant « société savante » qui ne devrait prendre en considération que l’intérêt général, il qualifie la communication scientifique en accès libre de « socialized Science », l’accusant de faire reposer sur l’Etat la totalité du processus de recherche. Il est clair qu’à ses yeux, une science « socialisée » a tous les défauts que permet d’éviter une science privatisée. A voir. Voilà bien des propos déontologiquement inacceptables lorsqu’on connaît les bénéfices engrangés par l’ACS et sa revue, déjà épinglée dans ces lignes dans le passé pour son « cheval de Troie », Author’s Choice, un faux OA où l’éditeur se fait payer deux fois.

A lire, l’excellent commentaire (en pdf) de mon collègue Philippe Vincke, recteur de l’ULB, probablement le mieux placé des recteurs d’universités belges francophones pour critiquer la désastreuse méthodologie du THES (voir billet précédent), puisque son institution avance de 11 places dans le classement…

A titre indicatif, le graphique ci-dessous donnera, mieux que tout discours, une idée du manque de fiabilité de la méthode.

Pour bien comprendre, il faut savoir qu’en 2004, il existait une confusion entre les universités francophones et néerlandophones de Bruxelles et de Louvain, qu’en 2006, l’ULB a pâti d’une erreur des enquêteurs qui lui ont attribué un nombre d’étudiants double de la réalité, l’ULg, elle, bénéficiait d’une erreur qui plaçait son minerval étudiant à 0 € (au lieu de 759 € !) alors que ceux de l’ULB et de l’UCL étaient rapportés à 6.250 € et 5.200 € respectivement! Et comme je l’ai déjà dit dans le billet précédent, trois de nos facultés ont été « omises » en 2007. Sans compter les erreurs non détectées.

Tout ceci laisse peu de crédit à cette évaluation, si ce n’est qu’à la « grosse louche », les 3 universités complètes de la CFB sont dans le top 300 (sur 5.100 universités), ce qui est plus qu’honorable) et confirmé par le classement de Shanghaï en 2005.

Et là-dessus, le magazine The Scientist, dans son enquête de novembre 2007, place la Belgique en n°1 des pays où il fait bon faire de la recherche, devant les USA et le Canada! Sans toutefois préciser si c’est en Flandre ou en Communauté française… ;-)

Nous sommes bel et bien entrés dans l’ère des hit parades.

« Page précédentePage suivante »