Certains me reprochent gentiment de défendre mon université comme un tigre ses petits. Sans doute n’ont-ils pas tort. Il serait bien dommage qu’il n’en fût point ainsi.
Mais si je suis prompt à embrocher l’un ou l’autre chercheur d’une autre université qui tire de ses travaux des conclusions hâtives ou excessives, ou l’un ou l’autre journaliste qui fait écho à de telles études sans grand discernement — ça m’est arrivé quelques fois ces derniers temps, je le reconnais ! — je dois aussi savoir réagir lorsque des énormités émanent de ma propre Institution.
Ce vendredi, annonce-t-on, le Vif/L’Express sortira un article basé sur les calculs d’un chercheur de l’ULg qui a passé son temps à évaluer la quantité de CO2 qui sera émise dans l’atmosphère lors du Grand Prix de Formule 1 à Francorchamps ce week-end : 8.500 tonnes selon lui.
On aime ou on n’aime pas la F1, peu importe. Mais ici encore, que penser de la rigueur scientifique d’une étude qui jette en pâture au public des données qui mélangent allègrement les émissions de gaz par les bolides en course et celle des spectateurs venus sur le site en voiture. Ceux-ci produiraient à eux seuls 82 % de ce montant…
Si l’on enlève de ce qui reste les émissions de la presse et ses 500 journalistes (7,4 % du total) et les équipes techniques (5,9 %), la course de F1 proprement dite ne rejettera que… 0,64 %. Dérisoire.
Soyons clair : je ne remets pas en question la rigueur éventuelle du calcul, mais comme chaque fois, l’usage qui en est fait et le propos qu’on lui fait servir. Je me réjouis de lire l’article. Ou je me trompe fort, ou il fustigera les nuisances de la F1. Car exprimé en tonnes, moins de 1 % peut faire grosse impression.
Mais peut-être au contraire posera-t-il judicieusement la question de savoir quelles sont, par comparaison, les émissions lors du passage d’une étape du tour de France ou lors d’un match Standard-Anderlecht ou d’un concert des Rolling Stones… Ou sur l’autoroute de la mer par un beau week-end ensoleillé.
Tout problème mal posé génère des réponses inutiles. La vraie question est celle de l’automobile de chacun, la course elle-même ne polluant même pas 100 fois moins que le public qui vient la voir !
Et pour être complet, notre chercheur a-t-il compté l’électricité dépensée par le demi milliard de téléviseurs qui vont être allumés à cette occasion et diffuser dans le monde entier une image positive de la Wallonie ?