Pour moi, pendant de longues années, n’étant pas un habitué du Bazar de l’Hôtel de Ville, BHV a signifié Bovine Herpesvirus, une famille de virus affectant les bovidés, cousine de nos virus de l’herpès, de la varicelle et du zona ou de la mononucléose infectieuse. Un objet de frayeur, à combattre et détruire.
Aujourd’hui, les nouvelles quotidiennes belges lui ont donné une tout autre signification. Celle d’une autre forme d’objet. Un objet à détruire, aux yeux de certains, ou tout au moins à scinder, ce qui revient au même. Mais ceux-là donnent à leur obsession une importance disproportionnée qui paralyse l’essentiel de la vie politique du pays.
Le virus BHV rend les bovins malades, le hérisson BHV affecte le fonctionnement, l’économie, la crédibilité internationale de la Belgique.
Ces querelles n’ont jamais affecté les relations entre universitaires des deux communautés, particulièrement pas au niveau des relations individuelles qu’on peut avoir. Mais aujourd’hui, on ressent de plus en plus souvent un malaise, on entend des réflexions, des commentaires qui trahissent le plus souvent une méconnaissance de l’autre, des a priori erronés, indiscutablement dérivés d’une propagande démagogique qui finit par faire mouche. Malaise très perceptible au moment où tournait la pétition Savebelgiumresearch en faveur de la recherche collective belge, quand, hormis l’Université de Gand qui signait massivement, exhortée par son recteur Paul Van Cauwenberghe, on sentit très clairement une frilosité dans les autres institutions. Je reçus plusieurs messages de chercheurs soutenant le principe mais n’osant pas signer et un bon nombre d’autres chercheurs qui disaient en substance: on préfèrerait avoir plus d’argent et travailler de nôtre côté plutôt qu’un peu moins et travailler ensemble. Décidément, la solidarité, certains n’en ont rien à faire, même si elle peut apporter un « plus » évident en matière de qualité de recherche. Absurde et simpliste.
Je me suis promis de ne pas entamer de débats politiques dans ce blog, mais il est des moments où on est écœuré de n’entendre, dans quelque pays qu’on visite, que des questions sur les incertitudes de la vie politique belge et sur les outrances de certains partis, incompréhensibles pour la plupart des gens dans le monde.
Quel gâchis.
Peut-on rester indifférent lorsqu’on réalise la stupeur que les revendications extrémistes flamandes, qui déteignent de plus en plus sur une partie de la population, déclenchent dans le monde universitaire mais aussi partout dans le monde ?
Peut-on, en particulier, ignorer un article récent du New York Times sur lequel le journaliste indépendant Charles Bricman attire notre attention dans son blog et qui dévoile un constat d’une implacable clairvoyance: « That combination of national pride, rightist politics, language purity and racially tinged opposition to immigration is a classic formula these days in modern Europe, what critics call a kind of nonviolent fascism ».
Glaçant, non ? Nos collègues flamands qui pensent autrement — et il y en a, beaucoup même, je pense — vont-ils longtemps supporter cet amalgame ?