Abondamment pressé d’expliquer plus clairement ce qui se passe dans la saga des « reçus-collés », je romps le silence que je m’étais imposé à cause du désagréable sentiment que j’avais de ne plus jamais parler que de la même chose.

Dernier feuilleton (j’en profite pour rétablir les chiffres variablement repris dans la presse, chiffres qui, ici, ne concernent que l’ULg):

• Juillet: 130 étudiants satisfont aux exigences universitaires, 90 attestations sont délivrées, comme prévu par le décret dit « du numerus clausus« .
• Après la délibération: ajout de 22 (=112) par un arrêté ministériel, le Jury redélibère et les accorde.
• Août: le Conseil d’Etat ordonne la délivrance de 16 attestations supplémentaires (=128), à prélever sur la quota de 2008-2009; le Jury redélibère et les accorde. Il reste 2 « reçus-collés ».
• Onze étudiants satisfont aux exigences universitaires en 2è session. Ils sont automatiquement « reçus-collés ». Donc 13 en tout.

L’idée annoncée par des hautes personnalités politiques de faire en sorte qu’il n’y ait pas de « reçus-collés » cette année n’est que très partiellement réalisée, d’autant que le même phénomène se produit à l’UMH, à l’ULB et aux FUNDP. Seule l’UCL, où le taux d’échec est suffisamment élevé, échappe aux reçus-collés et fait cadeau de ses attestations surnuméraires aux FUNDP, membres de son académie, comme le décret le prévoit, sans toutefois arriver à les « sauver » tous.

Des « reçus-collés » à Mons, Bruxelles, Namur et Liège intentent des actions et introduisent des recours dans les tribunaux de Première Instance ou au Conseil d’Etat contre leurs universités et contre la CFB. La cible de ces recours est en réalité le principe-même du numerus clausus.

On attend.

Puis voici les premières salves: l’auditeur du Conseil d’Etat donne raison à deux étudiants de Namur, le président du tribunal de première instance de Liège donne raison à une étudiante, sur base d’une « apparence d’illégalité » du décret imposant le numerus clausus. On verra ce que le jugement sur le fond décidera. En attendant, elle est en 2è bac. Quant au Conseil d’Etat, il a confirmé aujourd’hui l’analyse de son auditeur et s’est clairement prononcé, cette fois-ci, sur l’illégalité du numerus clausus au regard de la Constitution et du Pacte international de New York en 1966 (il renvoie toutefois la question préjudicielle à la cour constitutionnelle).

Soyons lucides: aujourd’hui le numerus clausus au début des études de Médecine en CFB est mort. Qu’il repose en paix. Et tant mieux pour les étudiants capables de vaincre les épreuves universitaires, qui se sont battus contre eux-mêmes et non contre les autres. Je m’en réjouis.

Cependant, au terme (?) de cette épopée, j’aurai au moins appris que, dans notre pays, on n’a pas le droit (sous peine de condamnation) d’appliquer un décret si on lui trouve une « apparence d’illégalité ou d’anticonstitutionnalité » ou simplement si on le trouve « inefficace ». Mon étonnement révèle sans doute l’étendue de mon ignorance en matière juridique, mais je suis sûr de ne pas être le seul à m’étonner. Je n’ose imaginer le désastre auquel la stricte application de ce principe pourrait mener…