Mardi 22 mars 2011


English version below.

La « 2011 CIHE Engineering & Manufacturing Task Force », établie l’an dernier par le « Council for Industry and Higher Education » au Royaume Uni, dans son rapport inaugural, presse les universités de partager leurs idées gratuitement. Leur slogan: « Powering Up; Business and Universities Collaborating for Manufacturing Competitiveness in the New Industrial Revolution ».

L’idée est de demander aux universités du Royaume Uni de mettre généreusement leur savoir à disposition et de distribuer gratuitement leurs idées. Le CIHE affirme qu’en dépit de nombreux succès, les universités dépensent plus de 50 millions de livres sterling par an pour breveter leurs idées, dont beaucoup sont sans valeur commerciale, dit-il.

Pour moi, il s’agit ici d’un véritable braquage. Et de surcroît, on surfe sur la popularité croissante de l’Open Access (OA), dont il se trouve que je suis un supporter enthousiaste. Mais il s’agit ici d’une vision distordue de l’OA qui nous ramène loin dans le temps, aux temps heureux pour l’industrie, lorsque les données produites par les universités pouvaient être allègrement transférées au privé pour des cacahuètes.

L’OA, ce n’est pas cela. En aucun cas il n’interfère avec la propriété intellectuelle ni ne force à y renoncer. Si un brevet doit être pris, que l’on publie en OA ou non ne fait pas la moindre différence. Et il est choquant de constater qu’une institution respectable comme le CIHE tente de tirer profit d’un mouvement majeur au sein du monde scientifique pour semer la confusion chez les chercheurs et les gestionnaires des universités sur un sujet essentiel. S’il est vrai que la recherche réalisée avec les deniers publics doit être rendue publique, cela n’empêche en rien la prise de précautions en matière de brevets et de licences d’exploitation. C’est trop de pointer son nez maintenant, à la faveur d’un nouveau concept d’accès libre très en vogue, de demander que toutes les barrières tombent et de se servir dans l’étalage gratuit des informations de recherche.

Je l’ai dit, je suis un enthousiaste de l’Open Access, mais dans un contexte bien défini, où la propriété intellectuelle est pleinement respectée. Les universités ont trop longtemps abandonné à d’autres le profit de leur travail et leurs découvertes. Depuis quelque temps, elles ont appris à les garder pour elles et à ne les laisser partir vers l’exploitation qu’avec précaution et sur base de contrats clairs. Elles ont, par ailleurs, réagi fortement contre une exploitation éhontée du marché des publications par des requins féroces, ce n’est pas le moment d’abandonner tous ces progrès et d’être abusés sur la signification de l’accès libre, en faisant à quiconque le cadeau du fruit de leur travail.

The 2011 CIHE Engineering & Manufacturing Task Force, established last year by the Council for Industry and Higher Education in the UK, in its inaugural report, is urging universities to share ideas freely. Their motto: « Powering Up; Business and Universities Collaborating for Manufacturing Competitiveness in the New Industrial Revolution ».

The idea is to ask « UK universities to open their knowledge banks and to give more of their ideas away free of charge ». They claim that, « in spite of many successes, universities are spending more than £50 million a year patenting ideas, many of which are commercially worthless ».

To me, this looks like as a total rip-off. And, in addition, it is surfing on the more and more successful wave of Open Access, of which I happen to be a strong supporter. But this is a distorted view of open access, that is taking us back a long way, to the happy times for industry, when data produced by universities were freely transferred to industry for peanuts.

This is not what Open Access is all about! Open access does not interfere with intellectual property. If any patent has to be taken, whether you publish in the traditional mode or in Open access does not make the slightest difference. It is shocking to realise that a respectable institution like CIHE is trying to take advantage of a major revolution in scientific research to sow confusion among researchers and university managers on an essential topic. Although it is true that research done with public resources should be made publicly available, this by no means precludes the other necessary precautions in terms of patenting and licensing. It is all too easy to jump in now and, based on a trendy concept of open access, ask that all walls fall and just help oneself in a free market of scientific data.

As I said, I am a strong supporter of Open Access, but in a very well defined context, where intellectual property rights are perfectly secured. Universities have given away for too long the profit of their work and discoveries. For some time now, they have secured that quite well. They have reacted strongly against crude exploitation by some sharks in the publishing market, this is not the time to relinquish all this progress and be lured by the term « open access » giving away the fruits of their labour.