novembre 2006


L’heure des choix arrive.
Bien sûr, l’heure sera longue, une université ne fait pas ses choix en un instant, ni dans la précipitation, mais l’annonce faite lors de ma deuxième rentrée académique : « se définir » doit s’accomplir durant cette année, partout où nous pouvons le faire.

Durant l’année académique 2005-2006, certaines options avaient été prises d’emblée, certains principes avaient été acquis, tels que celui de rendre à l’ULg son rôle moteur dans le domaine culturel, celui de prendre des mesures significatives au plan social, de renforcer les structures de recherche et d’aide à la recherche, de mieux doter les supports pédagogiques et de simplifier les mesures administratives.
On pouvait, en effet, prendre de telles mesures d’emblée, sans recourir à une vaste consultation ni à une évaluation, interne ou externe.
J’ai eu l’occasion, dans mon discours de rentrée, de faire le point sur tous les accomplissements déjà réalisés ou en cours de réalisation (http://recteur.blogs.ulg.ac.be/?page_id=82).

Aujourd’hui, nous devons nous définir et annoncer clairement qui nous voulons être, quelle sorte d’université, avec quels atouts, quels points forts. Je résumerai en une question : qu’est-ce qui, à l’ULg, est spécifique et original, au plan international ou au plan de la Communauté française de Belgique ?

Je sais que je devance, en prenant cette position, les conclusions à tirer des différentes phases du regard porté par l’Institution sur elle-même (autoévaluation, évaluation, tables rondes, enquête) mais, pour ce que nous en savons déjà, il n’y aura pas de surprise à cet égard.

Quels peuvent être les éléments qui confèrent à une université sa réputation et son attractivité, tant pour les étudiants que pour les chercheurs et les enseignants ?

- sa structuration : la localisation géographique; l’organisation du ou des campus; la mobilité et les transports entre les sites et entre l’université et la ville; la beauté et le confort du ou des sites; l’accessibilité des bâtiments; la disponibilité des locaux, des auditoriums, de salles d’étude pour étudiants; la convivialité des lieux de détente; l’accès à des magasins, des lieux de spectacle, des restaurants bon marché de qualité, des cafétarias, etc.; les possibilités de logement, même temporaire.
- sa recherche : une qualité de niveau international reconnue dans des domaines pointus, une originalité qui fait que l’on associe cette recherche à l’Institution, des capacités d’accueil de chercheurs internationaux dans des structures dotées de moyens significatifs et compétitifs compte tenu du domaine de recherche considéré, une dynamique et une masse critique de chercheurs qui identifient l’université comme un centre de compétence dans le domaine, de dimension suffisante pour pouvoir établir des relations efficaces avec le monde extérieur, le monde industriel, le monde des entreprises en général, qu’elles soient privées ou publiques, permettant ainsi un apport financier significatif aux recherches fondamentales sans déteriorer ou étouffer celles-ci.
- son enseignement : une qualité réputée, mesurée par des indicateurs structurés et modernes (sans tomber dans le travers du remplacement systématique des méthodes d’enseignement par des nouveautés à la mode), mesurée par une évaluation complète ne se limitant pas à l’avis des étudiants mais tenant compte, parmi d’autres éléments, de celui-ci; un éventail large de techniques pédagogiques venant en aide aux étudiants et chaque fois idéalement adaptées aux circonstances et aux objectifs; un lien direct avec la recherche, par conséquent un choix des orientations spécialisées basé sur l’excellence en recherche, ce qui implique une sélection des domaines enseignés basée sur les spécificités locales.

On le voit, se définir, c’est aussi décider ce que l’on garde et ce que l’on sacrifie.

D’aucuns me disent que mon affirmation : « on ne peut faire tout partout » est abusive et que, dans notre grand jardin, il faut savoir tout cultiver.
Ma réponse serait oui, si nous disposions de suffisamment de jardiniers. Mais hélas, ce n’est pas le cas et il faut se rendre à l’évidence, comme on aurait déjà dû le faire depuis longtemps (réalisme ne veut pas dire défaitisme), nous n’avons pas les moyens de tout enseigner dans notre université. Nous n’avons en tout cas pas les moyens de le faire bien, c’est-à-dire en faisant reposer notre enseignement sur une véritable expérience dans les domaines enseignés. Notre universalisme, valeur que je salue et que j’aimerais pouvoir entretenir, repose souvent pour partie sur des connaissances livresques ou de seconde main. Quoi de plus stupide que de maintenir une recherche de faible qualité pour assurer l’enseignement dans un domaine particulier, pour lequel les capacités, l’expérience, la compétence, l’excellence sont ailleurs ? Quoi de plus absurde que de vouloir maintenir des cursus d’études (je parle des seconds ou troisièmes cycles) dont la majorité des cours sont donnés par des enseignants qui n’y sont pas dans leur spécialité ?

Nous devons soutenir activement, chaque fois que nous en avons la possibilité, les domaines de recherche où nous excellons, où nous tenons notre rang au niveau international si nous n’en avons pas la stricte originalité, et ceci au détriment des recherches où nous tenons un rang moyen ou inférieur et pour lesquelles la justification de continuer ne tient que par le désir de laisser tout pousser, même ce qui est banal.
Nous devons soutenir activement les domaines de recherche où nous sommes les premiers, voire les seuls à détenir les compétences ainsi que le savoir-faire, et promouvoir ces domaines de toutes nos forces.
Nous devons proposer des filières d’enseignement, orientations, options, portant prioritairement sur ces domaines, afin d’en assurer la continuité et la primauté dans l’avenir.

Je sais que cette attitude fait bondir. Elle fait bondir ceux qui répugnent — et on les comprend — à admettre eux-mêmes que leur domaine de recherche est secondaire, voire de qualité moyenne. Aucun universitaire n’est spontanément prêt à admettre cet état de fait. Toute sa vie, il (ou elle) a été confronté(e) à des processus sévères qui ont sélectionné son tempérament de battant(e) et il (elle) n’est pas prêt(e) à reconnaître ce qu’il (elle) considérerait comme un échec. Et pourtant, c’est la réalité et il faut, dans l’intérêt collectif pour une fois, savoir l’admettre. Je suis de ceux qui admirent la conviction avec laquelle chaque universitaire défend son domaine individuel, son pré carré, mais j’ai clairement la vision que cet individualisme nous conduira à notre perte.

Plus difficile encore : certains parmi nous sont au sommet de leur carrière de recherche et apparaissent nettement comme des spécialistes internationaux de premier plan dans le domaine qu’ils ont développé. Nulle médiocrité chez eux, nulle banalité. Les spécialistes du monde entier les considèrent comme des maîtres. Mais ils n’ont pas développé ou pu développer, pour quelque raison que ce soit, une équipe forte, avec des successeurs du même acabit qu’eux-mêmes, susceptible de prendre la relève et d’assurer la pérennité du champ de recherche qu’ils ont développé. Là également, il faut savoir regarder les choses en face et s’interroger lucidement sur les chances de voir ce domaine continuer à fleurir richement ou sur le risque qu’il court de se flétrir au fil des ans après le départ du pilote.

Il est bien évident que toutes ces circonstances, pour tristes qu’elles soient, doivent nous inciter à mettre au point des procédures d’estimation et d’évaluation neutres et impartiales.
En aucun cas, les choix ne doivent émaner du recteur lui-même. Sa mission est de sauver le navire, de le faire croître et embellir et de lui amplifier son éclat et sa renommée. Le rôle du capitaine est d’encourager l’équipage à faire ses choix, en fonction de ses compétences, et souvent même d’exiger de l’équipage qu’il fasse ces choix, précisément.
Mais les choix eux-mêmes doivent émaner de la base, de là où le jugement peut le mieux être porté, pour autant que les inévitables querelles de voisinage ou d’influence soient neutralisées par l’intérêt général. Et la meilleure base aujourd’hui, c’est le département.
La décision d’entreprendre des choix peut s’orienter « top-down » mais le choix lui-même doit se faire « bottom-up ».

Au moment de l’élaboration du budget 2007, mais aussi au moment où le virage important que nous avons pris depuis un an se termine, il est essentiel d’entamer aujourd’hui ce processus de sélection, de choix des options qui se présentent à nous. C’est dans l’imagination et la créativité que nous devons faire ces choix. Nous devons comprendre que, pour créer des filières à la fois utiles et attractives, nous devons revoir le bien fondé des cursus désormais classiques, nous devons tout remettre en question. Cela ne nous empêchera pas de décider qu’éventuellement on conserve des filières inchangées, voire même une majorité de filières inchangées, mais alors nous le ferons en connaissance de cause. Il ne faut rien maintenir « parce qu’on a toujours fait comme cela », mais parce qu’il existe d’excellentes raisons de continuer à le faire.

Pour moi, sacrifier certains axes ne se justifie que dans le but d’en renforcer ou d’en créer d’autres. Aucun sacrifice ne doit être consenti s’il ne permet d’apporter assurément un renfort aux axes où nous excellons et où la relève et la pérennité sont assurées, ou aux axes nouveaux qu’il est temps de mettre en place. C’est là que le jugement des départements est en première ligne face à la responsabilité de la décision.
Toute décision d’abandonner des orientations devra faire l’objet d’une évaluation sérieuse et s’accompagner du renforcement de l’existant ou de la création de nouveautés justifiées. En outre, tout abandon de filière devra faire l’objet d’une vérification de l’existence de cette filière ailleurs ou être examiné à la lumière des possibilité d’organiser les enseignements en inter-universitaire, au mieux des compétences respectives.

C’est ainsi que notre université pourra au mieux se définir par rapport à l’extérieur et tout particulièrement vis-à-vis des étudiants. Plus il existera de filières spécifiques à propos desquelles le futur étudiant se dira « pour faire cela, c’est à Liège qu’il faut aller » et plus cet étudiant viendra de loin, mieux l’université se sera définie et aura atteint ses objectifs de notoriété et d’attractivité.

Le paradoxe chinois

Une visite en Chine reste toujours une expérience déconcertante.
D’autant qu’une mission ministérielle régionale/communautaire n’a ni les avantages, ni les inconvénients d’une visite royale comme celle à laquelle j’ai eu l’occasion de participer en juin 2005. Elle ne bénéficie pas de la rapidité des déplacements assistés par des escortes à gyrophares sur des autoroutes étonnamment dégagées et à travers des villes surpeuplées. Elle échappe aux revues de la garde présidentielle et autres défilés militaires ainsi qu’aux parcours aseptisés d’hôtels retirés en Palais du Peuple. Elle est plus exposée aux réalités et aux contrastes locaux. Mais la couche protocolaire est moins épaisse, moins guindée, et laisse mieux transparaître la chaleur de l’accueil.

Certes, la Chine avance à deux vitesses, mais dans sa composante la plus rapide, elle avance vite, très vite, beaucoup plus vite que nous. Même s’il ne s’agit que d’un petit pourcentage, cette évolution compte. En effet, un vingtième de la population chinoise vit très au dessus du niveau de vie européen. Et dans un pays d’un milliard trois cent millions d’habitants, cela correspond à 65 millions de personnes… La visite de villes comme Shanghai ou Nanjing (Nankin) est édifiante à cet égard. Les deux vitesses du développement s’y côtoient en permanence et partout, mais le développement le plus rapide est absolument spectaculaire.

La Chine a encore une longue marche à accomplir pour combler, ne fut-ce que partiellement, ces différences et atteindre l’objectif affiché de « développement harmonieux » pour l’ensemble du pays. C’est, en particulier, dans les campagnes et dans les provinces de l’Ouest que le retard s’avère gigantesque. Mais on ne peut ignorer que la Chine dispose d’ores et déjà d’une énorme population à haut niveau de vie, d’entreprises florissantes en pleine expansion et que, même globalement, son taux de croissance laisse sur place toutes les économies dans le monde, même les plus performantes. En termes de marché à pouvoir d’achat élevé, la Chine représente un potentiel que ne doivent en aucun cas négliger nos entreprises car une niche, même étroite, prend des proportions gigantesques dans un tel pays.

Pas naïfs

Bien sûr, il ne faut pas tomber dans le travers d’une fascination excessive et en oublier tout le reste. A cet égard, le communiqué de presse par lequel la FEF (Fédération des Etudiants Francophones) manifeste son inquiétude, est éclairant :

« Suite au battage médiatique organisé ces derniers temps autour de la mission de la Région Wallonne en Chine, des collaborations structurelles entre les universités chinoises et belges et du fameux modèle universitaire chinois qui laisse certaines personnes admiratives en communauté française, la Fédération des Etudiant(e)s francophones tient à apporter sa pierre au débat.
Tout d’abord, la FEF se demande si la mission (et plus particulièrement Mme Simonet, Ministre de l’Enseignement supérieur à la Communauté française), entre deux visites d’usines, a pris le temps d’examiner les conditions dans lesquelles travaillent tous les étudiants des universités (et pas seulement ceux qui font partie de laboratoires de pointe ou d’universités plus prestigieuses), et ce afin de voir si le système chinois, à l’instar du système en communauté française, promeut l’accès le plus généralisé possible aux études supérieures.
N’oublions pas que, même étant un marché juteux comportant des secteurs d’excellence, la Chine reste à tout le moins un système autoritaire qui base sa prospérité sur une vision des relations de travail fondamentalement différentes de ce qu’on peut trouver en Belgique.
Si c’est pour cela que le système chinois fascine, la FEF pense que cette fascination est inquiétante, si pas dangereuse.
D’autre part, la FEF tient à rappeler que la recherche et plus encore l’enseignement ne doivent pas être assujettis à la loi du marché et aux besoins des entreprises, mais doivent assumer aussi leurs responsabilités en tant qu’acteurs du développement social et individuel. Les étudiant(e)s ne peuvent donc s’empêcher d’être inquiet(e)s lorsque la Ministre dans une interview à la RTBF parle de possibilités accrues de synergies avec les entreprises. »

Il n’y a aucune naïveté dans une mission comme celle que nous venons d’accomplir. Ni naïveté, ni anesthésie, ni fascination béate. Chacun est conscient de l’autoritarisme du système, parfaitement visible sur place, des profondes injustices sociales et de l’insolente mauvaise foi de ce qu’on se plaît à appeler « le pragmatisme chinois ». Mais il est important de faire face aux réalités, quel que soit le jugement de fond qu’on peut en avoir. Et d’ailleurs, il est bien difficile de juger, de l’extérieur, sans avoir parfaitement intégré la compréhension du poids historique et culturel qui pèse lourdement sur la rapidité de l’évolution morale de ce pays.

Par ailleurs, la mission économique était celle du Ministre Jean-Claude Marcourt, pas celle de la Ministre Marie-Dominique Simonet qui, elle, se consacrait aux aspects d’enseignement supérieur, de recherche et de relations internationales. Son accompagnement par des recteurs et représentants des académies universitaires et des hautes écoles en témoigne. Je crois pouvoir dire que les synergies dont a parlé la ministre étaient une allusion à un volet de la mission commun aux deux ministres : le lancement à Shanghai d’un bureau de l’Interface de l’ULg en collaboration avec l’AWEX, à disposition des entreprises « spin off » de notre université et des autres institutions de la Communauté française Wallonie-Bruxelles. Le marché chinois est, pour nos spin off, une ouverture considérable, donc un apport à leur viabilité et indirectement à l’emploi chez nous. Il s’agit là d’un volet supplémentaire de la contribution de l’Université à la création d’entreprises ainsi qu’à l’accompagnement et au développement de celles-ci.

Sur un plan général, et pas seulement chinois, je rappellerai aux étudiants inquiets que les relations des universités avec les entreprises n’augurent pas forcément d’une privatisation de l’enseignement ni de son assujettissement au Capital. Elles permettent un dialogue important à établir et à amplifier avec ceux qui constituent une tranche importante d’employeurs potentiels pour nos étudiants. Le réalisme d’un formateur lui impose de bien connaître le milieu où évolueront ses diplômés.

Une société du savoir

Pour en revenir à la Chine, on ne peut ignorer la stratégie que les dirigeants annoncent très clairement et très officiellement : faire de leur pays la Société du Savoir dans les meilleurs délais. Pour cela, on assiste aujourd’hui en Chine à un revirement dans la politique de l’enseignement et de la formation. Désormais, les chinois ne veulent plus se contenter de développer des technologies ultramodernes compétitives, ils veulent participer pleinement à la production du savoir. Ceci signifie, non seulement un effort énorme en matière d’enseignement supérieur, mais également un soutien massif à la recherche fondamentale comme on le constate déjà en astronomie et dans les sciences du vivant. Et, à cet égard, la qualité des publications réalisées par les équipes de recherche fondamentale dans les meilleures universités chinoises en dit long sur le virage qui est pris ainsi que sur le dynamisme et la détermination de l’initiative.

Le gouvernement chinois a bien compris l’enjeu, qui est de réduire sa dépendance vis-à-vis des Etats-Unis et de l’Europe pour la recherche de base, et l’intérêt qu’a une grande nation à assurer elle-même le continuum complet de la chaîne recherche-développement-production-commercialisation, de A à Z. Il est évidemment délicat pour nous de voir se créer ce nouvel échelon de la recherche amont en Chine. Mais en même temps, si les chinois jouent bien le jeu — et c’est dans ce sens que cela semble se diriger —, il s’agira là d’un apport important à l’effort collectif mondial en vue de l’accroissement de la connaissance. Par ailleurs, c’est ce développement de la recherche fondamentale qui va, c’est certain, faire évoluer en Chine le respect de la propriété intellectuelle. La nécessité de défendre celle des chercheurs chinois élargira cette compréhension aux recherches accomplies à l’étranger et ceci se sent déjà dans le discours officiel.

Le gouvernement chinois a lancé un effort énorme de soutien de ses meilleures universités et un programme extrêmement solide d’incitation au retour au pays pour ses chercheurs émigrés. Certes, cet effort ne porte encore que sur les meilleures universités, celles du « top 50″ chinois, mais le ton est donné et la propagation de cette qualité est attendue ailleurs, ce n’est plus qu’une question de temps. Si cette évolution spectaculaire ne touche encore que des domaines particuliers et n’est guère sensible dans des matières telles que le droit ou la sociologie, nul ne s’en étonnera, mais on doit s’attendre à une transformation générale dans les années qui viennent, surtout si nous faisons l’effort d’interagir avec eux dans les domaines les plus variés.

L’accès à ces universités de pointe est, comme le dénonce la FEF, réservé à certains. La Chine compte plus de 1.500 universités — le concept inclus ce que nous appelons les hautes écoles — et 20 millions d’étudiants… ce qui reste peu : 1,5 % de la population contre 4 % environ chez nous. Ce n’est donc pas le modèle chinois de démocratisation des études que notre mission allait examiner et ce n’est pas en Chine que nous trouverons l’inspiration à ce sujet, bien évidemment. Tout ce qu’on peut en tirer comme conclusion, c’est que nous sommes très en avance en matière d’accès à l’enseignement supérieur.

Converger par le dialogue

Mais ce que nous devons retenir, c’est que, quoi qu’on pense du régime chinois, de ses ambiguïtés, de ses paradoxes et de ses anachronismes, de son autoritarisme, de son « pragmatisme », de son respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ce pays est en pleine évolution et que, dans son effort d’accéder au savoir, il fait converger ses idéaux universitaires vers les nôtres, à terme. C’est bien notre modèle occidental de la recherche et de l’enseignement qui est le sien.

Cette perspective est réconfortante pour nous, mais elle ne se vérifiera dans le futur que dans la mesure où nous saurons accueillir chez nous des étudiants chinois (triés, bien sûr, en fonction de leurs capacités à suivre un enseignement supérieur chez nous : une des démarches que nous avons accomplies à Pékin, outre celle de veiller à ce qu’ils disposent de bourses décentes). Et dans la mesure où nous convaincrons quelques uns de nos étudiants à se rendre en Chine, en particulier en post-doctorat.

Ni l’ignorance ni le boycott ne rapprocheront la Chine de nos valeurs morales et humaines, seuls un dialogue, une meilleure connaissance des uns par les autres et un effort commun de compréhension pourront y parvenir. C’est pour cela que des missions comme celle que nous venons d’accomplir apportent leur toute petite pierre à l’édifice d’une tolérance et d’une compréhension mutuelles, sur une planète où la coexistence pacifique et la coopération constructive finiront par prévaloir.