International


L’excellent commentaire de Rudi Cloots à mon affichage précédent, Partir…, m’amène à m’expliquer avec un peu plus de précision sur ce que j’attends d’un séjour de longue durée à l’étranger. En effet, cela ne peut se résumer à chercher un dépaysement.

Il s’agit en fait:

- d’exercer son métier dans un autre environnement, de cesser de ronronner dans les mêmes idées, de discuter autrement de son travail, de ses recherches;

- de changer éventuellement d’axe de recherche, d’aborder les problèmes autrement, voire de changer de sujet et de réaliser qu’il y a éventuellement mieux à faire que ce qu’on fait;

- de bénéficier d’autres approches méthodologiques ou techniques, de discuter au quotidien avec d’autres chercheurs que ceux de son environnement d’origine;

- de vivre ailleurs, d’être confronté aux difficultés que rencontrent nos visiteurs lorqu’ils viennent chez nous (visas, problèmes de langue, logement, etc…);

- d’améliorer sa connaissance des langues étrangères pour autant que le séjour ne se fasse pas en francophonie;

- de créer des liens souvent très solides avec des chercheurs étrangers, infiniment mieux que dans des colloques et congrès, ou même lors de courts séjours, forcément trop brefs, d’entrer ainsi dans la grande famille des chercheurs migrateurs au sein de laquelle existe une solidarité et une reconnaissance mutuelle inimitables;

- de se grandir et retrouver éventuellement son université avec un regard différent et pouvoir ainsi contribuer utilement à son évolution, en connaissance de cause;

- de transmettre, après son retour s’il a lieu, à ses étudiants, le sens du voyage et de la mobilité, en ayant montré l’exemple.

Certes, je ne prétends pas qu’on ne peut être un bon universitaire sans cela, mais je prétends qu’une université comme la nôtre se doit de vérifier l’acquis de cette expérience chez toute personne qui va faire partie de la Maison pour longtemps et donner l’exemple aux jeunes. C’est un critère, sinon obligatoire, en tout cas prépondérant parmi ceux qui prévalent lors du choix d’un membre définitif de l’Institution.

Un long débat s’est installé dans l’Institution ces dernières années concernant les séjours à l’étranger que nous imposons — avec une fermeté toute relative — avant toute nomination à un poste permanent (premier assistant, chercheur qualifié et, a fortiori, chargé de cours) et une clarification s’impose.
Certes, il s’agit là d’un beau cas de discussion au sein du Collège rectoral, mais je désire dès à présent faire part de mon avis sur le sujet.

Tout d’abord, je ne parle ici que de séjours de longue durée : 6 mois au moins, mais de préférence un an, d’un seul tenant, et non d’une accumulation de petits séjours ou visites étalés dans le temps. Je ne parle que de séjours consacrés majoritairement à une activité de recherche, conduisant à une ou des publications, que l’intéressé(e) a rédigé seul(e) ou en collaboration, attestant de son activité scientifique (au sens large).

Pourquoi de tels séjours ? Parce qu’ils sont l’occasion d’une réelle sortie de son milieu professionnel et d’une adaptation à un autre environnement et une autre culture, dans bien des cas. Une université qui se veut internationale ne peut faire moins que de s’assurer que ses enseignants et ses membres permanents aient fait l’expérience d’un dépaysement professionnel important. En effet, comment demander de manière crédible aux étudiants d’aller étudier ailleurs (on me pardonnera de ne pas encore redire pourquoi c’est souhaitable !) si on n’a, soi-même, fait l’expérience d’un séjour dans un autre pays ?
Et, bien sûr, s’il est souhaitable d’avoir fait la preuve de sa capacité de collaborer avec des collègues étrangers, d’avoir même, si possible, un renom international, de s’être intégré dans un réseau international de recherche, cela n’enlève rien à l’intérêt d’avoir vécu et significativement travaillé ailleurs.

Je pense donc qu’il est bon que le critère ’séjour à l’étranger’ ait une bonne place parmi ceux qui sont pris en compte pour une nomination à titre définitif à l’ULg.

Il est clair que cette exigence peut, dans certains cas, ne pas être rencontrée, à condition qu’une argumentation sérieuse justifie cette carence et que de telles exceptions soient et restent rares et ne risquent donc pas de devenir la règle.

Le mauvais argument est de dire qu’on n’a jamais été prévenu de cette exigence. Il y a suffisamment longtemps que le Conseil d’Administration a annoncé cette règle. Malheureusement, il ne l’a pas toujours appliquée avec la même rigueur.

Je souhaite qu’elle soit dorénavant clairement réaffirmée et que chaque chercheur débutant à l’ULg en soit averti et ne puisse ultérieurement arguer du fait qu’il ignorait cette obligation.

Pour être complet, il faut préciser que le Conseil a également établi que, si des exceptions pouvaient être retenues et des nominations comme chargé de cours acceptées malgré l’absence d’un séjour à l’étranger, cette déficience serait prise en considération dans les éventuelles demandes de promotion. Là aussi, il convient d’être ferme mais pas inébranlable. Toutefois, une argumentation convaincante est alors nécessaire pour justifier des mérites d’une promotion dans ces conditions.

On comprendra donc que l’intention n’est pas d’être ‘intégriste’ mais de faire en sorte que la très grande majorité de nos collègues soient à l’avenir forts d’une expérience solide de travail à l’étranger.

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